La justice russe a libéré sous caution lundi deux Russes, une femme médecin et un photographe qui étaient à bord du navire de Greenpeace arraisonné en septembre, après avoir auparavant prolongé de trois mois la détention d'un autre des 30 membres de l'équipage, un militant australien.

La Russe Ekaterina Zaspa, médecin à bord de l'Arctic Sunrise, sera libérée après avoir payé sa caution, qui s'élève à 2 millions de roubles (plus de 64 000 $), selon la décision prise par un tribunal de Saint-Pétersbourg (nord-ouest).

C'est à Saint-Pétersbourg que les 30 membres de l'équipage du navire de Greenpeace - 28 militants et deux journalistes de 18 pays - ont récemment été transférés après avoir d'abord été incarcérés à Mourmansk, le port russe de la mer de Barents.

Mads Christensen, de Greenpeace, a souligné dans un communiqué que malgré sa libération sous caution, Ekaterina Zaspa «est toujours inculpée de hooliganisme» et que «l'inculpation de piraterie n'a toujours pas été officiellement levée».

Le tribunal a aussi décidé la libération sous caution d'un autre membre de l'équipage du navire de Greenpeace, le photographe russe Denis Siniakov, qui a travaillé dans le passé pour l'Agence France-Presse et pour l'agence Reuters.

Peu avant, un autre tribunal de la deuxième ville de Russie a décidé de prolonger de trois mois, jusqu'au 24 février, la détention provisoire d'un autre membre d'équipage, l'Australien Colin Russell, âgé de 59 ans.

Par ailleurs, un procureur a déclaré lundi qu'il n'était pas hostile à ce qu'une autre militante, la Brésilienne Ana Paula Maciel, soit, elle aussi, libérée sous caution, selon Greenpeace.

Pendant sa comparution lundi, cette militante a présenté dans la cage métallique où se trouvent les détenus plusieurs pancartes proclamant «J'aime la Russie, mais laissez-moi rentrer chez moi» ou «Sauvez l'Arctique».

Les cas de tous les membres de l'équipage doivent être examinés cette semaine.

Lundi, il était planifié d'en examiner sept en tout. Mais la justice a décidé de reporter à mardi et mercredi, respectivement, les audiences pour le Néo-Zélandais David John Haussmann et le vidéaste britannique Kieron Bryan, selon l'ONG.

Greenpeace avait annoncé vendredi que le comité d'enquête, principal organe chargé des investigations criminelles en Russie, souhaitait le maintien en détention de l'équipage pour trois mois supplémentaires, pour «complément d'enquête». La justice avait fixé initialement la détention provisoire à deux mois, délai expirant le 24 novembre.

Le navire avait été arraisonné en septembre par un commando héliporté après une action contre une plateforme pétrolière du géant russe Gazprom dans l'Arctique.

Quelques membres de l'ONG, à bord de canots pneumatiques, avaient tenté de grimper sur la plateforme pour y installer une bannière dénonçant les risques environnementaux.

Les 30 membres d'équipage ont été inculpés de «piraterie», puis, fin octobre, de «hooliganisme».

Il n'a pas été clairement indiqué si la première accusation, passible de 15 ans de prison, avait été levée, la seconde étant passible de 7 ans.

Concernant M. Russell, l'accusation avait demandé son maintien en détention, arguant qu'il pourrait fuir à l'étranger s'il était relâché. Interrogé sur ses intentions, cet Australien, technicien radio sur le navire, avait lancé: «Je suis innocent. C'est pourquoi je n'ai pas à fuir». «Je suis en prison pour rien depuis deux mois et je ne comprends pas pourquoi», avait-il poursuivi, s'exprimant avec l'aide d'un traducteur.

L'ONG a indiqué que ses avocats allaient contester le maintien en détention et exiger la remise en liberté sous caution de tous ses militants, dont 26 sont des étrangers.

«Les autorités disent qu'elles ont besoin de trois mois de plus pour enquêter sur un délit imaginaire, qui ne relève pas de leur juridiction. Cette affaire est un véritable cirque», a réagi lundi Kumi Naidoo, le directeur exécutif de Greenpeace.

La détention de l'équipage de l'Arctic Sunrise a provoqué un tollé dans la société civile à l'échelle internationale.

Des célébrités comme Madonna ou Paul McCartney ont appelé à leur libération et les actions de protestations se sont multipliées dans le monde.

Samedi, des sympathisants de Greenpeace ont manifesté dans plusieurs villes, de Londres à New Delhi, pour réclamer leur libération.

Le tribunal international du droit de la mer, qui siège à Hambourg, en Allemagne, doit rendre sa décision le 22 novembre sur l'affaire. Cette juridiction des Nations unies, compétente pour régler les litiges maritimes, a été saisie par les Pays-Bas, car l'Arctic Sunrise bat pavillon néerlandais.

La Russie a décidé d'ignorer cette procédure.

Le président Vladimir Poutine avait souligné le jour de leur arrestation qu'ils n'étaient certes pas des pirates, mais avaient enfreint la loi.

L'action de Greenpeace visait à dénoncer les risques de l'exploitation pétrolière dans l'Arctique, une zone aux écosystèmes particulièrement fragiles.