À la fin du mois dernier, trois jeunes entreprises technologiques montréalaises ont appris qu'elles recevront 40 000$ chacune, ainsi qu'une invitation à passer six mois dans un environnement idéal pour concevoir leur produit. À Montréal? Non. En Californie? Non plus. Au Chili, un pays qui pourrait bien inspirer le Québec...

En plus de leur chèque libre d'impôt en poche, les fondateurs d'Art Sumo, d'Ateneo Digital et de Bespoke Mobility iront passer six mois au Chili, aux côtés de 151 autres entreprises en provenance de 33 pays. Ils pourront se concentrer sur leur boulot, tout en créant des liens avec d'autres entrepreneurs issus du secteur technologique.

Doté d'une enveloppe totale de plus de 4 milliards de dollars, StartupChile est un programme d'accélérateur technologique dont l'objectif est d'aider 1000 entreprises à voir le jour d'ici 2014. Contrairement à d'autres organismes du genre, qui visent à faciliter le démarrage d'entreprises, mais qui se financent aussi en gardant une participation dans ces entreprises, l'accélérateur chilien n'a qu'une seule exigence: qu'elles viennent séjourner 24 semaines au Chili.

Pour ce petit pays latino-américain, l'objectif est aussi ambitieux qu'il est difficile à quantifier: le gouvernement chilien, qui commandite le projet, espère créer un pôle technologique important sur son territoire. Même si les entrepreneurs invités partent après six mois, les organisateurs de StartupChile espèrent que leur expérience déteindra sur la communauté locale, et qu'une nouvelle industrie locale verra le jour.

Le Chili provoque les réactions

C'est, en quelque sorte, un pari, mais il provoque la réflexion dans d'autres régions du monde qui aimeraient profiter d'un tel soutien gouvernemental, afin de stimuler l'innovation locale. L'annonce concernant les trois entreprises montréalaises a créé une vague dans le petit monde québécois des nouvelles technologies, certains décochant quelques flèches vers le fonds Teralys, dont l'objectif est de stimuler l'innovation locale, mais dont l'approche s'oppose à celle de StartupChile.

«L'approche des dirigeants de StartupChile est très intéressante: ils croient que l'innovation technologique est une priorité nationale. Ils ont engagé Steve Blank, professeur de Stanford et entrepreneur en série, afin de créer un écosystème favorable à l'innovation, ce qui est plus complexe que d'offrir seulement du capital», explique Sylvain Carle, un entrepreneur montréalais qui a récemment rencontré les gens de StartupChile.

M. Carle, cofondateur de Praized Media puis de Needium, deux sociétés montréalaises offrant leurs services sur la Toile, souhaiterait que le gouvernement québécois consacre au secteur technologique autant d'effort qu'il met à promouvoir son Plan Nord. Teralys est un bon point de départ, mais au-delà de l'argent, il y a la volonté, résume-t-il.

Cela dit, StartupChile ne fait pas des envieux qu'au Québec. Aux États-Unis, plusieurs pensent qu'une stratégie globale visant à attirer les innovateurs serait une bonne façon de relancer l'économie. Le président Obama, déjà très présent sur l'internet, gagnerait à s'inspirer de Sebastian Pinera, son homologue chilien.

En dévoilant les finalistes de StartupChile, M. Pinera a avoué que le Chili a peut-être manqué plusieurs révolutions économiques dans le passé, mais il ne manquera pas la prochaine révolution informatique.

Le Québec pourrait suivre cette voie, conclut Sylvain Carle. «Avec Teralys et les fonds d'amorçage privés, on a déjà fait un pas dans la bonne direction, mais le milieu est disparate. Plusieurs organisations gravitent autour de la technologie, mais aucune spécifiquement pour les startups. Je crois qu'il est temps que ça change. On a les bonnes personnes en place. Il ne reste qu'à catalyser les forces en présence.»

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