Jamie Heward, un ancien défenseur dans la LNH, dit avoir été «élevé pour devenir un joueur de hockey».

«J'ai commencé à l'âge de cinq ans, raconte Heward. «C'est ce que je faisais, c'est ce que j'avais toujours voulu faire et, à certains moments, j'ai fait tout ce qui était nécessaire pour devenir le meilleur et atteindre les niveaux supérieurs.»

Mais une série de commotions cérébrales ont plutôt expédié Heward vers les lignes de côté.

Heward se souvient avoir subi une première commotion cérébrale en 1988 alors qu'il évoluait avec les Pats de Regina, de la Ligue de hockey junior de l'Ouest. Heward se dirigeait vers la ligne bleue adverse et s'apprêtait à recevoir une passe lorsqu'il a été atteint d'un coup de coude au visage de la part d'un rival. Il en a été assommé.

«A l'époque, l'information était beaucoup moins précise qu'elle ne l'est aujourd'hui», a rappelé Heward devant un groupe de 150 personnes réunies à Regina pour participer à un séminaire sur les commotions cérébrales organisé par Hockey Canada.

«Au lieu de demeurer au rancart pendant une semaine à dix jours, ou de subir des tests, je suis retourné au jeu deux jours plus tard.»

Heward a continué de jouer au hockey.

Sélectionné en 1989 par les Penguins de Pittsburgh, il a joué plus tard dans la LNH à Toronto, Nashville, New York, Columbus, Washington, Los Angeles et Tampa Bay. Il a aidé Equipe Canada à récolter deux médailles d'or lors du Championnat du monde de la Fédération internationale de hockey sur glace.

En cours de route, il a été victime d'autres commotions cérébrales.

Le 1er janvier 2009, alors qu'il évoluait avec Tampa Bay, Heward a donné violemment contre la baie vitrée à la suite d'une mise en échec du joueur étoile des Capitals de Washington, Alexander Ovechkin. Une fois de plus, il a été assommé, a passé une nuit à l'hôpital et à son réveil, il a craint avoir subi des dommages neurologiques à long terme.

Lors de son allocution, prononcée devant des entraîneurs et médecins entre autres samedi, Heward a déclaré que cette journée demeurait «floue» dans son esprit et que la vidéo de l'incident était encore difficile à regarder.

«Cette mise en échec, à toutes fins pratiques, a mis un terme à ma carrière. Mais ce n'est pas de cette façon que je voulais que ça se termine.»

Heward croit avoir été victime d'au moins 20 commotions cérébrales au fil des ans, mais il retournait toujours sur la glace.

«La pression nous poussant à retourner au jeu le plus rapidement possible est incroyable. Elle ne vient pas des dirigeants d'équipes et des soigneurs, mais des joueurs eux-mêmes», a déclaré Heward.

«Lorsque je me faisais frapper, confie Heward, ma première réaction était de me dire que je ne serais pas payé si je ne retournais pas sur la patinoire. Je dois reprendre ma place, sinon quelqu'un va me remplacer. A l'occasion, les joueurs de hockey sont leurs pires ennemis.»

Selon Heward, certains iront même jusqu'à mentir aux soigneurs et médecins, parce qu'ils veulent conserver leur place au sein de l'équipe.

Les hockeyeurs ne sont pas les seuls athlètes à ressentir pareille pression. La Ligue nationale de football essaie également de plaquer une fois pour toutes le phénomène des commotions cérébrales.

Au début du mois, l'Associated Press a relaté que près de 20 pour cent des 160 joueurs de la NFL ayant été interrogés ont admis avoir caché le fait qu'ils souffraient d'une commotion cérébrale, ou tenté d'en diminuer les conséquences.

Selon des experts participant au séminaire de Hockey Canada, il s'agit d'une importante part du problème.

«Les gens veulent gagner, ils veulent réussir. Ils veulent la puissance, la gloire, l'argent et ils sont prêts à sacrifier leur santé et prendre des risques pour atteindre ces objectifs. C'est une erreur», soutient Paul Dennis, un psychologue sportif qui a passé 20 ans dans l'organisation des Maple Leafs de Toronto.

M. Dennis est conscient que le message relatif aux commotions cérébrales ne passe pas toujours bien surtout auprès des adolescents, qui se pensent invincibles au point de ne pas en tenir compte.

Mais les entraîneurs, les soigneurs et les parents sont mieux informés et c'est de leur devoir de modifier cette approche, a rappelé M. Dennis.