Des élections législatives anticipées se tiendront le 6 mai en Grèce où la crise de la dette qui sévit depuis deux ans a entraîné un éclatement inédit du paysage politique tout en renforçant la droite, favorite pour ce scrutin.

Sans cesse reportée depuis plusieurs semaines, l'annonce de la date des élections, le 6 mai comme attendu, a finalement été rendue publique mercredi par le premier ministre Lucas Papademos.

M. Papademos en a d'abord fait part à son conseil des ministres avant d'aller soumettre cette proposition au chef de l'État Carolos Papoulias. Le premier ministre devait s'adresser à la nation dans la soirée.

À la tête depuis novembre 2011 d'un gouvernement de coalition auquel participent les deux grands partis du pays, Pasok (socialiste) et Nouvelle-Démocratie (ND, droite), M. Papademos a indiqué à ses ministres que le nouveau gouvernement aurait à agir rapidement.

Des «décisions importantes devront être prises prochainement», a dit le premier ministre, cité dans un communiqué de ses services: «définir les conditions de la recapitalisation des banques grecques» après les pertes qu'elles ont subies lors de l'effacement d'une partie de la dette grecque, «voter en juin le programme de moyen terme de la stratégie économique du pays 2013-2016» où de nouvelles mesures de rigueur de 11,5 milliards d'euros (15,7 milliards de dollars) devraient être adoptées.

En 2012, la Grèce devrait connaître sa cinquième année de récession consécutive alors que le taux de chômage dépasse les 21%.

Le compte à rebours pour la tenue d'élections anticipées avait commencé en mars après l'effacement de 105 milliards d'euros (137,5 milliards de dollars) de la dette détenue par les créanciers privés de la Grèce et l'approbation d'un deuxième prêt international accordé au pays.

M. Papademos, 64 ans, ancien vice-président de la Banque centrale européenne, a joué un rôle-clé dans ces négociations délicates. «Les grands objectifs de ce gouvernement ont été atteints (...), nous avons évité le risque imminent de la faillite», a jugé M. Papademos mercredi sans cacher que le gouvernement n'avait pas été exempt de tiraillements entre ses différentes composantes politiques.

L'organisation des législatives, qui devaient normalement avoir lieu en 2013, était réclamée par le leader de la Nouvelle Démocratie Antonis Samaras depuis la démission en novembre 2011 de l'ancien premier ministre socialiste Georges Papandréou après son projet avorté de référendum sur la rigueur imposée au pays pour répondre aux exigences des créanciers UE et FMI.

Fervente opposante, jusqu'en novembre, des mesures de rigueur, la ND a su capitaliser sur la perte de popularité du Pasok, large vainqueur des législatives d'octobre 2009.

Toutefois, sa participation au gouvernement de M. Papademos et son approbation d'un nouveau plan de rigueur voté le 12 février ont freiné sa montée.

S'ils arrivent toujours en tête des sondages, les conservateurs ne rassemblent, selon les enquêtes, que de 13% à 20% des intentions de vote, ce qui ne leur permettrait pas de constituer seuls la majorité gouvernementale et leur imposerait de s'allier au Pasok, crédité de 10% à 15%, voire à d'autres petits partis.

«Par rapport aux élections de 2009, les deux principaux partis, Pasok et ND, ont perdu environ 35% de leur électorat -25% et 10% respectivement- au profit des partis de gauche et les petits partis rassemblant les dissidents de la droite», a indiqué à l'AFP Thomas Gérakis, dirigeant de l'institut de sondage Marc.

Les trois partis de gauche -les communistes du KKE, la gauche radicale Syriza, et la gauche démocratique (Dimar)- affichent chacun entre 8 et 10% des intentions de vote. Un score que pourrait atteindre, selon les sondages, le tout nouveau parti «Grecs indépendants», opposé aux plans de rigueur, créé par un dissident de la ND.

Quatre petits partis, dont deux d'extrême droite, sont donnés autour des 3%, seuil pour entrer au Parlement.

Cette dispersion des forces, divisées entre celles qui sont favorables au plan UE-FMI de rigueur et les opposants à l'austérité, illustre «l'éclatement du paysage politique traditionnel, dominé pendant quarante ans par l'alternance entre la ND et le Pasok», souligne M. Gerakis.

Cette situation politique instable inquiète les dirigeants internationaux alors que la Grèce est loin d'être sortie de l'ornière.

Pour M. Gérakis, «ces élections sont difficiles et cruciales pour l'avenir et inaugurent une nouvelle période, la plus importante depuis 1974», année du retour de la démocratie après sept ans de dictature.