La fillette blessée dans le massacre, mercredi dans l'est de la France, de vacanciers venus du Royaume-Uni a été plongée dans un coma artificiel et va être réopérée, tandis que l'autre petite fille rescapée parle, a révélé jeudi le procureur d'Annecy.

L'enfant de 4 ans, restée huit heures sous les jupes d'une femme morte, était restée immobile et totalement invisible des gendarmes, qui ignoraient sa présence, a-t-il expliqué le procureur au cours d'une conférence de presse.

Trois des quatre personnes trouvées mortes ont été tuées d'une balle dans la tête. Il s'agit du conducteur de la BMW immatriculée en Grande-Bretagne, de l'une des deux femmes trouvées mortes sur la banquette arrière et d'un cycliste découvert à proximité du véhicule.

Le propriétaire de la BMW a été identifié comme étant Saad al-Hilli, 50 ans, né à Bagdad et résidant dans le Surrey, a-t-on appris jeudi auprès d'une source policière et de source proche de l'enquête.

Le conducteur de la voiture, mort aussi, est né en Irak mais pourrait avoir été naturalisé britannique. Par ailleurs, deux passeports, suédois et irakien, ont été découverts.

La plus âgée des victimes de la tuerie mercredi dans l'est de la France est de nationalité suédoise, a indiqué jeudi le ministère suédois des Affaires étrangères.

« Les informations données en France sont justes. Elle est suédoise. Nous attendons la fin du processus d'identification pour donner une confirmation officielle », a dit à l'AFP une porte-parole de la diplomatie suédoise Linn Duvhammar.

Mme Duvhammar a refusé de communiquer l'identité de la victime dans l'attente de la confirmation officielle, qui pourrait intervenir avant la fin de la journée. Sa famille en Suède va être informée par la police dans l'après-midi.

Les circonstances du massacre dans lequel elle a perdu la vie, ainsi que vraisemblablement deux autres membres de sa famille restent mystérieuses.

Perquisition à la résidence des victimes

La police britannique a perquisitionné aujourd'hui au domicile de la famille des victimes, une maison à colombages d'un quartier résidentiel et arboré de Claygate, à une trentaine de kilomètres au sud de Londres, a constaté l'AFP.

Une policière en civil se tenait à l'extérieur de la maison, empêchant les journalistes d'entrer dans la propriété de ce village rattaché à la commune d'Esher.

À Claygate, le facteur Gary Standford a indiqué que le propriétaire habitait dans la maison depuis environ trois ans. «Il avait l'air d'un homme agréable», a-t-il commenté.

Selon son profil professionnel sur l'internet, Saad al-Hilli était consultant dans le domaine de l'aéronautique.

Non loin de sa résidence, à une adresse correspondant au siège de la firme Shtech, son entreprise de conception de systèmes informatiques, un homme se présentant comme son comptable, Julian Stedman, a exprimé sa consternation. «Je n'aurais jamais pensé qu'il pouvait s'agir de lui. C'est un choc total», a déclaré cet homme, qui avait entendu parler de la tuerie de Haute-Savoie mais n'avait pas fait le lien avec Saad al-Hilli. À la question de savoir s'il connaissait des ennemis à Saad al-Hilli, il a dit: «Aucun à ma connaissance.»

Confirmant que la famille était en vacances à la fin août dans les Alpes françaises, il a déclaré n'avoir pas eu de nouvelles d'eux depuis.

L'école primaire locale a confirmé de son côté avoir une élève du nom de Zainab al-Hilli, âgée de 7 ans. Son âge correspond à celui de la fillette trouvée sur les lieux du drame, qui a été hospitalisée mercredi, grièvement blessée.

La fillette doit être réopérée. Elle a été plongée dans un coma artificiel, mais ses jours ne sont plus en danger, a indiqué le procureur Éric Maillaud.

Mercredi en fin après-midi, un vacancier britannique à vélo avait découvert dans une forêt de la commune de Chevaline la voiture avec trois cadavres à l'intérieur et le corps d'un cycliste gisant à quelques mètres de là. Deux fillettes ont également été trouvées, l'une gravement blessée, proche de la voiture, l'autre, indemne, prostrée dans la voiture, près du cadavre d'une femme.

Éric Maillaud a rendu hommage au premier témoin ayant donné l'alerte, qui se trouve être un ancien de la Royal Air force.

«La police du Surrey aide les autorités françaises et est en contact avec le ministère britannique des Affaires étrangères à la suite de la mort de quatre personnes près d'Annecy», a par ailleurs indiqué la police régionale dans un communiqué.

De nombreuses douilles d'arme automatique ont d'ores et déjà été trouvées sur les lieux du crime.

«Compte tenu de ce que l'on voit, il est certain que la piste criminelle est à mettre en numéro 1, a estimé le procureur d'Annecy. Après, toutes les pistes sont possibles, ça pourrait être aussi dans l'absolu un drame familial, ce n'est pas à exclure.»

Les médias britanniques se sont emparés de l'affaire dès mercredi soir, après la révélation que la plaque d'immatriculation du véhicule était britannique. The Independent et The Mirror évoquent l'hypothèse d'un braquage qui aurait mal tourné. The Daily Telegraph parle d'assassinats, prémédités donc, par un tueur soucieux de ne laisser aucun témoin derrière lui, des hypothèses que les enquêteurs n'avancent pas pour l'heure.

«Fusillade terrible et tragique en France», a écrit sur Twitter le ministre britannique des Affaires étrangères William Hague. «L'équipe de l'ambassade britannique est sur place. Nos pensées vont aux fillettes qui ont survécu et à la famille», a-t-il ajouté.

Une fillette miraculée

La fillette de 4 ans qui a été retrouvée indemne vers minuit dans la nuit de mercredi à jeudi, était prostrée au fond de la voiture.

«Elle est restée sous les corps, prostrée pendant près de huit heures et n'a pas bougé pendant tout ce temps. On n'a pu la trouver qu'à partir du moment où on a eu accès à la scène du crime», c'est-à-dire après l'arrivée des techniciens de l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN), venus de Paris.

«La petite parlait anglais. Elle a entendu des bruits, des cris, mais elle ne peut pas en dire plus, elle n'a que 4 ans.»

«Il va de soi que les deux fillettes sont protégées» par les forces de l'ordre, a ajouté le procureur. «Toutes les précautions ont été prises pour qu'elles soient encadrées, soignées et protégées dans les meilleures conditions possibles», a-t-il ajouté, se refusant à préciser le lieu où a été placée la cadette.