Le retour probable du Grand Prix à Montréal vient adoucir le méchant coup de blues qui déprime le Tout-Montréal touristique, frappé de plein fouet par la récession, la grippe A (H1N1), le temps de chien, les visas imposés aux Mexicains, alouette. Vivement le retour du Grand Prix, et en juin, autant que possible!

Il est facile de voir l'impact de l'absence du Grand Prix cette année, illustre Michel Archambault, titulaire de la chaire de tourisme de l'École des sciences de la gestion de l'UQAM. «Le revenu moyen par chambre d'hôtel a diminué de 21% en juin 2009 par rapport à juin 2008. Bien sûr, la récession n'est pas étrangère à tout cela, mais si l'on compare les mois de mai 2008 et 2009, la chute est beaucoup moins dramatique: la différence est d'à peine 5%.»

 

Ce que cela veut dire, c'est que, lorsque le cirque de la F1 est en ville, les chambres à 400$ s'envolent facilement, ce qui n'est pas le cas autrement.

«C'est vrai pour les hôtels et pour tous les restaurants haut de gamme, mais pas uniquement, fait valoir Alain Creton, propriétaire du restaurant Chez Alexandre. Le Grand Prix fait déferler à Montréal des gens très fortunés qui achètent ici des montres à 15 000$ et des oeuvres d'art dans des boutiques de luxe du Vieux-Montréal. Et c'est sans compter toute la publicité achetée durant cette semaine-là dans le métro et dans les différents médias.»

La seule étude québécoise réalisée sur les impacts économiques du Grand Prix, à la demande de Tourisme Montréal, remonte à 2001. À la lumière de cette étude, Tourisme Montréal estime que 60% des spectateurs du Grand Prix viennent de l'extérieur de Montréal. Pas moins de 90% d'entre eux viennent pour le week-end et, quand ils viennent de l'extérieur de l'Amérique, ces touristes passent en moyenne 7,3 jours ici. Des gens pas pauvres du tout, ne serait-ce que si l'on considère les 300 coureurs (qui participent aux différentes épreuves au programme) et les 1000 employés des écuries qui les accompagnent. Ensemble, tout ce beau monde dépense de 75 à 100 millions à Montréal et entraîne des retombées fiscales «de 20 à 25 millions», ajoute M. Archambault, de l'UQAM.

 

Juin, le mois idéal

Ces gens ne font pas qu'acheter des objets de luxe et fréquenter les établissements chic du centre-ville... Selon Peter Sergakis, propriétaire de deux bars de danseuses, juin a été pas mal plus tranquille que d'habitude de ce côté-là.

«À Montréal, quand on réussit à recevoir 1500 congressistes, on est content, dit à son tour Paul Arsenault, lui aussi de la chaire de tourisme de l'UQAM. Le Grand Prix, c'était comme recevoir 15 000 congressistes de l'extérieur du Québec au bon moment. C'est d'ailleurs la grande question à se poser maintenant: si le Grand Prix revient, à quel moment reviendra-t-il? Juin, c'est vraiment idéal. Il n'y a plus trop de congrès à Montréal et l'été n'est pas commencé. En septembre et en octobre, le tourisme d'affaires bat son plein à Montréal.»

Pour M. Arsenault, hormis les Jeux olympiques ou la Coupe du monde de soccer, rien ne vaut le Grand Prix. Mais n'est-il pas un peu désolant de devoir s'en remettre toujours aux mêmes «vieux» événements?

«Quand on lance une nouvelle manifestation, comme Montréal en lumière, on n'est jamais sûr qu'elle va survivre à ses cinq premières années. Ensuite, il lui faut au moins 15 ans pour atteindre une certaine notoriété. Alors l'idée de faire disparaître des activités comme le Grand Prix, ça ne tient pas la route.»

Bien sûr, ça pollue, un Grand Prix; bien sûr, ça fait du bruit. «Mais on a nettement minimisé l'impact de sa disparition, croit François Meunier, vice-président, affaires publiques et gouvernementales de l'Association des restaurateurs du Québec. Le Festival de jazz, c'est bien, mais le Grand Prix amène à Montréal un tout autre type de clients qui ne viendrait pas autrement.»