«L'avantage de la mer Rouge, c'est que l'eau est chaude, il fait toujours beau, les coraux sont magnifiques et on retrouve une faune importante et très variée», m'explique Olivier Maradan, mon «maître plongeur» attitré, à l'issue de notre seconde immersion de cette journée en mer Rouge.

Gentil délinquant d'origine suisse, Olivier a abandonné les hivers enneigés et son boulot dans une usine, pour la faune et la flore sous-marine égyptienne. En 2008, il a passé ses vacances à Hurghada, et en a profité pour décrocher sa certification de «maître plongeur». Il s'est alors lié d'amitié avec Jean-Luc Schmidt un Alsacien naturalisé québécois, qui a quitté Verdun en 2007 pour s'établir en permanence au bord de la mer Rouge et fonder l'école de plongée Panorama Divers.

 

La première fois que Jean-Luc lui a proposé de travailler avec lui, Olivier a décliné l'invitation. Quelques mois plus tard, il s'est ravisé.

«Mon quotidien désormais, c'est de plonger tous les matins et tous les après-midis», dit celui qui travaille aussi comme guide sur des croisières destinées aux plongeurs de la mer Rouge. À Hurghada, Olivier et Jean-Luc fraternisent chaque jour avec une bande d'expatriés occidentaux qui ont fait de la plongée un mode de vie.

Sur le bateau qui tranquillement nous ramène vers le port, Olivier fait la liste des espèces aperçues cette journée-là. Un poisson-ange, deux bébés barracudas, une murène, un napoléon, un poisson crocodile, une rascasse, des poissons papillons, un poisson cocher, un tétrodon masqué, des poissons flûtes, une demoiselle, un poisson perroquet...

Mon maître-plongeur tatoué m'informe que 70 % des poissons aperçus sont exclusifs à la mer Rouge, deuxième mer la plus salée de la planète.

Plongeuse très novice qui n'avait pas revêtu les palmes, le tuba et la bonbonne d'oxygène depuis un long séjour à l'île Maurice en 2000-2001, je me suis spontanément sentie comme une sirène à peau blanche, dans les eaux d'Hurghada. La clémence du site Abu Ramada Sud y était sûrement pour quelque chose. «Nous avons choisi un endroit compatible avec les gens sur le bateau. Comme il y a aujourd'hui quelques «baptêmes» et des plongeurs de niveaux variés, nous avons préféré un endroit où le courant n'était pas trop fort», indique Olivier.

Des plongeurs et des Russes

Hurghada, la ville où j'ai séjourné pour ce reportage, est une agglomération née il y a à peine 40 ans. Située à 395 km au sud du canal de Suez et à 500 km de la ville du Caire, Hurghada est reconnue pour la clarté de ses eaux et la clémence de ses hivers. Cette petite localité, qui existe par et pour le tourisme, est une suite de complexes hôteliers, de bars, de restaurants à l'occidentale et de cliniques médicales destinées aux plongeurs. Pas vraiment l'endroit, donc, pour visiter des ruines, tombeaux et autres trésors égyptiens! Par contre, les touristes qui voudraient combiner plongée et visites de sites archéologiques peuvent aisément franchir en voiture les cinq heures de route qui séparent Hurghada et Louxor (et la vallée des Rois.)

On raconte que jusqu'à récemment, les voyageurs à palmes et tubas composaient la majeure portion de la population d'Hurghada. Mais ceux-ci doivent désormais partager les lagons azurés avec une nouvelle clientèle tapageuse et très portée sur la bouteille: la nouvelle classe moyenne russe.

Malgré la récession et la peur du H1N1- qui paraît-il, ont ralenti le tourisme en Égypte- la côte de la mer Rouge est en pleine croissance, si l'on se fie aux innombrables lotissements en chantier, qui dominent son littoral désertique. Aujourd'hui, Hurghada est davantage une destination vacances qu'un repère de plongeurs.

Or, même si plusieurs vacanciers préfèrent se faire dorer sur les plages au paysage désertique de la mer Rouge, plutôt que de jouer aux hommes grenouilles, les sites de plongée restent très courus. À chacune de nos immersions, une bonne douzaine de bateaux étaient ancrés dans les environs.

Préoccupée par l'impact écologique des plongeurs, la Hurghada Environmental Protection and Conservation Association entend bientôt instaurer des mesures pour protéger la faune et la flore de la mer Rouge. Ceux qui encadrent la plongée en mer Rouge songent aussi à créer une forme de zonage, pour par exemple éviter que des plongeurs peu expérimentés trébuchent et endommagent les coraux. «Il est aussi question de fermer des sites pendant un certain temps, et ainsi instaurer une rotation dans la fréquentation», dit Hamed Abdallah, de la Red Sea Association.

Mes plongées dans l'eau chaude de la mer Rouge ont valu le long vol jusqu'au pays de Cléopâtre. Un clin d'oeil d'un poisson crocodile m'a fait sourire. J'ai traversé plusieurs abondants bancs de poissons. J'avais des yeux partout, entre les coraux éclatants, les grosses bêtes colorées, les petits trésors cachés ici et là.

Un bain d'eau salée chez Cléopâtre? Aussi incontournable qu'une visite des pyramides à dos de chameaux.

La mer Rouge et les plongeurs

C'est pendant la période de l'occupation israélienne de la péninsule du Sinaï (du milieu de 1967 à 1973) que la plongée sous-marine en mer Rouge a pris son essor. Les premiers sites prisés ont été ceux de Sharm El Sheik, aujourd'hui destination phare des plongeurs de la mer Rouge. Ville touristique très fréquentée toute l'année durant, l'affluence touristique de Sharm El Sheikh subit encore les contrecoups des attaques terroristes de juillet 2005.

Plonger en toute sécurité

Chacun des grands hôtels du littoral de la mer Rouge a son propre centre de plongée, qui de façon générale est aussi doté d'une bonne réputation. Mais on peut aussi opter pour une école hors des Marriott et des Hilton, qui offrira des sorties à moindres coûts.

«Ici, il existe un peu de tout: tu peux trouver des gens qui offrent une journée à 20 euros. Mais à ces prix-là, la question de la sécurité se pose. En revanche, il y a aussi des centres qui demandent 80 euros, sans raison. Ce sont des gens qui cherchent à s'enrichir rapidement», avertit Olivier Maradan, qui suggère aux touristes de choisir avec soin une école de plongée. Aux plongeurs novices, par exemple, il recommande d'éviter à tout prix les écoles qui offrent des «baptêmes» où un instructeur prend en charge quatre plongeurs à la fois. «Afin de garantir la sécurité, il faut un instructeur par baptisé. Et pour les baptêmes, on suggère de ne pas plonger à plus de six mètres.»

Du côté de la Red Sea Association, Hamed Abdallah affirme que l'Égypte est le seul pays au monde qui exige de ses centres de plongée une certification ISO. «Depuis les deux dernières années, nous avons noté de nettes améliorations dans les équipements, les mesures de sécurité, la compétence des instructeurs.»

Les principaux sites de villégiature (Marsa Alam, Hughada, Sharm El Sheik) sont tous bien équipés pour composer avec les accidents de décompression. Mais les plongeurs qui partent en croisière doivent savoir qu'en cas de pépin, ils peuvent parfois se retrouver à plusieurs heures d'un «caisson». Olivier Maradan souligne cependant que les bateaux de croisière comportent le matériel d'oxygénothérapie d'urgence, pour offrir les premiers soins en cas d'accident de décompression. «En espérant que le plongeur tienne jusqu'au caisson!»

Les frais de ce voyage ont été payés par l'Office de Tourisme d'Égypte.