On n'a pas parlé seulement de la dernière application à la mode au festival South by Southwest. On a aussi abordé des questions liées à l'utilisation des nouvelles technologies et à leur impact dans nos vies.

Le SXSW 2012 aura donc été marquée par deux débats éthiques, le premier provoqué par l'utilisation de sans-abri comme bornes Wi-Fi dans les rues d'Austin, une idée de la branche new-yorkaise d'une agence britannique (Bartle Bogle Hegarty).

En échange d'un «salaire» de 50$ par jour, une dizaine de sans-abri portaient un t-shirt arborant ce message: «Je suis un point d'accès à internet sans fil 4G». Les gens étaient invités à faire un don de 2$ pour 15 minutes de Wi-Fi gratuit. Il faut savoir que deux minutes sans Wi-Fi durant le festival SXSW est considéré comme une petite fin du monde pour les participants (on exagère à peine).

Or, ce que BBH croyait être un coup de marketing ingénieux a plutôt suscité un sentiment d'écoeurement chez plusieurs personnes. «Avons-nous perdu notre humanité?», a demandé le Washington Post. «On croirait cette idée tout droit sortie d'une émission de science-fiction satirique», a observé le magazine Wired. Sur Twitter, où l'histoire des sans-abri Wi-Fi a été commentée en long et en large, certains faisaient valoir que la dignité, «c'était justement de gagner un salaire pour pouvoir s'acheter à manger» (pour lire les nombreux commentaires sur Twitter, entrer le mot clic #homelesswifi).

Le cas des sans-abri Wi-Fi s'apparente à ce qu'on appelle désormais le «clictivisme» (une expression inventée par Micah White de Adbusters et qui signifie l'illusion qu'on peut changer le monde en naviguant et en cliquant sur le web et, par extension, sans véritable implication de notre part). Pour Micah White, les principes de la consommation, du marketing et de l'informatique pervertissent l'engagement social.

Le plus bel exemple de cette tendance à cliquer pour une bonne cause est sans contredit la campagne Kony 2012 menée par l'organisme à but non lucratif Invisible Children. Plusieurs semaines après son lancement, cette promotion - endossée par plusieurs grands noms de la politique internationale et du show-business, et dont l'objectif est de mener à l'arrestation du rebelle ougandais Joseph Kony - fait encore couler beaucoup d'encre. Avons-nous une responsabilité lorsque nous participons au succès de ces phénomènes viraux sur les réseaux sociaux et si oui, comment la définir? Doit-on vérifier l'exactitude d'une cause avant de l'appuyer à l'aide d'un clic?

Le site Visible Children, créé il y a quelques jours, a remis certaines pendules à l'heure en rappelant que l'organisme Invisible Children manquait de transparence financière alors qu'une grande partie des dons amassés était allouée aux voyages de ses employés. En Ouganda, selon Al-Jazira, la projection du film a soulevé la colère de ceux qui l'ont vu. Le film «rabaisse et commercialise la souffrance des Ougandais», a rapporté la télévision arabe.

D'autres estiment que le film joue beaucoup trop la carte de l'émotion et qu'il simplifie une situation qui est plus complexe. Or, qui s'est vraiment donné la peine de s'informer sur la situation ougandaise avant d'afficher le lien sur sa page Facebook ou de le retweeter sur son compte Twitter? Les nouvelles technologies et les réseaux sociaux, bien utilisés, permettent de grandes choses. À condition de ne pas perdre son sens critique.