Le braqueur le plus recherché de France, Redoine Faïd, auteur d'une spectaculaire évasion en avril, a été interpellé dans la nuit de mardi à mercredi dans un hôtel de la région parisienne, un mois et demi après s'être fait la belle d'une prison du nord.

La maison d'arrêt de Séquedin, dont ce spécialiste des braquages avec explosifs s'était échappé le 13 avril, est située près de la frontière belge. Son signalement avait été transmis à Interpol et à toutes les polices de l'espace Schengen.

Faïd, 41 ans, auteur d'un livre sur sa carrière de braqueur, a finalement été arrêté par la police dans un hôtel de Pontault-Combault, à 15 kilomètres de Villiers-sur-Marne.

Il est accusé d'avoir participé avec d'autres braqueurs à une fusillade qui a coûté la vie à une policière municipale le 20 mai 2010.

Redoine Faïd s'est vu signifier neuf chefs de mise en examen mercredi soir à Lille (nord), dont «évasion avec usage d'une arme ou d'une substance explosive, commise en bande organisée et en récidive légale», «détention et transport d'engins explosifs», «séquestration d'otages», «violences volontaires» et «association de malfaiteurs».

Il a été envoyé en détention dans la région parisienne, a déclaré à l'AFP le procureur de la République à Lille, Frédéric Fèvre. Redoine Faïd encourt la détention à perpétuité.

«À l'évidence, il a beaucoup circulé pendant six semaines», a commenté mercredi le ministre français de l'Intérieur, Manuel Valls. Cela a été confirmé par des sources policières qui pensent qu'il s'est trouvé à l'étranger «à un moment donné» et n'a «pu résister au fait de revoir sa famille et surtout son fils qu'il adorait», ce qui a pu «précipiter sa chute».

Un de ses complices de cavale, âgé de 29 ans, a également été interpellé. Faïd «se grimait» pour sortir, ont constaté les policiers qui le filaient depuis quelques jours autour de sa «planque» à l'hôtel.

Christian Lothion, le directeur central de la police judiciaire, a déclaré mercredi matin l'avoir localisé mardi. «Quand nous avons eu la certitude qu'il était bien rentré et était dans cette chambre, nous avons décidé de passer à l'action en pleine nuit».

Il avait une arme dans sa chambre, une autre dans sa voiture, a précisé M. Lothion, ajoutant que son complice présumé «n'était pas forcément l'une de ses relations connues dans le passé».

Michael Mann comme «conseiller technique»

Ancien caïd des cités, Faïd était devenu une célébrité après avoir écrit en 2010 un ouvrage sur sa carrière de spécialiste du braquage de fourgons de convoyage de fonds. Il avait fait le tour des plateaux de télévision, en affirmant s'être «rangé».

Surnommé «L'Ecrivain» par les policiers, il s'était aussi fait remarquer en avril 2009, à la Cinémathèque de Paris, en remerciant Michael Mann, le réalisateur du film «Heat» dans lequel un policier incarné par Al Pacino pourchasse un braqueur à l'explosif qu'interprète Robert De Niro.

«Vous avez été mon conseiller technique», avait-il dit au cinéaste, interloqué. Tout Faïd : culot, malice, yeux rieurs, intelligence, peur de rien ni de personne.

Mercredi matin, les clients de l'hôtel où il se cachait ont raconté avoir entendu «beaucoup de bruit» au moment de son interpellation vers 3h (21h à Montréal). Selon une jeune femme y travaillant, le complice de Faïd avait réglé en liquide la chambre où les deux hommes comptaient visiblement rester plusieurs jours.

Originaire de Creil, à 45 km au nord de Paris, Redoine Faïd avait été arrêté pour la dernière fois en juin 2011 près de Lille alors qu'il était en liberté conditionnelle après une condamnation à 18 ans de prison pour un braquage de fourgon blindé.

Soupçonné depuis pour le meurtre en 2010 de la jeune policière, il était considéré comme particulièrement dangereux.

L'enquête devra maintenant établir les complicités dont Faïd a bénéficié pendant sa fuite et son évasion visiblement minutieusement préparée.

Il s'était enfui en prenant en otage sous la menace d'une arme quatre surveillants alors qu'il se rendait au parloir, et à l'aide d'explosifs et d'une tenue de gardien qu'il avait revêtue.

À l'époque, Manuel Valls avait dénoncé les «failles» ayant permis l'évasion de ce «détenu particulièrement surveillé» censé faire l'objet d'une vigilance accrue.

«Il a bénéficié d'un certain nombre de complicités», a réaffirmé mercredi le ministre. Dès l'évasion, le procureur à Lille avait dit son souhait de comprendre «comment dans la prison il avait pu se retrouver en possession d'explosifs et d'une arme».