Lutter contre les désordres liés à la mondialisation sans céder au repli sur soi: aux rencontres d'Aix, économistes et grands patrons ont appelé dimanche à «résister au nationalisme», au lendemain d'un G20 marqué par des crispations sur les sujets internationaux.

Défis migratoires, problèmes climatiques, lutte contre les inégalités : il faut «défendre, à l'échelle mondiale, un ordre international économique ouvert», ont insisté dans leur déclaration finale les organisateurs des rencontres, inquiets face aux «menaces» pesant sur la «prospérité».

«Technologie et mondialisation ont généré une opulence inédite, mais avec ses souffrances et sa face sombre», dans ces conditions, «des pans entiers de la population, sont laissés sur le bord du chemin de cette prospérité, dans le monde émergent comme dans les pays développés», ont-ils souligné.

Mais «l'opportunité offerte par le contexte de reprise économique et la nouvelle donne politique en Europe et en France» doivent «permettre d'amorcer l'ébauche d'un nouveau contrat social, fondé sur la confiance dans le progrès humain et garant de l'égalité des chances», ont-il ajouté.

«Croissance plus inclusive»

Un message à l'image des débats qui ont animé durant trois jours ces 17es rencontres économiques, où responsables politiques, chercheurs et grands patrons se sont relayés pour appeler à une «croissance plus inclusive», dans un contexte de défiance vis-à-vis de la mondialisation.

«La globalisation a été une bonne chose pour le monde, mais clairement il y a des gagnants et des perdants», a concédé Tidjane Thiam, patron du Crédit Suisse, jugeant nécessaire «une reconquête de légitimité» du monde économique «au niveau social».

«On a surestimé certains bénéfices de la mondialisation et ses conséquences» et «sous-estimé le fait qu'il y avait des conséquences très localisées sur des zones industrielles», a renchéri Jean Pisani-Ferry.

Face à une situation internationale «très particulière», l'ancien commissaire général de France Stratégie a ainsi appelé à «résister au nationalisme».

Selon le Cercle des économistes, association organisant ce rendez-vous annuel, ces dysfonctionnements mettent en lumière «l'essoufflement des institutions», «tant dans les pays avancés, avec la montée des populismes, que dans les démocraties autoritaires qui essaiment dans le monde émergent».

«Prospérité au service de tous»

Dans ce contexte, «les économistes doivent prendre toute leur part» à l'effort pour mettre la «prospérité au service de tous», en trouvant des solutions pour moderniser l'économie sociale de marché, a insisté Jean-Hervé Lorenzi, président du Cercle des économistes.

Cette déclaration intervient vingt-quatre heures après le sommet du G20, qui s'est achevé à Hambourg sur un compromis de façade, portant la marque des désaccords entre la nouvelle administration américaine et le reste du monde, notamment sur la question du réchauffement climatique.

Le G20 a pris acte de la sortie des États-Unis de l'Accord de Paris, tout en jugeant le texte «irréversible». Une mise en garde qui n'a pas empêché de nouvelles dissensions, le président turc ayant à son tour menacé de quitter l'accord s'il n'obtenait pas des avantages financiers.

Concernant le commerce international, les grandes puissances ont réaffirmé leur engagement à lutter contre le protectionnisme, tout en reconnaissant aux pays la possibilité de recourir dans certains cas à des «instruments légitimes de défense commerciale».

«Nous avons là le meilleur accord que nous pouvions avoir», a défendu le ministre de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, venu à Aix après avoir participé aux échanges d'Hambourg. «Chacun sait que sur certains sujets, comme le climat, il n'y a pas de consensus», a-t-il ajouté.

Dans la cité provençale, les dissensions internationales ont toutefois suscité les critiques. «Le commerce est un moteur de changement structurel tout comme la technologie. La solution n'est pas de protéger les entreprises mais de requalifier les salariés», a insisté Béatrice Nofal, sherpa de l'Argentine au G20.

Un message relayé par Helène Rey, économiste à la London Business School: «Si nous renoncions à la globalisation, les problèmes globaux comme le changement climatique, eux, ne renonceraient pas à nous. Donc ce n'est pas une solution».