Sur fond d'affaires en série touchant ses ministres, le président français Nicolas Sarkozy met son gouvernement à la diète, sans faire taire les critiques de ceux qui voudraient que l'Elysée et Matignon donnent l'exemple.

Le 20 mai, le président de la République avait annoncé un nouveau tour de vis budgétaire pour tenter de redresser les finances de la France, dont les déficits, notamment avec la crise, atteignent des sommets.

État, collectivité territoriales et sécurité sociales avaient été priés de se serrer la ceinture pour répondre à cette «priorité nationale». Objectif: économiser 95 milliards d'euros.

La cure d'austérité annoncée lundi par M. Sarkozy pour réduire «vigoureusement» le train de vie de l'État, sous peine de «sanctions» pour les récalcitrants, est à visée beaucoup plus modeste, «de l'ordre d'un milliard d'euros» d'économies, selon Gilles Carrez, rapporteur général du budget à l'Assemblée. Mais on est aussi dans l'ordre du symbole, même si certaines économies demandées aux ministres ne sont pas indolores.

La réduction des membres de cabinet devrait faire grincer quelques dents, la ministre de l'Économie, Christine Lagarde, d'ordinaire peu suspecte de rébellion, ayant estimé que la diminution du nombre de ses collaborateurs n'était pas forcément «la meilleure économie».

Alors que des dénonciations d'abus au gouvernement se sont succédé (Christian Blanc, Christian Estrosi, Alain Joyandet, Fadela Amara...), culminant avec l'affaire Bettencourt, dans laquelle les noms d'Eric Woerth et de son épouse sont cités, M. Sarkozy tente ainsi de remettre de l'ordre au sommet de l'État.

Partisan déclaré d'une «République irréprochable» depuis sa campagne électorale de 2007, le chef de l'État n'hésite pas à parler «d'impératif moral» dans sa lettre à François Fillon, détaillant «les économies» à réaliser.

Certaines de ces économies avait déjà été décidées par le premier ministre, en 2007 (fiscalisation des logements des ministres), et parfois jamais respectées (limitation du nombre des conseillers ministériels).

Sitôt connues, les annonces présidentielles ont suscité un flot de réactions, sans surprise, positives à droite, critiques à gauche.

«L'exemplarité défendue par le président à tous les étages de la République doit être saluée à l'heure où il est demandé des efforts à tous les Français», se félicite Frédéric Lefebvre, porte-parole de l'UMP.

Mais Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, ne voit dans les annonces de M. Sarkozy qu'un «gros écran de fumée pour faire avaler des réductions de dépenses publiques», tandis que Jérome Cahuzac, président PS de la Commission des finances de l'Assemblée nationale, regrette que le président n'ait pas appliqué à son salaire la cure d'austérité qu'il demande à ses ministres.

Quant au député René Dosière (app-PS), grand scrutateur du train de vie de l'État, il reste «sceptique» devant cette diète gouvernementale, «sympathique» dans ses intentions, «mais tout ça n'est pas chiffré!». Et pourquoi l'Elysée et Matignon sont-ils exemptés, demande-t-il.

Dans l'entourage de M. Sarkozy, on rappelle cependant «les mesures d'économie» et de «transparence» adoptées par la présidence depuis 2007: «contrôle du budget par la Cour des comptes, réduction de 10% des effectifs, diminution de 3,2 millions d'euros des charges de fonctionnement et de 8,5% de la masse salariale en 2009, progression des dépenses pour la même année limitée à 1,74%, vente de propriétés de la présidence (Marly-le-Roi, Rambouillet), appels d'offres systématiques...»