Lundi noir pour Silvio Berlusconi: les magistrats du nord de l'Italie l'accusent de tricher sur son état de santé pour éviter le réquisitoire dans le procès Rubygate, et ceux du sud réclament son renvoi immédiat en justice pour corruption.

Concernant le procès Rubygate, dans lequel l'ex-chef du gouvernement italien est accusé de prostitution de mineure et d'abus de pouvoir, le tribunal de Milan (nord) a ordonné un contrôle médical pour vérifier s'il était réellement dans l'impossibilité de participer ce lundi à l'audience au cours de laquelle devait être prononcé le réquisitoire.

Silvio Berlusconi, 76 ans, se trouve dans un hôpital de Milan depuis vendredi pour une uvéite, une inflammation d'une partie de l'oeil, devenue d'après sa défense particulièrement douloureuse et gênante. Ses médecins traitants disent qu'il souffre en outre d'hypertension.

Les experts médicaux du tribunal ont estimé que le problème d'hypertension justifiait son absence et le tribunal a finalement décidé de renvoyer le procès à mercredi pour établir un nouveau calendrier des audiences, dont la date pour terminer le réquisitoire.

Le tribunal avait accepté vendredi déjà une demande de report du procès présentée par la défense de M. Berlusconi, fixant à ce lundi la fin du réquisitoire au cours duquel le parquet doit énoncer la peine qu'il requiert.

Dans ce procès, qui a débuté en avril 2011, M. Berlusconi est accusé d'avoir rémunéré en 2010 pour une dizaine de prestations sexuelles une jeune Marocaine, Karima El Mahroug, surnommée «Ruby la voleuse de coeurs», mineure à l'époque, un délit puni par la prison en Italie.

Il risque jusqu'à trois ans de prison pour prostitution de mineure et douze ans pour abus de pouvoir, car il est en outre accusé d'avoir fait pression sur la préfecture de police de Milan pour qu'elle libère Ruby, interpellée à la suite d'un larcin commis en mai 2010.

Les deux intéressés ont toujours affirmé n'avoir eu aucune relation sexuelle.

À quelque huit cents kilomètres plus au sud, le Parquet de Naples a pour sa part demandé lundi le renvoi immédiat en justice du Cavaliere, le soupçonnant d'avoir «acheté» il y a plusieurs années un sénateur de l'opposition, facilitant ainsi la chute du gouvernement de Romano Prodi.

L'affaire remonte aux élections législatives de 2006, remportées de justesse par une coalition hétéroclite de gauche dirigée par Romano Prodi qui n'avait qu'une poignée de voix de plus que Silvio Berlusconi au Sénat.

Quelques mois à peine après les élections, Sergio De Gregorio, l'un des sénateurs élus dans l'un des partis de la coalition de M. Prodi, quitte son camp passant avec armes et bagages chez Silvio Berlusconi. Rendant encore plus fragile la majorité qui soutenait M. Prodi, il a accéléré la chute du gouvernement de gauche qui allait jeter l'éponge en 2008, moins de deux ans après le scrutin.

Selon le Parquet, le Cavaliere a versé trois millions d'euros, dont deux en espèces, à Sergio De Gregorio pour le débaucher, et ce dernier l'a reconnu devant des magistrats et même dans la presse.

L'enquête est de la compétence du Parquet de Naples (sud) car Sergio De Gregorio a été élu dans cette circonscription.

«Naturellement que j'ai pris de l'argent de Berlusconi, je l'ai d'ailleurs déjà dit aux magistrats», a déclaré récemment à un journal M. De Gregorio, un témoignage bien embarrassant pour le Cavaliere.

En droit italien, la procédure accélérée de procès immédiat peut être demandée par le ministère public quand la preuve du délit est considérée comme «évidente».

Silvio Berlusconi a été condamné il y a une semaine à peine à un an de prison en première instance pour violation du secret de l'instruction, mais il bénéficiera d'une prescription dans cette affaire au plus tard au début de l'automne.

Le Cavaliere a été condamné à plusieurs reprises en première ou en seconde instance, mais il a ensuite toujours été acquitté ou a bénéficié de prescriptions.