Le mouvement d'Emmanuel Macron a présenté jeudi 428 candidats pour bâtir une «majorité de changement» pour les législatives de juin, avec plus d'une moitié de débutants en politique, et sans le ténor socialiste Manuel Valls pour lequel une solution de compromis a été trouvée.

«Jamais un mouvement politique français doté de 13 mois d'existence n'a porté l'audace d'investir pour devenir députés 52% de nos citoyens qui n'ont pas un CV de professionnel de la politique», a déclaré le secrétaire général du mouvement «La République en marche», Richard Ferrand.

«La promesse de renouvellement est ainsi tenue», a-t-il dit lors d'une conférence de presse, en rappelant la volonté du jeune centriste pro-européen largement élu le 7 mai, de faire souffler un vent de renouveau en France. Seuls 5% sont des députés sortants, tous de gauche.

La candidature de l'ex-premier ministre socialiste Manuel Valls, qui a focalisé l'attention ces derniers jours sur fond de recomposition du paysage politique, a quant à elle débouché sur une solution de compromis.

M. Valls ne répondait pas aux critères d'investiture car «aucun candidat ne peut être investi s'il a déjà fait trois mandats parlementaires», a expliqué M. Ferrand. Il n'était pas question de «passe-droit» mais pas question non plus de «donner l'impression d'humilier»: le mouvement de M. Macron a donc décidé de ne pas lui opposer de candidat dans son fief de l'Essonne (au sud de Paris).

Manuel Valls a «salué» cette décision dans un communiqué, précisant qu'il se présenterait en «homme libre».

Sa décision de rallier la majorité présidentielle au motif que «le parti socialiste est mort» a suscité une pluie de critiques dans son camp, déstabilisé par la défaite cinglante du socialiste Benoit Hamon au premier tour de la présidentielle (6,36% des voix).

En campagne dans le Nord, François Baroin, chef de file de la droite (Les Républicains) pour les législatives a pour sa part qualifié les investitures du camp Macron d'«opération de recyclage du parti socialiste en déshérence».

L'annonce de cette liste de candidats a suscité une première anicroche avec un allié majeur, le parti centriste MoDem.

Soutien-clé d'Emmanuel Macron pendant la campagne, le président du MoDem François Bayrou a affirmé que la liste n'avait pas «l'assentiment» de son parti. Il a instamment demandé au mouvement centriste d'appliquer l'accord conclu «dès le premier jour de notre entente», dont les termes n'ont pas été rendus publics.

La présentation de la liste a par ailleurs donné lieu à plusieurs couacs, plusieurs personnalités présentées comme investies n'étant en fait pas candidates.

Selon M. Ferrand, les 428 candidatures sélectionnées à partir de 19 000 dossiers reçus couvrent «l'ensemble du spectre politique». Elles témoignent aussi d'un engagement de parité avec 214 femmes et 214 hommes.

La liste, qui doit encore être complétée avec l'annonce la semaine prochaine de quelque 150 derniers candidats, comprend des profils atypiques tels le mathématicien Cédric Villani, médaille Fields, ou une ancienne vedette de la corrida à cheval, Marie Sara.

Pour l'instant, le mouvement ne présente pas de candidat contre plusieurs élus de droite, comme l'ancien ministre Bruno Le Maire, ce qui laisse la porte ouverte à d'éventuels transferts.

La victoire d'Emmanuel Macron, 39 ans, sans attache partisane, sans expérience électorale et sans parti structuré, a semé le trouble dans les partis traditionnels, à droite comme à gauche, entre tentation du ralliement et quête de revanche aux élections des 11 et 18 juin.

La droite a accusé M. Macron de vouloir «détruire» le parti «Les Républicains». Mais «il n'y a pas de candidat aux législatives des Républicains qui ait cédé à ces appels du pied», a affirmé jeudi le secrétaire général du parti, Bernard Accoyer.

La passation de pouvoir aura lieu dimanche entre le socialiste François Hollande et Emmanuel Macron, qui doit ensuite annoncer le nom de son premier ministre.

Pour réussir, le plus jeune président de l'histoire moderne en France a besoin d'une majorité claire à l'Assemblée, qui compte 577 sièges: les députés doivent en effet voter la confiance au nouveau Premier ministre et au gouvernement formé dans la foulée des élections.

Des noms d'élus de la droite modérée, comme celui du maire du Havre Edouard Philippe, circulent comme choix possible pour prendre la tête de son gouvernement.

AFP

Manuel Valls et Emmanuel Macron en février dernier.