Le chef des talibans afghans, le mollah Omar, a qualifié mardi de «perte de temps» l'élection présidentielle prévue l'an prochain en Afghanistan, tout en faisant preuve d'ouverture concernant la réconciliation afghane et «l'éducation moderne».

Les élections afghanes d'avril 2014, qui doivent désigner le successeur de Hamid Karzaï, sont considérées comme un test crucial pour légitimer les fragiles institutions du pays et faciliter la transition après le départ, à la fin de la même année, des 100 000 soldats de la force de l'OTAN.

Les talibans afghans, dont les soutiens sont concentrés au sein des Pachtounes, peuple représentant plus de 40% de la population afghane, ont toujours refusé de participer à ce scrutin et avaient multiplié les attentats lors de la présidentielle de 2009, ce qui avait découragé de nombreux électeurs.

Dans une rare déclaration, pour souligner l'Aïd al-Fitr, la fête de la fin du ramadan, le mois du jeûne musulman qui se termine cette semaine, le mollah Omar a réitéré le rejet du processus électoral sans promettre une cascade d'attentats.

«Nos gens pieux ne vont pas se fatiguer avec le drame décevant que sont les élections de 2014 et ne vont pas non plus y participer», a affirmé le chef des talibans dans un communiqué.

«La sélection a lieu de facto à Washington... La participation à de telles élections n'est qu'une perte de temps, rien de plus», a-t-il ajouté.

Le président Hamid Karzaï, qui dirige le pays depuis la chute des talibans en 2001, ne peut briguer un troisième mandat en vertu de la Constitution.

Les autorités afghanes avaient affirmé la semaine dernière être en mesure d'assurer la sécurité lors de ce scrutin. Le gouvernement afghan a aussi désigné les membres de la commission garante de sa crédibilité.

Car les autorités afghanes et la communauté internationale veulent à tout prix éviter une réédition de la présidentielle de 2009, ternie par des fraudes et les violences des talibans.

La présidentielle doit avoir lieu l'année même de la fin de la mission des soldats de l'OTAN dans ce pays, ce qui risque d'accroître la pression sur les forces de sécurité afghane.

Les États-Unis jonglent de leur côté avec différents scénarios afin de laisser une force résiduelle en Afghanistan après le départ de la mission de l'OTAN.

«Ils (les pays étrangers, ndlr) ne devraient pas jouer une fois de plus avec leur destin et prolonger l'occupation», a prévenu le chef taliban.

«Un signe d'espoir»

S'il rejette toute participation aux élections d'avril, le mollah Omar a toutefois fait preuve d'une certaine ouverture concernant le processus de paix afghan visant à stabiliser le pays après le retrait des forces occidentales.

«Les (talibans) ne veulent pas monopoliser le pouvoir. Nous croyons plutôt à un accord avec les Afghans concernant un gouvernement afghan inclusif fondé sur les principes islamiques», a-t-il soutenu.

Les talibans, au pouvoir à Kaboul de 1996 à 2001, insistent sur l'imposition de leur version de la loi islamique, la charia.

Mais le mollah Omar a suggéré mardi une modification de l'interprétation talibane de la loi en se montrant ouvert à l'éducation dite «moderne», une référence probable à l'enseignement des sciences.

«Pour nous protéger de la pénurie et des épreuves, nos jeunes générations doivent s'armer de la religion et d'une éducation moderne, car l'éducation moderne est un besoin fondamental pour toute société», a affirmé le mollah Omar, jadis à la tête du régime des talibans.

Une tentative d'amorcer des pourparlers de paix a avorté en juin après que l'ouverture du bureau des talibans à Doha, au Qatar, ait littéralement enragé le président Karzaï. Les talibans ont fermé «temporairement» leur bureau au Qatar peu après cet incident.

L'envoi d'une délégation à Doha «montre l'honnêteté et l'engagement (des talibans) pour résoudre les problèmes du peuple oppressé... mais les envahisseurs et leurs alliés ont créé des obstacles», a déploré le mollah tout en louant «les grands succès du jihad» contre les forces étrangères.