Les conservateurs britanniques, confinés à l'opposition depuis l'arrivée triomphale des travaillistes en 1997, ont tenu leur congrès cette semaine. Leur chef, David Cameron, n'a pas fait dans la dentelle: pour sortir la Grande-Bretagne de la crise, il faudra sabrer les dépenses publiques. Sa franchise ne semble pas encore faire peur aux électeurs. L'été prochain, il pourrait bien être le prochain premier ministre du Royaume-Uni.

Les Britanniques n'aiment pas les conservateurs. En tout cas, ils ne les aiment pas comme ils se sont passionnément épris des travaillistes en 1997. Pour gagner le coeur - mais surtout le vote - des électeurs, les conservateurs doivent leur prouver qu'ils ont changé.

 

C'est ce qu'on disait tout haut cette semaine à Manchester, au congrès annuel de la vénérable formation politique. Las des travaillistes, au pouvoir depuis 12 ans, les électeurs britanniques semblent séduits par l'idée que le Parti conservateur revienne au pouvoir l'an prochain. Et s'il faut en croire les sondages publiés cette semaine, les tories et leur chef charismatique, David Cameron, voguent allègrement vers la victoire, avec 14 points d'avance sur le Labour.

Mais attention, prévient l'auteure Judith Bara, qui enseigne à l'Université de Londres. «Rien n'est encore joué», dit cette observatrice de la scène politique britannique, que La Presse a jointe hier. Pour gagner la majorité des sièges, «ils devront travailler plus fort pour que les gens votent davantage en faveur des conservateurs plutôt que contre les travaillistes».

Depuis son élection comme chef en 2005, David Cameron s'est appliqué à dépoussiérer l'image de «vieux parti» qui colle aux conservateurs.

Le bon père de famille

Ancien cadre du groupe média Carlton, David Cameron, 42 ans, se présente comme un bon père de famille, adepte du vélo, préoccupé par la santé et l'écologie, prêt à soutenir les couples homosexuels. Il diffuse des photos de ses vacances avec femme et enfants, et la mort en février dernier de l'un de ses enfants gravement malade a ému l'opinion publique.

Mais les Britanniques restent méfiants. De fait, un autre sondage a montré que 68% d'entre eux croient que le Parti conservateur n'a pas changé depuis l'arrivée de David Cameron. Son entourage est aussi perçu comme composé de «vieux tories» faisant partie d'un club sélect issu des collèges huppés du pays. «Une majorité de gens doute toujours que Cameron puisse comprendre ce que vit la classe moyenne», dit Mme Bara.

Cette semaine, le chef conservateur a lancé un message clair: il est «prêt» à piloter le pays mais avertit que la Grande-Bretagne traversera «une période difficile». Coupes dans les dépenses de l'État, hausse de l'âge d'admissibilité à la pension de vieillesse et gel des salaires des fonctionnaires sont à prévoir.

Les récents sondages indiquent que l'appui aux conservateurs, malgré les intentions radicales du chef, n'aurait pas faibli. «Mais les gens commencent à se dire: nous en avons assez des travaillistes, mais sommes-nous prêts à ça?» dit Mme Bara.

David Cameron doit aussi surveiller sa droite: en flirtant avec le centre, il risque de perdre des votes au profit de partis résolument à droite qui ont constamment gagné en popularité ces dernières années.

Les élections ne devraient pas avoir lieu avant juin. D'ici là, dit Judith Bara, tout peut arriver. «Harold Wilson (NDLR: ancien premier ministre travailliste) a déjà dit qu'une semaine, en politique, c'est une longue période...»

 

Les conservateurs au pouvoir

John Major est le dernier chef conservateur à avoir exercé le pouvoir, de 1990 à 1997.

> Entre 1997 et 2005, trois chefs ont tenté sans succès de faire réélire le parti.

> Arrivé en 2005, David Cameron mise sur un Parti conservateur «moderne et compatissant» pour gagner les élections de 2010.