Provoquant l'ire des écologistes, qui abhorrent la pollution qu'il génère, en panne d'intérêt sportif, moins suivi que jamais en France, le Dakar, pour sa 32e édition en 2011, interpelle, à tel point que certains s'interrogent sur son utilité.

Pris au hasard du net, les commentaires sont pour le moins défavorables. «Ce rallye devrait être définitivement interdit.» «Le Dakar est un scandale ignoble». «Déplorable, inutile et criminel. Taisez-vous maintenant avec ce cirque immonde !», enragent des lecteurs d'un blog du monde.fr consacré au sujet.

Certains fans ou ex-participants du rallye-raid ont beau contre-attaquer, l'impression dominante est celle d'une hostilité épidermique.

Bien que se déroulant en Amérique du Sud, dans deux pays, l'Argentine et le Chili, l'accueillant à bras ouvert, le Dakar reste, parfois, appréhendé comme une machine à faucher de petits enfants africains. L'épreuve a longtemps incarné la domination du Nord sur le Sud. Le stigmate peine à s'effacer.

«Je ne comprends pas. Quand on allait en Afrique, on nous disait que des gens qui avaient de l'argent le montraient à d'autres qui n'en avaient pas. (... Pourtant) le Dakar apportait beaucoup de choses. On faisait connaître ces pays. On essayait de travailler avec les Africains. On consommait sur place», remarque David Castera, directeur sportif de l'épreuve.

«Un autre monde»

La course, malgré les drames qu'elle engendrait, était aussi l'un des seuls événements récurrents valorisant le continent à travers ses paysages, ses coutumes.

Mais de fortes présomptions de risque terroriste ont provoqué l'annulation du Dakar en 2008. Et précipité son départ en Amérique latine. Un mouvement salutaire pour l'épreuve ?

Depuis plusieurs années, l'intérêt pour le Dakar va decrescendo en France. Le «Journal du Dakar» attirait six millions de téléspectateurs à 20h30 sur le service public en 1994. Ils n'étaient plus que 600 000 à honorer la course sur France 4 l'an passé.

«L'aura du Dakar était celle de l'aventure, de la découverte de l'Afrique, qui supplantait la course. Mais au bout de 30 ans... on est dans un autre monde. Aujourd'hui, les gens voyagent. On ne les épate plus», observe Daniel Bilalian, directeur des sports de France Télévision, qui diffuse le Dakar.

«Liberté»

«Comme l'aspect 'aventure' s'est un peu réduit, on est revenu au compte-rendu sportif d'une compétition», poursuit-il. Un choix osé, quand 80% des concurrents sont des amateurs n'ayant aucune chance de détrôner les professionnels des dunes.

D'autant que, crise financière aidant, le constructeur japonais Mitsubishi s'est retiré des rallyes-raid en 2009. Et que deux écuries au mieux (Volkswagen et BMW), ou une demi-douzaine d'hommes, peuvent prétendre à la victoire dans la catégorie autos en 2011. Celle des motos est bien plus disputée.

Reste le thème de la pollution. Le Dakar fait tâche dans une période où développement durable et protection de l'environnement sont plébiscités. Au même titre, d'ailleurs, que Formule 1, MotoGP, ou tout autre sport mécanique.

L'épreuve, en s'exilant de l'autre côté de l'Atlantique, semble pourtant s'être assurée un avenir doré. Plus international, bénéficiant d'un soutien exceptionnel des autorités ou de la population, le Dakar revit par son éloignement.

Le rêve qu'il dégage remplace la polémique. La course redevient une affaire de passionnés. «Il y a l'envie de se dépasser, de découvrir des contrées», plaide David Castera, pour qui «il faut laisser aux gens la liberté d'aller découvrir les choses, de se faire plaisir.» Une philosophie que revendique le Dakar.