Le géant américain Facebook a contesté jeudi devant la justice à Paris avoir censuré un internaute français qui lui reproche d'avoir fermé son compte pour avoir publié une photo du tableau de Gustave Courbet L'origine du Monde représentant un sexe féminin.

«Nous n'avons commis aucune faute, occasionné aucun préjudice», a affirmé à l'audience Me Caroline Lyannaz, l'une des avocats de Facebook, selon qui le plaignant «n'a pas apporté la preuve d'un lien entre cette déconnexion et la publication de l'oeuvre de Gustave Courbet». Sa consoeur Clara Hainsdorf a évoqué «un simple litige de nature contractuelle».

Le plaignant, un professeur nommé Frédéric Durand, reproche au réseau social d'avoir désactivé son compte personnel, «sans préavis ni justificatif», le 27 février 2011.

La coupure serait intervenue quelques heures après la publication sur son mur du célèbre tableau de Courbet, une photo qui renvoyait à un lien permettant de visionner un reportage sur l'histoire de cette oeuvre, aujourd'hui exposée au musée d'Orsay.

Quelques jours plus tôt, la même mésaventure était arrivé à un artiste danois, Frode Steinicke. Facebook avait alors expliqué que ses règles interdisaient entre autre la nudité, mais avait fini par réactiver le compte danois, sans le tableau litigieux.

L'enseignant demande au tribunal de reconnaître la «censure», d'ordonner la réactivation de son compte et de lui accorder 20 000 euros de dommages et intérêts.

Les deux avocates de Facebook, outre de contester la moindre «censure», ont plaidé la nullité de la procédure expliquant que le plaignant avait assigné à tort Facebook inc (USA) au lieu de Facebook Irlande, et estimé que l'affaire relevait de la loi californienne.

La cour d'appel de Paris a pourtant confirmé en février 2016 la compétence de la justice française sur ce dossier.

Sans plaider le fond de l'affaire, les deux avocates ont souligné que le plaignant a utilisé pour ouvrir son compte un pseudonyme, «ce qui est prohibé par Facebook». Elles n'ont toutefois pas affirmé que le compte avait été fermé pour cette raison.

Les avocates ont également expliqué qu'après la fermeture du premier compte, le professeur en a ouvert un second avec un autre pseudonyme, sur lequel a été posté la photo de L'origine du Monde et qui est toujours actif. Elles n'ont toutefois pas expliqué pourquoi le second compte, ouvert avec un pseudonyme, n'a pas été fermé.

Selon Facebook, il serait impossible aujourd'hui de réactiver le compte supprimé, les données n'étant conservées que 90 jours.

Jugeant la procédure abusive, il réclame un euro symbolique pour atteinte à son image.

Dans la charte de sa communauté, Facebook autorise aujourd'hui «les photos de peintures, sculptures et autres oeuvres d'art illustrant des personnages nus», ce qui, selon l'avocat, n'était pas le cas en 2011.

«L'Origine du Monde est un tableau extrêmement significatif qui a parfaitement sa place sur Facebook», a confirmé Delphine Reyre, directrice des Affaires Publiques Europe de Facebook.

Le tribunal a mis sa décision en délibéré au 15 mars.