Après la saison 1986, Andre Dawson profitait de la pleine autonomie et, par conséquent, pouvait légitimement espérer décrocher un contrat à la hauteur de sa décennie d'expérience et de ses performances solides sur le terrain, avec l'organisation des Expos ou ailleurs.

Les négociations avec la direction montréalaise n'annonçaient cependant rien de convaincant. On lui aurait même proposé une diminution salariale de 200 000$. «C'était littéralement comme recevoir une gifle», s'est souvenu Dawson, vendredi dernier, en téléconférence.

Pour «Hawk», il fallait donc se tourner vers d'autres options, préférablement une équipe qui évoluait sur une surface naturelle, nombreuses blessures obligent. Le gazon synthétique du Stade olympique avait considérablement détérioré les genoux de Dawson.

«Dans les circonstances, si je dois absolument encaisser une perte de salaire, je le ferai dans un endroit où je retrouverai le plaisir de jouer et qui sera moins néfaste pour mes genoux», avait constaté Dawson à l'époque.

Mais comme les propriétaires du baseball majeur agissaient de concert pour «tuer» le marché des joueurs autonomes - ils seront plus tard condamnés sévèrement pour collusion -, les bonnes occasions ne tombaient pas sur le bureau de l'agent de Dawson, Dick Moss, comme les feuilles des érables l'automne. Le calme plat.

La stratégie du clan Dawson? Faire une proposition audacieuse qu'un propriétaire (ou un directeur général) pourrait difficilement repousser d'un revers de main, question d'attirer minimalement l'attention.

«Les joueurs étaient forcés de toujours s'entendre avec le même employeur. Nous pensions que la seule façon de nous faire entendre par les autres patrons était de leur soumettre une proposition contractuelle et de les laisser combler les espaces vides (fill in the blanks).»

Deux équipes de la Nationale intéressaient Dawson: les Cubs de Chicago, parce qu'il disait jouer mieux le jour (le Wrigley Field ne disposait pas encore de réflecteurs, donc les Cubs disputaient leurs matchs locaux sous les rayons du soleil), et les Braves d'Atlanta, pour la proximité avec son domicile en Floride.

De passage à Chicago avec les Expos, Dawson avait entendu les partisans des Cubs le supplier de considérer leur équipe en tant que joueur autonome. Il n'en fallait pas davantage pour que le grand baseballeur originaire de Miami fasse les premiers pas et propose aux Cubs ce fameux «contrat en blanc», avec les risques que cela comportait.

Après réflexion et hésitation, le directeur général des Cubs, Dallas Green, avait évidemment lancé sa propre ligne: une offre de 500 000$ plus primes de rendement, ce qui représentait, en plus des 200 000$ retranchés par les Expos, un autre demi-million en moins dans les poches du principal intéressé.

Mais pour Dawson, pour qui il était devenu difficile de reculer, il s'agissait davantage d'une question de principe et de fierté.

On connaît trop bien la suite. À sa première de six saisons dans l'uniforme des Cubs, en 1987, Dawson s'est offert des moments miraculeux (49 circuits et 137 points produits et une moyenne de ,287), raflant au passage le titre de joueur le plus utile dans la Nationale.