Imaginez que vous êtes une importante station de radio qui emploie des dizaines d'animateurs et de collaborateurs choisis pour leur popularité et leur notoriété.

À l'ère du web 2.0, tous ces leaders d'opinion s'expriment allègrement sur Twitter, Facebook et autres plateformes, générant des tonnes de contenu suivi par une masse considérable d'internautes.

Le hic: comme employeur, vous ne profitez aucunement de ces gazouillis et commentaires pourtant générés par des gens que vous payez et dont vous contribuez au rayonnement. L'activité qu'ils génèrent est affichée sur les réseaux sociaux, et les liens qu'ils partagent renvoient aux quatre coins du web. Bref, elle vous échappe complètement.

Inévitable? Non, a décidé une petite équipe de Québec, AptGeek Technologies, qui veut jouer les agents de circulation sur le web en redirigeant tout ce trafic... chez vous.

«Notre plateforme va chercher le contenu que les contributeurs produisent sur les réseaux sociaux et le ramène sur le site web du client, résume Mathieu Simard, cofondateur d'AptGeek. L'objectif, c'est d'augmenter à la fois le nombre de visiteurs et le temps de visite.»

La petite boîte de Québec travaille notamment avec Radio-Pirate, de Jeff Fillion. L'homme, on le sait, n'a pas la langue dans sa poche. Mardi dernier, en milieu d'après-midi, l'animateur avait par exemple déjà commenté sur Twitter trois articles du canal Argent, quatre de La Presse, deux du Journal de Montréal, et un d'Urbania, de Radio-Canada et du magazine The Economist chacun.

Sans AptGeek, quelqu'un qui voudrait suivre ces commentaires devrait nécessairement posséder un compte Twitter et s'y rendre. En cliquant sur les liens proposés, il se retrouverait sur tous les sites d'information visités plus tôt par Jeff Fillion.

L'affaire prend une tout autre tournure avec AptGeek. Les commentaires de Jeff Fillion se retrouvent affichés automatiquement sur la page web de Radio-Pirate. Et vous pouvez lire tous les articles qu'il commente... sans même quitter le site.

«L'avantage, c'est qu'on fait ça sans modifier les habitudes des animateurs et des collaborateurs. C'est très difficile de changer les comportements», souligne Keith Beaudoin, l'autre cofondateur d'AptGeek.

Pour l'instant, Radio-Pirate et Mix 99,7 FM de Saint-Georges, en Beauce, sont les seuls utilisateurs d'AptGeek. Les fondateurs leur ont remis une version bêta qu'ils testent à fond depuis quelques mois, permettant aux concepteurs d'améliorer leur produit.

«On est déjà en pourparler avec certains réseaux de radio pour s'intégrer dans leur plateforme. On cherche un premier grand partenaire commercial qui va nous donner une vitrine», dit Keith Beaudoin.

Les ambitions sont grandes. Car après la radio, AptGeek veut conquérir les autres plateformes médiatiques.

«On commence par le Québec, mais on ne veut pas s'arrêter là, continue-t-il. On veut ensuite se déployer sur la côte Est, puis dans l'Ouest canadien. Et ensuite, on descend au Sud.»

Le courage de changer d'idée

Contrairement à bien des entreprises en démarrage, AptGeek n'a pas encore frappé à la porte des investisseurs pour recueillir des fonds. En attendant de conquérir le marché des stations de radio, l'équipe de cinq employés multiplie les contrats de consultation pour payer le loyer et les salaires.

L'entreprise n'a pas peur d'explorer différentes avenues. À ses débuts, par exemple, AptGeek voulait faire fortune avec une application permettant de créer des forums de discussion pour les gens qui se retrouvent sur un même site web au même moment.

Keith et Mathieu se sont présentés au camp d'entrepreneuriat FounderFuel avec cette idée dans l'espoir de la développer.

«On s'est fait ramasser, raconte Keith. Pour toutes sortes de raisons, on s'est rendu compte que ça n'avait pas vraiment d'avenir.»

L'équipe a recyclé sa technologie une première fois pour créer une plateforme permettant à n'importe quel internaute de créer sa salle de presse.

«Encore là, on avait le problème d'attirer les gens vers notre plateforme. On s'est dit qu'il fallait se lier à d'autres qui avaient déjà des groupes d'utilisateurs autour d'eux», dit Keith Beaudouin. D'où l'idée d'une application qui va se greffer aux sites des stations de radio. La piste, finalement, semble bonne.

«Dans cinq ans, j'aimerais vraiment que notre outil soit utilisé dans la plupart des gros réseaux médiatiques en Amérique du Nord, dit Keith Beaudoin. Et qu'on puisse présenter ça comme un produit made in Québec.»

Qui

Les fondateurs Keith Beaudoin et Mathieu Simard et trois autres employés.

L'idée

Une application appelée Editola qui permet de ramener le trafic généré sur les réseaux sociaux par les collaborateurs d'une station de radio vers le site web de celle-ci.

L'ambition

Conquérir les gros réseaux médiatiques de l'Amérique du Nord.

Ils y croient et y ont misé de l'argent L'accélérateur d'entreprises FounderFuel possède une participation de 6% dans AptGeek.