Vingt cas de cancer ont été déclarés en France chez des femmes porteuses de prothèses mammaires PIP, au coeur d'un scandale planétaire, a-t-on appris vendredi, alors que l'Italie ouvrait à son tour une enquête contre le fondateur de la société incriminée.

Aucun lien à ce jour n'a été établi entre ces cancers et le port de prothèses, a cependant précisé l'Agence des produits de santé (Afssaps) qui a publié ce nouveau bilan.

L'agence a recensé au total 16 cas de tumeurs malignes du sein et quatre cas de tumeurs malignes ne touchant pas les seins, ainsi que 1.143 ruptures d'implant et 495 cas de réactions inflammatoires.

Alors que s'installe une psychose sur les dangers supposés de ces prothèses fabriquées avec des gels de silicone non conformes, la justice italienne a ouvert une enquête contre Jean-Claude Mas, 72 ans, le fondateur de la société française Poly Implant Prothèse (PIP), pour «fraude commerciale» et «vente de produits dangereux pour la santé».

Jean-Claude Mas est déjà visé en France par deux enquêtes judiciaires, pour «tromperie aggravée» et «homicides involontaires». Plus de 2500 plaintes ont déjà été déposées contre lui.

La Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) vient de déposer plainte «pour tromperie aggravée et escroquerie», ce qui lui permettra de demander réparation de son préjudice, alors que le coût du retrait des implants des quelque 30 000 femmes porteuses en France -- préconisé par le gouvernement et à la charge de la sécurité sociale -- est estimé à 60 millions d'euros.

Le procès pour «tromperie aggravée» est prévu à l'automne 2012, tandis que l'enquête pour «homicide involontaire» ne fait que commencer.

PIP, un temps le numéro trois mondial des prothèses mammaires, est soupçonné d'avoir eu recours de manière frauduleuse à un gel de mauvaise qualité pour fabriquer ses implants. Ce gel, dix fois moins coûteux que le gel conforme, entraîne des risques accrus de rupture de l'enveloppe de la prothèse.

Des plaintes déjà enregistrées par centaines et le retrait du marché de ses produits en mars 2010 n'ont cependant pas semblé décourager Jean-Claude Mas, qui s'apprêtait à participer au lancement d'une nouvelle société de fabrication de prothèses à prix réduit.

Selon des documents enregistrés au tribunal de commerce de Toulon (sud-est), les enfants de Jean-Claude Mas, Nicolas et Peggy Lucciardi, respectivement âgés de 27 et 24 ans, ont créé en juin France Implant Technologie (FIT).

Le nom du fondateur de PIP apparaît dans l'organigramme de ce nouvel établissement en tant que «consultant technico-commercial» et «créateur de génie», selon le quotidien Nice-Matin, qui a révélé vendredi l'information, citant un document sur la stratégie commerciale de la société.

Cette nouvelle société aurait pour «objectif de se déployer sur le marché européen, sud-américain et chinois» à des tarifs concurrentiels pour prendre le relais de PIP, selon le journal local.

Regard vif et barbe grise sur les dernières photos de lui publiées dans la presse, le septuagénaire vit reclus dans le sud-est de la France depuis que le scandale a éclaté. Sans s'exprimer lui-même directement, il a commencé ces derniers jours à se défendre, par la voix de son avocat.

Il ne nie pas avoir utilisé un gel de silicone non agréé, pour fabriquer des implants à des prix défiant toute concurrence. «C'était moins cher», «logique capitaliste», assène son avocat Me Yves Haddad.

Mais ces prothèses commercialisées en France et très largement exportées en Amérique latine et en Europe ne présentaient selon lui aucun danger pour la santé des centaines de milliers de femmes qui se les sont fait poser depuis la création de PIP en 1991.

Le Brésil a définitivement interdit vendredi l'usage des prothèses PIP.

La France reste le seul pays à recommander leur retrait, mais le Venezuela a annoncé la gratuité de l'opération pour les femmes qui le souhaitent et plusieurs pays, comme le Brésil ou l'Italie, ont invité les porteuses à consulter un médecin.