Les déclarations des ministres se multiplient mais l'avenir reste toujours aussi flou : trois mois après le Brexit, la confusion règne sur les intentions d'un gouvernement divisé et le moment propice du divorce entre le Royaume-Uni et l'UE.

Dernier à se risquer sur la date du début des négociations de sortie de l'Union européenne, le chef de la diplomatie Boris Johnson a avancé « début 2017 ». « Nous discutons avec nos amis et partenaires européens dans l'objectif d'envoyer la lettre de l'article 50 [du traité de Lisbonne, NDLR] au début de l'année prochaine », a-t-il dit jeudi à la chaîne Sky News.

Il a été rapidement recadré par un porte-parole de la première ministre Theresa May, qui a répété son mantra : « la position du gouvernement n'a pas changé, nous ne déclencherons pas l'article 50 avant la fin 2016 et nous utiliserons ce temps pour préparer les négociations. »

Le gouvernement est divisé entre partisans d'un Brexit « dur », qui veulent une sortie rapide de l'UE et du marché unique pour reprendre le contrôle des frontières et limiter l'immigration, et ceux qui sont favorables à un Brexit plus « doux », avec un certain degré d'accès au marché unique et un certain degré de contrôle de l'immigration.

Les trois mousquetaires du Brexit « dur » 

Les électeurs britanniques ont voté le 23 juin la sortie de l'UE largement sur l'argument de la limitation d'une immigration souvent perçue comme une menace pour leur identité, en pleine crise migratoire et montée des populismes en Europe.

Les responsables de l'UE rappellent à toute occasion qu'un accès au marché unique est inséparable de la libre circulation des personnes, excluant ainsi la possibilité d'un contrôle de l'immigration en provenance des pays de l'UE.

Le fer de lance du Brexit dur est tout naturellement le chef de la diplomatie Boris Johnson, champion du non à l'UE pendant la campagne du référendum. M. Johnson soutient ainsi un groupe de pression, « Change Britain », qui a pour but de pousser Theresa May vers le Brexit. L'ancien maire de Londres a enregistré pour eux un message dans lequel il assure que le Brexit doit signifier pour le pays la reprise du contrôle de « ses lois, ses frontières, son argent et son commerce ».

Avec ses collègues David Davis, ministre chargé de la sortie de l'UE, et Liam Fox, au Commerce international, ils forment les trois mousquetaires du Brexit au sein du cabinet. Et Theresa May a bien du mal à les contrôler.

Liam Fox a reproché aux hommes d'affaires britanniques d'être « paresseux » et de préférer jouer au golf plutôt que d'aller chercher avec les dents les contrats que la sortie de l'UE est censée faciliter.

David Davis a avancé qu'il semblait « très improbable » que le pays reste dans le marché unique, devant le parlement début septembre.

« Opinion personnelle », a immédiatement commenté Downing Street.

Car Theresa May a choisi délibérément la discrétion avant l'ouverture des négociations. « Nous ne dévoilerons pas nos intentions prématurément », a-t-elle affirmé au parlement.

Des électeurs prêts au compromis

La confusion atteint aussi les milieux d'affaires : selon le quotidien Financial Times, vendredi, les responsables consultés régulièrement par le gouvernement sur leurs attentes en matière de Brexit ont du mal à comprendre qui est en charge : « C'est très compliqué en ce moment », leur aurait répondu le chancelier de l'Échiquier Philip Hammond.

« Ils font face à la difficulté de gérer la sortie du pays de l'UE. Jour après jour, les divergences entre différents ministres et la première ministre deviennent de plus en plus évidentes », commente Tony Travers, professeur à la London School of Economics.

Les hypothèses vont donc continuer à aller bon train avec la question de savoir si le divorce doit être enclenché début ou plutôt fin 2017, une fois passées les élections en France et en Allemagne.

Sur les attentes des électeurs en tous cas, Mme May trouvera des indications dans une récente étude des sondages faite par l'expert John Curtice. Une majorité de Britanniques seraient prêts à une solution de compromis. « Ils sont pour rester dans le marché unique mais pas à n'importe quel prix » et à condition de « garder un certain contrôle sur l'immigration », a relevé l'expert.