Il n'y a pas que George Gillett et Bob Gainey qui ont des petits problèmes ces jours-ci. Gilles Courteau, le grand manitou de la LHJMQ, en a lui aussi. En fait, Gilles Courteau a plutôt un gros problème sur les bras: l'exode des jeunes hockeyeurs québécois vers le Sud.

Dans ce cas-ci, le Sud, ce n'est pas une plage à Cuba, mais plutôt les villes sympathiques de la NCAA, qui attirent de plus en plus les joueurs québécois, à ce qu'il paraît.

Le Quotidien fait état des propos de Pierre Parent, directeur du recrutement des Sags de Chicoutimi. D'après lui, environ 15 des meilleurs espoirs du prochain repêchage du circuit québécois, prévu pour le 6 juin, songent plutôt à mettre le cap sur les États-Unis dès cette année.

Selon un document de Hockey Canada, 84 joueurs du territoire de la LHJMQ ont choisi d'aller patiner aux États-Unis cette saison, dont 60 Québécois. Bien sûr, ces jeunes hommes ne sont pas tous de futurs Martin St-Louis, mais le chiffre est assez gros pour que les bonzes du hockey junior québécois se rongent les ongles juste un peu.

«On est inquiets, a admis Pierre Leduc, directeur des opérations hockey de la LHJMQ. On ne veut pas que tous les jeunes qui ont passé leurs années de hockey mineur au Québec décident d'aller voir ailleurs. Mais en même temps, s'ils décident d'aller voir ailleurs, on ne peut pas les en empêcher.»

Pourquoi aller patiner aux États-Unis, au juste? J'imagine que les raisons sont nombreuses. C'est peut-être l'attrait d'une institution comme Harvard ou Princeton. C'est peut-être l'attrait de la bourse d'études qui vient avec. Sans compter que Boston College ou Denver, c'est probablement un peu plus exotique qu'un voyage en autocar entre Drummondville et Lewiston.

Mais il y a surtout la réputation du hockey junior au Québec. On n'en sort pas. Je sais, la LHJMQ a fait du progrès. Beaucoup de progrès. Les bancs qui se vident, les bagarres dans les estrades, les arbitres qui doivent amener la voiture chez Lebeau vitres d'autos après un match turbulent, tout ça appartient au passé. Je sais.

Mais je sais aussi que la réputation est encore là, justifiée ou pas. Se refaire une image, ça prend parfois des années. Après tout, le fameux rapport Courchesne, qui a tant fait mal à l'image de la ligue, est encore bien frais à la mémoire de tous. L'image de la ligue en a pris un coup, et en attendant, il y a des jeunes qui se disent que c'est mieux aux États-Unis, là où les coups de poing sur la gueule sont plus rares.

«Pourtant, des coups vicieux, il s'en donne dans la NCAA, ajoute Pierre Leduc. Est-ce que notre réputation est vraiment mauvaise? Je ne pense pas. Ceux qui suivent les activités de notre ligue savent qu'il y a eu une nette amélioration quant au contrôle des bagarres. Sur nos patinoires, les bagarres ont diminué de moitié par rapport à la saison précédente. La ligue a progressé.»

En plus, le hockey junior québécois doit composer avec des jeunes qui sont ouverts sur le monde. Qui n'ont pas peur de s'éloigner de la maison pour se rapprocher de leur rêve. Yanick Lemay, le directeur du recrutement du Junior de Montréal, le sait très bien, et ajoute même que le phénomène n'est pas si récent.

«Ça fait 10 ans que je fais du recrutement dans cette ligue, et des joueurs qui partent pour les États-Unis, on a toujours vu ça, estime-t-il. Est-ce qu'ils sont plus nombreux aujourd'hui? C'est dur à dire. Parfois, les gars affirment qu'ils veulent aller jouer là-bas, puis ils finissent par revenir jouer ici. Ce fut le cas avec Angelo Esposito; tout le monde pensait qu'il voulait jouer aux États-Unis, et il a fini par aller à Québec.»

Et les études dans tout ça? «Le hockey junior a fait des pas de géant de ce côté; c'est possible d'allier hockey et études», répond Yanick Lemay.

On revient donc au fameux problème d'image. Comme me le faisait remarquer l'agent Gilles Lupien hier, si la LHJMQ a des problèmes à attirer certains des meilleurs espoirs québécois, c'est peut-être parce que les rivaux américains ont quelque chose de mieux à offrir. Quoi? À Gilles Courteau de trouver la réponse.