De nouvelles mesures sont attendues en Grèce pour faire taire Aube dorée, après la suspension dans la nuit par le Parlement de l'aide de l'État au parti néonazi, dont un militant a assassiné un rappeur antifasciste en septembre.

Voté à une large majorité de 235 voix sur les 300 de l'Assemblée, le texte prévoit «la suspension de toute aide de l'État à un parti dont le dirigeant (...) ou un dixième des élus sont poursuivis pour constitution ou participation à une organisation criminelle», ce qui est le cas d'Aube dorée.

Car six députés de ce parti dont son leader, Nikos Michaloliakos, soit un tiers des 18 élus de son groupe parlementaire, sont depuis plusieurs semaines sous le coup d'une inculpation pour leur implication dans une «organisation criminelle», un crime passible de 10 à 20 ans de prison.

Trois autres députés d'Aube dorée, dont l'immunité parlementaire a été levée la semaine dernière, risquent d'être renvoyés devant la justice pour le même chef, selon une source judiciaire.

Les deux juges d'instruction spéciaux chargés du dossier doivent les convoquer dans les prochains jours pour les interroger, selon cette source.

Au début du mois, les magistrats avaient placé en détention provisoire trois députés du parti, dont Nikos Michaloliakos et son bras droit, Christos Pappas.

Eleni Zaroulia, épouse du chef d'Aube dorée, est également dans le collimateur des juges : elle doit être privée de son immunité parlementaire lors d'un vote à l'Assemblée prévue la semaine prochaine.

Le parquet de la Cour suprême a requis cette mesure après que Mme Zaroulia eut tenté de faire passer une balle de pistolet dans les locaux de la direction de la police où son mari était en garde à vue.

Front commun

Ces mesures ont été prises dans le cadre de l'offensive contre Aube dorée lancée après l'assassinat le 18 septembre du rappeur antifasciste Pavlos Fyssas par un membre de ce parti.

Depuis septembre, les arrestations ont continué dans les rangs des militants néonazis, mais aussi au sein des services de la police, dont certains membres sont accusés de liens avec cette formation qui depuis des années bénéficiait d'une quasi-impunité des autorités.

Accusé à plusieurs reprises d'indulgence vis-à-vis des violences racistes, le gouvernement grec ne perd désormais plus une occasion de montrer sa détermination à lutter contre Aube dorée.

L'objectif du vote nominatif demandé mardi par les socialistes du Pasok sur le texte suspendant le financement d'État à Aube dorée était «de dire tous ensemble "oui" à la lutte contre le fascisme», a déclaré le porte-parole parlementaire du Pasok, Paris Koukoulopoulos.

Malgré ses réserves initiales, la gauche radicale Syriza, principal parti d'opposition, s'est finalement ralliée au texte.

Mercredi, le Conseil de l'Europe s'est félicité des mesures prises par le gouvernement. «Je soutiens la ligne adoptée par le gouvernement grec pour faire face à Aube dorée», a indiqué le secrétaire général, Thorbjorn Jagland, à l'issue d'un entretien à Athènes avec le ministre grec des Affaires étrangères, Evangélos Vénizélos.

M. Jagland a suggéré «la modernisation de l'arsenal juridique grec avec de nouvelles lois contre le discours ou les actes racistes». Cette loi, dont le vote a déjà échoué avant l'été, doit être représentée au Parlement, mais aucun calendrier n'a été annoncé.

À la faveur de la crise et de ses retombées sociales qui frappent la Grèce depuis quatre ans, les néonazis sont entrés pour la première fois au Parlement aux dernières élections en juin 2012 avec 7 % des voix.

L'aide de l'État aux partis est proportionnelle à leur score électoral et le parti a déjà encaissé 1,7 million d'euros, selon la presse grecque.

Pour certains observateurs, l'offensive antinazie du gouvernement de coalition droite-socialistes depuis un an et demi au pouvoir, et qui ne dispose que d'une faible majorité de 155 députés sur 300, vise aussi à récupérer une partie de leur électorat.

Toutefois, Aube dorée, qui ne cesse de qualifier ces mesures «d'anticonstitutionnelles», continue d'occuper la troisième place dans de récents sondages, avec 8 % d'intentions de vote.