(Bruxelles) Paris a estimé mardi après Berlin que le blocage par la Hongrie de l’embargo de l’Union européenne (UE) sur le pétrole russe pouvait encore être surmonté dans les prochains jours, contredisant le premier ministre Viktor Orbán qui juge un accord « très improbable ».

La Hongrie, en discussions avec la Commission européenne, « n’est pas en position d’accepter le sixième paquet de sanctions tant que les négociations n’auront pas abouti à résoudre toutes les questions en suspens », écrit le dirigeant souverainiste dans une lettre au président du Conseil européen, Charles Michel.

« Les solutions doivent précéder les sanctions », prévient-il dans ce courrier daté de lundi et consulté mardi par l’AFP.

« Étant donné la gravité des questions toujours ouvertes, il est très improbable qu’une solution complète puisse être trouvée avant le sommet extraordinaire » des chefs d’État et de gouvernement des 27 prévu les 30 et 31 mai, estime-t-il.

Il a demandé que cette question ne « soit pas examinée » lors du sommet au nom de « l’unité de l’Union européenne » qui « doit rester notre priorité ». L’approbation des sanctions exige l’unanimité des 27 États membres de l'UE.

« Je suis convaincu que discuter du paquet de sanctions au niveau des dirigeants en l’absence d’un consensus serait contre-productif. Cela ne ferait que mettre en valeur nos divisions internes sans offrir de chance réaliste de résoudre les divergences », poursuit Viktor Orbán.

La Hongrie dépendante du pétrole russe

Pays enclavé, sans accès à la mer, la Hongrie dépend du pétrole acheminé de Russie par l’oléoduc Droujba. Le dirigeant hongrois souligne que l’embargo pétrolier proposé « causerait immédiatement de sérieuses perturbations d’approvisionnement en Hongrie » et ferait monter les prix « d’environ 55%-60 % ».

Jugeant insuffisante la proposition d’une dérogation de deux années pour mettre en œuvre l’embargo pétrolier offerte à la Hongrie, la Slovaquie et la Tchéquie, la Hongrie a demandé au moins quatre ans et près de 800 millions d’euros (1,1 milliard CAD) en financements européens pour adapter ses raffineries et augmenter la capacité de l’oléoduc Adria qui vient de Croatie.

À défaut, Budapest demande que les oléoducs soient exclus de ce 6e paquet de sanctions de l’UE.

Malgré le refus réitéré de la Hongrie, Paris a estimé mardi qu’« il y a encore la possibilité dans les jours qui viennent de débloquer le veto hongrois », ajoutant que « différentes options sont sur la table ».  

Concernant les demandes de la Hongrie sur les 800 millions et le délai de 4 ans, l’Élysée a laissé entendre qu’on s’approchait d’un compromis dans les discussions entre Budapest et la Commission.

La veille, Berlin s’était aussi montré optimiste, évoquant « une percée d’ici quelques jours ».

La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a elle aussi déclaré mardi sur CNBC qu’elle « espérait » qu’un accord était une question de « jours », tout en évoquant « plusieurs semaines » sur Euronews.

À l’appui de ses arguments pour obtenir un régime particulier, la Hongrie redoute un renchérissement de sa facture pétrolière qui l’empêcherait de plafonner le prix des carburants, comme elle le fait depuis novembre 2021.

« Se passer progressivement de pétrole russe est impossible sans une restructuration complète de nos capacités de raffinerie, requiert une hausse et une accélération des investissements dans nos infrastructures énergétiques et une transition verte rapide », fait valoir M. Orbán dans sa lettre.

Le ministre hongrois des Affaires étrangères Peter Szijjarto avait chiffré la semaine dernière à « 15-18 milliards d’euros » (20 à 25 milliards CAD) le coût d’un arrêt de ses achats de pétrole russe, pour expliquer sa demande d’exemption des approvisionnements par oléoduc.