Jo Cox, une députée travailliste pro-UE de 41 ans, a été tuée jeudi par balle, un meurtre qui a aussitôt entraîné la suspension de la campagne pour le référendum sur la place du Royaume-Uni dans l'Union européenne, prévu dans une semaine.

« J'ai le regret d'annoncer qu'elle est morte des suites de ses blessures », a indiqué la chef de la police locale, Dee Collins, lors d'une conférence de presse. Le décès a été constaté à 12 h 48 GMT (8 h 48 à Montréal), a-t-elle précisé.

Ce qui s'est passé

L'attaque s'est produite à proximité de la bibliothèque municipale de Birstall, un village du nord de l'Angleterre où la députée avait pour habitude de rencontrer régulièrement ses administrés. La police indique avoir été alertée à 11 h 53 GMT (7 h 53, heure de Montréal).

Si les circonstances précises restent à déterminer, un témoin cité par l'agence Press Association (PA) rapporte qu'elle a été agressée par un homme portant une casquette de baseball blanche en possession d'une arme de poing dissimulée dans son sac.

L'homme et la députée se seraient battus avant qu'il ne lui tire dessus, a-t-il dit, évoquant également un autre homme qui aurait tenté de s'interposer.

Un second témoin, cité par la BBC, fait état de trois tirs, dont un au niveau de la tête, et affirme qu'elle a été aussi poignardée.

L'agresseur aurait crié «Britain first», soit «Le Royaume-Uni d'abord», selon plusieurs médias britanniques.

Le parti «Britain First», créé par d'anciens membres du parti d'extrême droite Ligue de défense anglaise (English Defense League, EDL), a affirmé ne pas être impliqué dans l'attaque.

Les autorités ajoutent qu'un homme de 77 ans a également été blessé, mais ses jours ne sont pas en danger.

Jo Cox a succombé à ses blessures à 12 h 48 GMT, selon la police.



PHOTO Yui Mok, PA/REUTERS

La députée britannique Jo Cox

Un «solitaire» arrêté



Un homme de 52 ans, identifié par les médias comme s'appelant Tommy Mair, a été rapidement interpellé à proximité du lieu où Cox a été attaquée. Sans indiquer s'il s'agissait du meurtrier présumé, la police a déclaré ne rechercher «à ce stade» aucune autre personne en lien avec l'agression, et évoqué un «incident isolé».

Des armes, et notamment une «arme à feu», ont été retrouvées sur place.

Des habitants de Birstall ont décrit l'individu comme un homme «calme», «solitaire» et s'occupant de jardinage, rapporte l'agence PA, tandis que le Yorkshire Post a publié une photo le montrant vêtu d'une veste treillis et d'une casquette blanche. 

David Pickles, un voisin de M. Mair, a affirmé au Daily Mail que le présumé tueur était un homme « calme, qui vivait seul et restait seul. Il est seul depuis 20 ans. Je n'ai jamais vu beaucoup de visiteurs ou rien de tel ».

Campagne suspendue après son agression

L'annonce de son mort a profondément bouleversé la campagne référendaire, dominée ces deniers jours par la progression dans les sondages des partisans du Brexit.

«Stronger In», le camp du maintien dans l'UE, a rapidement indiqué sur Twitter «suspendre tous les événements de campagne du jour» et aussi ceux de vendredi, tandis que le leader des pro-Brexit, Boris Johnson, annonçait qu'il interrompait son programme pour la journée.

PHOTO THE DAILY MAIL

Tommy Mair

PHOTO @GASIF2016, TWITTER/THE DAILY MAIL

L'assaillant, présenté comme étant Tommy Mair par le Daily Mail, est maîtrisé par les policiers.

Le premier ministre britannique David Cameron, lui-même pro-UE, a annulé de son côté un rassemblement politique prévu dans la soirée à Gibraltar, où il est arrivé dans l'après-midi.

Réactions

Des réactions choquées ont immédiatement afflué sur les réseaux sociaux de la part de personnalités politiques comme d'anonymes.

L'impact sur la campagne devrait dépendre de l'enquête de police, qui devra déterminer l'éventuel caractère politique de l'agression.

 « La famille du Labour et l'ensemble du pays sont sous le choc et éprouvent de la tristesse après le meurtre horrible de Jo Cox », a réagi sur Twitter le chef du Parti travailliste Jeremy Corbyn.

« La mort de Jo Cox est une tragédie. Elle était une députée engagée et bienveillante. Mes pensées vont à son mari Brendan et à ses deux jeunes enfants », a également commenté sur Twitter le premier ministre David Cameron.

Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker s'est dit « terriblement choqué par la terrible attaque contre la députée Jo Cox » sur son compte twitter, adressant « pensées et prières à son mari et ses enfants ».

Le meurtre de la députée britannique Jo Cox lors de la campagne du référendum sur l'Union européenne est une attaque contre tous les partisans de la démocratie, a affirmé jeudi le secrétaire d'État américain John Kerry à Copenhague.

« Je me joins à vous le premier ministre danois Lars Løkke Rasmussen pour exprimer ma profonde peine de voir qu'une jeune parlementaire, qui manifestement était une jeune femme avec un talent immense, a été tuée dans l'exercice de ses fonctions au sein de sa circonscription. C'est une attaque contre tous ceux pour qui la démocratie importe et qui ont foi en elle », a-t-il déclaré.

Le premier ministre français Manuel Valls a exprimé jeudi sa « profonde tristesse », après l'assassinat de Jo Cox, jugeant qu'« à travers elle, notre idéal démocratique a été visé ».

« Profonde tristesse pour Jo Cox et le peuple britannique. À travers elle, notre idéal démocratique a été visé. Ne jamais l'accepter ! », a twitté le premier ministre.

Les présidents de l'Assemblée, du Bundestag allemand et de la Diète polonaise, ainsi que des parlementaires des trois chambres basses du « triangle de Weimar », réunis jeudi à Paris, ont observé jeudi à Paris une minute de silence en hommage à la députée travailliste pro-UE.

Jo Cox une militante pro-UE et des droits des femmes

Mariée et mère de deux jeunes enfants, Jo Cox avait été élue en 2015 dans la circonscription de Batley et Spen, dans le Yorkshire, selon son site internet.

Après des études à l'Université de Cambridge, elle avait occupé différents postes dans des organisations internationales, dont OXFAM, travaillant en Europe, aux États-Unis et dans des zones de conflits dans le monde entier.

Ardente militante pour les droits des femmes, elle avait fait partie du réseau Labour Women's Network, encourageant l'entrée des femmes dans la vie publique.

Au Parlement, elle faisait partie de la commission sur la gouvernance locale, mais aussi du groupe des amis de la Syrie, et participait à des travaux sur les Territoires palestiniens ou le Pakistan.

Jo Cox partageait son temps entre son bateau sur la Tamise et sa maison dans sa circonscription. En dehors de ses activités politiques, elle appréciait l'escalade, la course à pied et le vélo.

Le journal The Independent présentait la jeune députée comme une «étoile montante» du parti travailliste.

PHOTO BRENDAN COX, TWITTER/THE DAILY MAIL

Deux heures à peine après le drame, le mari de Mme Cox, Brendan Cox, partageait sur Twitter ce cliché de sa femme posant devant son bateau. 

Le Brexit en tête dans les sondages

La campagne officielle pro-Brexit « Vote Leave » n'a en revanche pas officiellement pris position sur un arrêt de la campagne, selon un porte-parole.

« Horrifié par ce que j'entends sur l'attaque de Jo Cox. Je lui souhaite un prompt rétablissement », a quant à lui tweeté Nigel Farage, le chef du parti europhobe UKIP.

Le chef du Labour, Jeremy Corbyn s'est dit « profondément choqué par les informations faisant état d'une attaque contre Jo Cox. Les pensées de l'ensemble du Parti travailliste vont à elle et à sa famille », a-t-il commenté.

L'agression est intervenue le jour où deux sondages publiés coup sur coup, Ipsos-Mori et Survation, ont donné le camp du Brexit vainqueur, à 53 % contre 47 % pour le premier, à 52 % contre 48 % pour le second.

Ces deux enquêtes, réalisées par téléphone, étaient très attendues puisque les précédentes pointaient jusque-là nettement en faveur d'un maintien dans l'UE.

Elles ont renforcé l'inquiétude, que ce soit dans les salles de marché de la City de Londres ou dans les couloirs de Bruxelles, même si le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a estimé que l'Union européenne ne sera pas « en danger de mort » si le Brexit l'emporte.

-Avec The Daily Mail