Plus de deux cent mille manifestants à travers l'Allemagne ont réclamé samedi la fermeture des centrales nucléaires, à la veille d'une élection régionale qui fait figure de plébiscite sur la politique énergétique d'Angela Merkel.

L'un des organisateurs, l'association «Ausgestrahlt», a annoncé que 250 000 personnes avaient défilé dans quatre grandes villes d'Allemagne pour réclamer la fin immédiate de l'exploitation des 17 réacteurs nucléaires du pays.

Selon cette association, 120 000 étaient présentes à la manifestation berlinoise, la police de la capitale allemande, interrogée par l'AFP, estimant pour sa part qu'elles étaient «plus de 100 000».

À Munich, sous la pluie, la police évoquait «au moins 25 000 personnes» et les organisateurs 40 000, tandis qu'à Hambourg et à Cologne, les organisateurs en ont compté respectivement 50 000 et 40 000 qui se sont ralliées au mot d'ordre: «Fukushima nous exhorte à éteindre tous les réacteurs».

«Ce sont les plus grandes manifestations contre le nucléaire en Allemagne à ce jour», s'est réjoui le collectif des organisateurs dans un communiqué commun.

Dans une opinion publique de longue date majoritairement hostile au nucléaire, la catastrophe à la centrale japonaise a servi de «piqûre de rappel», a expliqué à l'AFP Curd Knüpfer, un étudiant berlinois de 26 ans.

«Les antinucléaires qui manifestent aujourd'hui ne sont pas apparus du jour au lendemain», mais Fukushima a «remobilisé ceux qui avaient déjà manifesté en nombre contre le prolongement de la durée de vie des centrales, lorsque Merkel l'avait décidé», a-t-il rappelé.

«Il faut tirer les leçons du Japon : rien n'est impossible», pouvait-on par exemple lire à Berlin sur une pancarte, tandis qu'un char de carnaval construit par les Verts représentait un réacteur nucléaire basculant «dans la poubelle de l'histoire».

«Je suis venue demander l'arrêt des centrales nucléaires parce que j'ai la ferme intention de mourir de vieillesse, et pas à cause des radiations», a déclaré Monika Flemming, 53 ans, vendeuse en pré-retraite, originaire du Brandebourg (est).

Opposante de longue date au nucléaire, elle manifeste pourtant pour la première fois. «Je trouve que cela n'a jamais été aussi urgent que maintenant. J'ai le sentiment que c'est le moment de faire bouger les choses, que l'opinion publique est prête à évoluer».

La chancelière allemande avait annoncé, peu après la catastrophe de Fukushima, la fermeture temporaire des réacteurs les plus anciens et un audit de trois mois sur tout le parc nucléaire allemand.

Mais cette réaction, cinq mois après avoir prolongé la durée de vie des 17 réacteurs nucléaires de 12 ans en moyenne, a été considérée comme une manoeuvre politicienne par une majorité d'Allemands, selon les sondages.

Les chances de voir le parti de Mme Merkel, la CDU, conserver dimanche la tête du Bade-Wurtemberg, riche État régional du sud-ouest, qu'il contrôle depuis 1953 sans interruption, se sont considérablement amenuisées depuis.

Les sondages des derniers jours donnent unanimement quatre à cinq points d'avance aux Verts et au SPD face à la coalition CDU et Libéraux du FDP.

Dans l'État régional voisin de Rhénanie-Palatinat, qui vote également dimanche, mais qui n'a plus de réacteur en activité, la candidate CDU qui semblait pouvoir contester la suprématie du ministre président social-démocrate Kurt Beck, en poste depuis 1994, a vu son élan stoppé par la volte-face de Mme Merkel sur le nucléaire.