Plus d'un million de personnes ont soutenu sur le réseau social Facebook une pétition néerlandaise en vue de préserver le personnage du «Zwarte Piet», l'acolyte de Saint-Nicolas, critiqué en tant que symbole raciste.

«Ne laissez pas disparaître la plus belle tradition des Pays-Bas», peut-on lire sur la page Facebook qui, vers 18 h 30 mercredi, avait recueilli 1 191 763 de mentions «J'aime», un jour à peine après avoir été créée : «Ne laissez pas le Zwarte Piet disparaître».

Le débat sur le caractère raciste présumé du personnage occupe chaque année les Pays-Bas à l'approche de la fête, qui a lieu début décembre. Le nom de ce personnage en néerlandais, «Zwarte Piet», se traduit littéralement par «Pierre noir». Dans la francophonie, il est parfois connu sous le nom de «Père Fouettard».

Le débat est particulièrement houleux cette année depuis l'annonce qu'une commission du Haut Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme a ouvert une enquête sur le sujet.

Malgré la grande popularité de la tradition de Saint-Nicolas aux Pays-Bas, le personnage du «Zwarte Piet», affublé d'un costume médiéval clinquant, coiffé d'une perruque afro, et dont le visage est peint en noir, a ses détracteurs, qui le considèrent comme un stéréotype raciste.

La présidente de cette commission du Haut Commissariat de l'ONU, la Jamaïcaine Verene Shepherd, devrait se rendre aux Pays-Bas le mois prochain pour observer par elle-même la tradition, selon les médias néerlandais.

Mais elle a déjà alimenté le débat en assurant mardi à la télévision néerlandaise : «En tant que noire de peau, je pense que si je vivais aux Pays-Bas, j'aurais des objections».

«Le groupe de travail ne comprend pas pourquoi les gens aux Pays-Bas ne peuvent pas voir qu'il s'agit d'un retour à l'esclavage et qu'au XXIe siècle, cette pratique devrait cesser», a-t-elle ajouté.

Le comité du Haut Commissariat a demandé au gouvernement néerlandais de plus amples informations sur le personnage.

«Selon les informations que nous avons reçues, l'image du "Zwarte Piet" perpétue une vision stéréotypée du peuple africain et des personnes d'origine africaine qui apparaissent comme des citoyens de seconde zone», selon un courrier daté de janvier et publié samedi dans la presse néerlandaise.

L'arrivée officielle de Saint-Nicolas aux Pays-Bas, mi-novembre, est retransmise chaque année à la télévision : venu d'Espagne, il descend d'un bateau à vapeur chargé de cadeaux, accompagné d'une quarantaine de valets, les «Zwarte Pieten».

Trois semaines durant, à partir de la mi-novembre, les enfants déposent chaque soir leurs chaussons devant la cheminée et reçoivent des sucreries, jusqu'au soir du 5 décembre, quand ils reçoivent des cadeaux.

Saint-Nicolas était un évêque turc mort le 6 décembre 342. La fête remonte quant à elle au XVIe siècle, mais la première apparition des «Zwarte Pieten» date des années 1850.

De l'ancien évêque, Saint-Nicolas, également célébré en Belgique, en Allemagne et dans l'est de la France notamment, a gardé une longue barbe blanche, une mitre et un grand manteau rouge.

Mme Shepherd s'est surtout attiré les foudres du public néerlandais en suggérant de supprimer la fête de Saint-Nicolas pour ne conserver que la fête de Noël.

«Y a-t-il un problème avec le fait de n'avoir qu'un père Noël, pourquoi devez-vous avoir deux pères Noël?», a-t-elle demandé.

Les Néerlandais sont divisés sur la question du «Zwarte Piet», mais ils sont unanimes quant au fait que ceux qui ne comprennent pas la culture néerlandaise ne devraient pas prendre part au débat.

«Le Zwarte Piet ramone les cheminées, Saint-Nicolas est turc et ils vivent ensemble en Espagne, voilà ce qu'on célèbre aux Pays-Bas : la meilleure fête de l'intégration», soutient un des partisans de la page Facebook.

Une page Facebook intitulée «le Zwarte Piet est du racisme» n'avait quant à elle que 7166 mentions «J'aime» au même moment.

Dans un sondage publié samedi par le quotidien populaire De Telegraaf, 96 % des 10 000 personnes interrogées ont demandé que le débat sur l'éventuelle suppression du «Zwarte Piet» cesse.

Au total 66 % ont répondu que l'on pouvait tout aussi bien supprimer la fête de Saint-Nicolas elle-même si le «Zwarte Piet» devait être supprimé.