Les indépendantistes catalans ont salué mercredi le plan vers l'indépendance présenté par le président régional Artur Mas, soulignant qu'il avait effectué un «virage» dans leur direction, tandis que le chef du gouvernement espagnol le qualifiait de «pas vers nulle part».

«C'est un pas en avant dans la direction que nous avons toujours réclamée», a déclaré mercredi devant le Parlement catalan Oriol Junqueras, le dirigeant d'Esquerra Republicana de Catalunya (ERC, gauche indépendantiste).

Le soutien de M. Junqueras est indispensable aux projets d'Artur Mas, au pouvoir depuis 2011 en Catalogne et qui souhaite organiser des élections régionales anticipées en 2015 sur le seul sujet de l'indépendance.

Ces élections seraient la première étape d'un plan s'achevant en 2016 par une déclaration d'indépendance de la puissante région espagnole de 7,5 millions d'habitants et qui représente près de 20% de la richesse du pays.

En annonçant ce plan mardi, ce nationaliste conservateur, devenue la bête noire de Madrid, a franchi une nouvelle étape après avoir organisé le 9 novembre un vote symbolique sur l'indépendance en dépit de son interdiction par le tribunal constitutionnel. Cette consultation a attiré 2,3 millions de personnes dont 1,8 million ont dit vouloir quitter l'Espagne.

Pour ces élections anticipées, Artur Mas souhaite présenter aux Catalans une plateforme composée de personnalités politiques et de la société civile favorables à l'indépendance. Si elle était élue, elle préparerait notamment la future Constitution de l'État catalan indépendant.

Cependant, sans l'appui d'ERC à son parti Convergencia i Unio (CiU, conservateurs), son projet n'a aucune chance d'obtenir le soutien de la majorité absolue des électeurs.

Pour l'heure, entre 30% et 40% des Catalans sont favorables à l'indépendance, selon les derniers sondages.

ERC représenterait près de 22% de l'électorat, tandis que CiU obtiendrait quelque 23% des voix si des élections étaient organisées dans l'immédiat, selon une enquête de l'institut Sigma Dos publiée mardi.

Artur Mas qui n'abordait jamais directement il y a deux ans la question de l'indépendance, n'évoquant que celle du droit à l'autodétermination, «a opéré un virage. Lui et son équipe se sont beaucoup rapprochés des positions que nous avons toujours défendues», a aussi déclaré le député Alfred Bosch d'ERC. «C'est immense, historique», a-t-il dit à l'AFP.

Cet élu a cependant souligné que pour réussir leur pari, les partis de MM. Mas et Junqueras devront séduire au-delà de leurs bastions, et notamment convaincre les militants de Podemos, nouvelle formation antilibérale créditée de plus de 14% des intentions de vote en cas d'élections régionales.

«C'est une proposition très courageuse, osée, et la proposition est très difficile à refuser», a aussi réagi mercredi à Barcelone Carme Forcadell, présidente de l'Assemblée nationale catalane (ANC), l'une des deux principales associations indépendantistes.

A Madrid, cette feuille de route a suscité la colère du chef du gouvernement conservateur Mariano Rajoy et le rejet du Parti socialiste (PSOE) qui a toujours été d'accord avec la droite pour défendre l'unité de l'Espagne.

«M. Mas a fait un pas vers nulle part», a tranché Mariano Rajoy.

«Il prétend obliger les Catalans à choisir entre leur condition de Catalans et d'Espagnols ou entre leur condition de Catalans et d'Européens ce qui n'a aucun sens et porte atteinte à la liberté et aux droits des citoyens», a-t-il déclaré à des journalistes à la sortie du Congrès des députés (chambre basse).

«C'est une très mauvaise nouvelle», a réagi le secrétaire général du PSOE Pedro Sanchez, estimant qu'il allait ainsi «diviser encore davantage la société catalane».