L'astronaute Chris Hadfield s'envolera en décembre pour son troisième voyage dans l'espace et fera un séjour de six mois à bord de la Station spatiale internationale (SSI). De mars à juin, il sera également le premier Canadien à commander la Station.

«Je crois que mon cas montre que le Canada a une importance dans les vols spatiaux habités beaucoup plus grande que sa taille», a expliqué l'ancien colonel et pilote d'essai lors d'une entrevue à l'Agence spatiale canadienne, à Saint-Hubert, où il a donné hier sa dernière conférence de presse canadienne avant son départ. «Un seul commandant de la Station spatiale avant moi n'était pas russe ou américain.» Le Belge Frank De Winne l'a en effet commandée en 2009, à titre de représentant de l'Agence spatiale européenne.

M. Hadfield, qui a été en 2001 le premier Canadien à faire une sortie spatiale, est le deuxième - après Robert Thirsk en 2009 - à séjourner six mois dans la Station spatiale. Il passera les derniers moments avant son départ à Baïkonour, au Kazakhstan, pour perfectionner ses connaissances sur le vaisseau Soyouz.

«Je suis déjà qualifié pour piloter un Soyouz, mais il faut refaire le test tout juste avant le départ. C'est la même chose avec les qualifications américaines. Je viens tout juste de terminer celles en robotique, qui sont les plus périssables et doivent être terminées en dernier. D'ici deux semaines, selon la date du lancement, je ferai les qualifications européennes et russes, et je devrais être à Baïkonour le 5 décembre.»

«Tout est en russe»

Est-ce difficile de piloter un vaisseau Soyouz? «C'est incroyablement compliqué, tout est en russe, des commandes à la documentation. Et tout vaisseau spatial est compliqué. On doit manoeuvrer en 3D, sans référence, et trouver la Station spatiale comme une aiguille dans une botte de foin. Avec des limites serrées de carburant et de temps. Une seule erreur et tout le monde meurt. Et contrairement à la navette, qui est encore plus compliquée, on est seul pour piloter le Soyouz.»

M. Hadfield ne pilotera en fait le vaisseau Soyouz que si le cosmonaute russe tombe malade.

Quels sont les défis lorsqu'on commande la Station spatiale? «Évidemment, en cas d'urgence, si un météorite frappe la Station ou s'il y a un incendie. Mais au jour le jour, il y a des défis. Il faut toujours évaluer si on peut faire plus ou moins de travail, ou comment réagir si un membre de l'équipage perd un membre de sa famille.»

La situation s'est-elle déjà produite? «Dan Tani a perdu sa mère dans un accident de voiture en 2007, alors qu'il était sur la Station. C'est moi qui m'occupais de sa femme et de ses enfants, je suis allé les reconduire à l'aéroport quand ils sont allés aux funérailles à Chicago.»

Qu'est-ce qu'un commandant doit faire? «Certains ont besoin de moins de travail, d'autres de s'immerger dans le travail. Plus de solitude, ou alors moins. C'est le travail d'un commandant de vérifier ce qui est mieux. Nous passons trois ans à nous préparer tous ensemble pour faire la mission le mieux que nous pouvons.»

Chris Hadfield a décidé de devenir astronaute quand il a suivi en direct l'alunissage de Neil Armstrong, en 1969.

«J'étais au chalet de mes parents, à la rivière St. Clair. On a écouté l'émission chez des voisins. Je savais que mes chances étaient minces, alors j'ai décidé de devenir pilote. J'ai grandi dans une ferme et j'ai toujours aimé la mécanique. Mon père était pilote d'Air Canada, tout comme deux de mes frères.»

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Cinq expériences canadiennes

Parmi les douzaines d'expériences que supervisera Chris Hadfield à bord de la Station spatiale internationale (SSI), cinq sont canadiennes, dont trois touchent les problèmes de santé potentiels des astronautes.

Une expérience suit à la trace la tension artérielle des astronautes pour parvenir à prédire le risque d'évanouissement au moment du retour sur Terre; une autre suit l'évolution des vaisseaux sanguins en apesanteur; la troisième mesure le rayonnement neutronique dans la SSI.

Une autre expérience tente de créer de nouveaux matériaux en apesanteur pour des procédés industriels qui vont du polissage du verre à la filtration des jus de fruits.

Enfin, une expérience d'analyse pathologique rapide pourrait permettre de mieux diagnostiquer les maladies - des infections aux cancers - en régions éloignées ou dans l'espace.

Photo archives Reuters

La Station spatiale internationale (ISS).