Les enfants de parents homosexuels ne sont pas plus susceptibles d'être des garçons « efféminés » ou des filles « garçons manqués », selon une nouvelle étude américaine.

« Les autres études sur la question posaient généralement la question aux parents, explique Rachel Farr, de l'Université du Kentucky, auteure principale de l'étude publiée dans la revue Sex Roles. Nous avons observé les enfants - d'âge préscolaire et du milieu du primaire - et leur avons posé des questions directement. » On demandait par exemple aux enfants quel métier ou quelle profession ils aimeraient exercer plus tard.

La centaine de couples ayant participé à l'étude, dont la moitié étaient homosexuels, étaient cependant généralement « conformes à leur sexe », précise Mme Farr, c'est-à-dire que les femmes, par exemple, portaient des robes et avaient les cheveux longs ou mi-longs. D'autres études qui ont conclu que les parents homosexuels tendent à élever des enfants s'écartant des comportements traditionnels de leur sexe (les camions pour les garçons et les poupées pour les filles, par exemple) avaient des participants moins traditionnels, par exemple une femme ayant une coupe en brosse et s'habillant comme un homme.

« Nous pouvons conclure que l'orientation sexuelle des parents elle-même n'a pas d'impact sur la conformité des enfants aux comportements traditionnels de leur sexe », dit la psychologue américaine, qui a interrompu son congé de maternité - elle a donné naissance à des jumeaux il y a une semaine - pour accorder une entrevue à La Presse. Les enfants de la centaine de familles qu'elle suit depuis 10 ans ont tous été adoptés vers l'âge de 9 mois, par des couples aisés et en grande majorité blancs.

Mme Farr est très sensible aux stéréotypes sexuels. Son message automatique d'absence du bureau évoque un « congé parental » plutôt que « de maternité », et elle utilise le terme « latinx » pour désigner les Latino-Américains, plutôt que les termes « blancs non caucasiens » ou « latinos ». Ce terme est utilisé par les Américains s'opposant à la sexualisation des mots par les langues latines (l'article « le » ou « la ») et à leur convention selon laquelle le masculin pluriel peut inclure des femmes.

BIOLOGIE OU APPRENTISSAGE ?

Et pourtant, elle ne pense pas que son étude donne de la légitimité à ceux qui considèrent que l'apprentissage des comportements traditionnels masculins et féminins est nécessaire au bon développement d'un enfant. Des portraits de parents homosexuels désireux d'écarter leurs enfants des comportements traditionnels de leur sexe (« queering your kid ») font régulièrement scandale dans les médias conservateurs américains. « Comme scientifique, je ne porte aucun jugement sur le côté positif ou négatif de ces comportements », dit Mme Farr.

Quel impact a l'étude de Mme Farr sur le débat à propos des comportements traditionnels des deux sexes ? Certains chercheurs pensent qu'ils ont une base biologique, à cause notamment des hormones sexuelles. D'autres pensent que seuls les stéréotypes et les pressions de la société expliquent que les garçons jouent plus souvent à la guerre ou avec des voitures, alors que les filles jouent plus souvent à la marchande ou avec des poupées. « Je pense que nos résultats montrent que la petite différence qu'on observe vers 2 ou 3 ans a une base biologique, dit Mme Farr. Mais par la suite, la culture amplifie ces différences. »