(Francfort) Environ 250 000 personnes ont manifesté samedi dans toute l’Allemagne contre le parti d’extrême droite AfD, dont des membres ont récemment discuté de l’expulsion massive de personnes d’origine étrangère lors d’un rassemblement d’identitaires ultra.

Les rassemblements les plus importants ont eu lieu à Francfort, la capitale financière du pays, avec 35 000 participants selon la police locale, réunies derrière une banderole « Défendre la démocratie-Francfort contre l’AfD ».

Un nombre similaire de manifestants ont convergé à Hanovre (nord), certains brandissant des pancartes « Les nazis dehors ». Quelque 30 000 personnes ont aussi défilé dans les rues de Dortmund (ouest), et 16 000 à Halle, selon la police.

Des manifestations se sont aussi tenues à Erfurt, Aix-la-Chapelle, Kassel et dans de nombreuses autres villes plus petites, à l’image des mobilisations quotidiennes cette semaine.

Au total, environ 250 000 personnes ont manifesté samedi pour dénoncer l’extrême droite allemande dans le pays, selon la chaîne de télévision publique ARD.

D’autres rassemblements sont prévus dimanche, notamment à Berlin et Dresde en Saxe, un bastion du parti anti-migrants et anti-système Alternative pour l’Allemagne (AfD).

Des responsables politiques, des représentants religieux et des entraîneurs de la Bundesliga, le championnat de football allemand, ont appelé la population à se mobiliser contre ce parti, actuellement au plus haut dans les intentions de vote.

La mobilisation a été déclenchée par la révélation le 10 janvier par le média d’investigation allemand Correctiv d’une réunion d’extrémistes à Potsdam, près de Berlin, où, en novembre, un projet d’expulsion massive de personnes étrangères ou d’origine étrangère a été discuté.  

PHOTO GEORG HOCHMUTH, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Martin Sellner

La ministre de l’Intérieur Nancy Faeser est allée jusqu’à estimer dans les journaux du groupe de presse Funke que cette réunion rappelait « l’horrible conférence de Wannsee », où les nazis planifièrent en 1942 l’extermination des Juifs européens.

Parmi les participants se trouvaient une figure de la mouvance identitaire radicale, l’Autrichien Martin Sellner, et des membres de l’AfD.

Martin Sellner y a présenté un projet pour renvoyer vers l’Afrique du Nord jusqu’à deux millions de personnes – demandeurs d’asile, étrangers et citoyens allemands qui ne seraient pas assimilés –, affirme Correctiv.

Cette révélation a secoué l’Allemagne alors que l’AfD s’envole dans les sondages, à quelques mois de trois importantes élections régionales dans l’est du pays, où le parti compte le plus de partisans.

Le mouvement anti-immigration a confirmé la présence de ses membres à la réunion, mais nié adhérer au projet de « remigration » porté par Martin Sellner.

PHOTO ADAM BERRY, AGENCE FRANCE-PRESSE

Manifestation à Berlin contre la formation d’extrême droite allemande Alternative pour l’Allemagne (AfD).

Nombre de dirigeants politiques, dont le chancelier social-démocrate Olaf Scholz, qui a participé à une manifestation le weekend dernier, ont souligné que tout plan visant à expulser des personnes d’origine étrangère était une attaque contre la démocratie.

M. Scholz a appelé « chacun à prendre position – pour la cohésion, pour la tolérance, pour notre Allemagne démocratique ».

Friedrich Merz, le chef du parti conservateur CDU, a jugé sur X « très encourageant que des milliers de personnes manifestent pacifiquement contre l’extrémisme ».

Mais outre des membres de l’AfD, deux membres de la CDU, appartenant à la Werteunion, l’aile la plus à droite du parti, avaient également participé à la réunion divulguée par Correctiv.

Le chef de la Werteunion (« Union des valeurs »), Hans-Georg Maassen, a justement annoncé samedi sa scission d’avec la CDU. Le groupe revendique 4000 membres.

« À une large majorité, les membres de la Werteunion ont voté pour la création d’un parti du même nom », qui entend se présenter aux prochaines élections, a déclaré Hans-Georg Maassen.

« Le parti pourrait d’ores et déjà concourir aux élections régionales dans l’est de l’Allemagne et travailler avec toutes les parties […] qui sont prêtes à un changement politique en Allemagne », a-t-il ajouté, n’excluant notamment pas une coopération avec l’AfD.