La crise économique des dernières années et les mutations du marché du travail font en sorte qu'il est de plus en plus difficile pour les jeunes du Vieux Continent de fonder leur propre foyer. Une situation qui est lourde de conséquences, indique une nouvelle étude.

La crise économique a durement frappé les jeunes du continent européen, qui sont de plus en plus nombreux à devoir vivre avec leurs parents bien après avoir accédé à la majorité.

Un sondage mené par l'organisation Eurofound indique que la proportion d'Européens de 18 à 29 ans demeurant toujours avec leur famille d'origine a augmenté de 44% à 48% de 2007 à 2011. Les hommes étaient plus susceptibles que les femmes de se retrouver dans cette situation.

La hausse a été particulièrement marquée en Hongrie, où un bond de 36 points de pourcentage a été observé, ainsi qu'en Slovénie (+21), en Lituanie (+17) et en Pologne (+15), dans une zone particulièrement touchée par la crise économique.

Cette évolution reflète celle du taux de chômage, qui a sensiblement augmenté durant la période étudiée. En 2007, 7% des jeunes hommes de 18 à 29 ans se disaient sans emploi, contre 14% quatre ans plus tard. Une hausse du même ordre a été observée chez les femmes.

Le lien entre travail et autonomie est manifeste, puisque environ 60% des jeunes occupant un emploi vivaient seul ou avec leur partenaire en 2011. Moins d'un tiers des jeunes au chômage pouvaient en dire autant.

Plus qu'une seule cause

Anna Ludwinek, l'une des chercheuses responsables de l'étude, souligne en entrevue que la crise économique et la diminution afférente des débouchés professionnels n'expliquent pas entièrement la proportion importante de jeunes vivant au domicile de leurs parents.

Outre les traditions culturelles, qui varient d'un pays à l'autre, la mutation en cours du marché du travail, où les emplois précaires se multiplient, est aussi en cause.

«Même si les jeunes ont des emplois, ils ne sont pas aussi stables et permanents que ceux de leurs parents et de leurs grands-parents. La hausse du coût de l'immobilier complique plus encore les choses et freine leur départ du foyer familial», dit-elle.

Faute de trouver des emplois à la hauteur de leurs attentes ou de leurs qualifications, nombre de jeunes se résignent à prendre le chemin de l'exil, ajoute Mme Ludwinek. Elle souligne d'ailleurs la popularité croissante en Irlande, où elle est basée, de visas de travail pour le Canada. Près de 4000 d'entre eux ont trouvé preneur en une demi-heure, il y a quelques semaines.

Un «coût énorme»

La difficulté des jeunes à s'insérer dans le marché du travail a un «coût énorme», souligne la chercheuse, puisque les personnes inactives ou au chômage sont plus susceptibles de se sentir socialement exclues et de souffrir de problèmes de santé mentale.

Autre signe de la détérioration de la situation économique des jeunes Européens: 22% d'entre eux ont dit souffrir de «privations sévères», ce qui signifie qu'ils étaient incapables, par exemple, de se procurer des vêtements neufs, ou d'acheter de la viande ou du poisson tous les deux jours.

La proportion de jeunes qui sont victimes de telles privations a augmenté de six points de pourcentage depuis 2007 et est particulièrement marquée dans des pays comme l'Espagne, le Portugal et la Grèce, tous frappés sévèrement par la crise.

Mme Ludwinek note, sur une note plus positive, que la majorité des Européens de 18 à 29 ans ne se sentent pas exclus de la société malgré les difficultés éprouvées. Et que plus des deux tiers d'entre eux se disent optimistes quant à leur avenir.