Vivement critiqué dans son camp après une déroute aux régionales, le président français Nicolas Sarkozy a tenté mercredi de rassurer l'électorat de droite, en promettant de poursuivre les réformes, malgré l'abandon de fait d'un projet emblématique de taxe écologique.

«Rien ne serait pire que de changer de cap du tout au tout, en cédant à l'agitation propre aux périodes électorales», a affirmé le chef de l'État, qui s'exprimait pour la première fois depuis le cuisant revers subi par la majorité de droite aux élections régionales des 14 et 21 mars.

Cet échec électoral a conduit à un remaniement ministériel limité mais symbolique, destiné à rassurer une majorité critique, avec l'entrée au gouvernement de personnalités de la droite non sarkozyste, et au renoncement dans l'immédiat à la taxe carbone.

Face à la grogne sociale ayant conduit plusieurs centaines de milliers de personnes dans la rue mardi, le président a certes promis de «ne pas passer en force» sur la réforme des retraites, dernier grand chantier de son mandat, mais a assuré que celle-ci serait adoptée «dans les six mois».

«Nous devons continuer les réformes. Arrêter maintenant serait ruiner les efforts accomplis. Vous m'avez fait confiance pour moderniser la France, je tiendrai mes engagements», a martelé le président, s'adressant surtout à son électorat traditionnel, notamment rural, qui s'est largement abstenu ou a basculé à l'extrême droite.

Les critiques contre le style et la politique du chef de d'État ont été fortement relayées par les élus de la majorité ces derniers jours. Certains ont même évoqué ouvertement leur préférence pour le premier ministre François Fillon, plus populaire, en vue de la présidentielle de 2012.

Mercredi, le président a assuré avoir «entendu le message».

Soulignant son opposition à «toute augmentation d'impôt», M. Sarkozy ainsi confirmé le report de la taxe carbone, une mesure impopulaire particulièrement critiquée à droite, qui devait s'appliquer au 1er juillet et visait à la réduction des émissions de CO2.

«Je subordonne la création d'une taxe carbone intérieure à une taxe aux frontières de l'Europe qui protègera notre agriculture et nos industries contre la concurrence déloyale», a-t-il déclaré.

Ce recul équivaud à un abandon car cette taxe aux frontières est loin de faire l'unanimité au sein de l'UE. Il a «désespéré» la ministre de l'Ecologie Chantal Jouanno et été brocardé par la presse française, qui n'a pas manqué de rappeler que Nicolas Sarkozy avait comparé cette «grande réforme» à la décolonisation ou l'abolition de la peine de mort.

À l'adresse de son électorat rural, Nicolas Sarkozy s'est dit prêt à «une crise en Europe» pour défendre la politique agricole commune, dont la France est la première bénéficiaire. Le principal syndicat agricole s'est d'ailleurs immédiatement réjoui que Nicolas Sarkozy «entende enfin la détresse des paysans».

Aux médecins, autre clientèle traditionnelle de droite, il a promis une «grande concertation» sur leurs revendications de hausse des tarifs.

Le président a aussi repris des thèmes classiques de la droite, réaffirmant la «sécurité» comme «une priorité» et promettant «une réaction ferme» à «la montée de la violence dans les stades, les transports, dans les établissements scolaires».

Enfin il a confirmé que le gouvernement déposerait un projet de loi d'interdiction sur le port du voile islamique intégral, «contraire à la dignité de la femme».

Le Parti socialiste, qui réclamait un changement de cap radical après le camouflet électoral, a déploré un coup de «barre à droite toute».

«Le pays est en crise et le président de la République ne se préoccupe que de la crise à l'UMP», a regretté son porte-parole, Benoit Hamon.