Les Japonais ont peur des cyber-criminels et des infections informatiques virales lorsqu'ils naviguent sur Internet depuis un PC. Une anxiété que le gouvernement, qui la juge disproportionnée par rapport aux dangers réels, a toutes les peines à combattre.

«Le taux de criminalité en ligne est au Japon l'un des moins élevés du monde, et le nombre d'ordinateurs victimes d'une attaque minime», constate une directrice du ministère de la Communication, Chigusa Saeki, se fondant sur des enquêtes internationales et locales.

Les messages douteux en langues étrangères sont en effet vite repérés et éradiqués dans les serveurs ou boîtes à lettres électroniques, et ceux en japonais sont peu nombreux. Quant aux systèmes de protection, ils sont de plus en plus efficaces en amont des PC particuliers.

«Pour autant, le sentiment d'insécurité est très élevé», regrette Mme Saeki.

Selon la société d'antivirus Symantec, les Japonais sont ceux qui subissent le moins d'agressions informatiques (11% en ont déjà été victimes, contre 23% pour les Français), mais aussi ceux qui les craignent le plus (55% contre 28%).

La quasi absence de danger constatée sur la toile nippone est reflet du bas niveau de délinquance en général dans l'archipel.

Aux dires de Mme Saeki, ses compatriotes ont cependant tendance à être angoissés dès qu'ils s'aventurent sur des terrains peu balisés, peuplés d'inconnus, même si le risque avéré est infime.

Dans l'univers virtuel de la toile «comme dans la vie réelle, on observe le même type de hantise», note Mme Saeki.

Cette réalité paradoxale se remarque quotidiennement au Japon. Elle transparaît immanquablement dans les conversations ou enquêtes d'opinion.

Y revient souvent le mot «fuan» (manque d'assurance, inquiétude), à propos de l'avenir, du travail, de la nourriture, des voyages à l'étranger, de la vie dans les grandes villes, et de bien d'autres sujets. Et ce même s'il n'y a généralement pas lieu de s'en faire.

Heureusement, précise Mme Saeki, tout comme les Japonais mangent et sortent malgré leurs appréhensions, ils font quand même leurs emplettes en ligne, utilisent de nombreux services ou participent à des forums.

Même s'ils ne sont qu'un sur dix à considérer qu'acheter en ligne est sûr, ils sont de gros clients de boutiques virtuelles, lesquelles sont généralement fiables.

«Il faudrait peut-être que nous renforcions l'éducation pour lever l'appréhension et établissions des codes de bonne conduite pour que chacun sache mieux quels comportements sont légitimes sur la toile», estime Mme Saeki. Une réplique des lois et innombrables consignes qui encadrent la vie japonaise, en somme.

L'une des angoisses concerne ce que les Japonais nomment la «puraibashi» (japonisation du terme anglophone «privacy», intimité).

Est-ce la crainte d'être épiés, qu'on utilise à leur insu leurs pérégrinations virtuelles ou réelles pour leur présenter des publicités ciblées et opportunes? Pas du tout.

Leur comportement en ligne comme en ville le confirme, ils trouvent plutôt «pratique» que les messages promotionnels qu'on leur colle sans arrêt sous les yeux correspondent à peu près à leurs goûts, même si pour cela sont analysées leurs habitudes de consommation.

«Pour les Japonais, l'atteinte à l'intimité, c'est le vol de coordonnées bancaires, la fuite dans la nature d'informations personnelles détenues par un organisme, ou encore le fait que sont divulguées des images saisies avec des caméras de surveillance», explique Mme Saeki.

S'il craignent les dangers liés au PC, les Japonais sont en revanche très à l'aise lorsqu'ils naviguent sur les sites pour téléphone mobile, terminal privilégié pour leurs escapades virtuelles.

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