Onze ans après l'attentat d'Omagh (Irlande du Nord), qui avait fait 29 morts en 1998, des familles de victimes ont obtenu de haute lutte lundi que quatre hommes proches de l'IRA-véritable soient jugés civilement responsables et condamnés à verser d'importantes compensations.

Les représentants de victimes de l'attentat le plus meurtrier commis en Irlande du Nord, frustrés qu'aucun responsable n'ait jamais été déclaré coupable devant une cour pénale, avaient décidé de porter leur combat devant la justice civile.

Après de nombreuses déconvenues, ils avaient déposé une nouvelle plainte au civil en avril 2008 devant la Haute cour de Belfast. Ils réclamaient un total de 14 millions de livres (25 millions $) de dédommagements à cinq hommes qu'elles estiment être à l'origine de l'attentat. Celui-ci avait été revendiqué par l'IRA-Véritable, un groupuscule dissident de l'IRA hostile au partage du pouvoir entre protestants et catholiques dans cette province britannique.

Six familles poursuivaient l'ex-leader de ce groupuscule, Michael McKevitt, ainsi que Colm Murphy, Liam Campbell, Seamus McKenna et Seamus Daly. Tous sont membres présumés de ce mouvement qui voulait faire dérailler les accords de paix historiques du «Vendredi Saint» signés quelques mois avant l'attentat entre dirigeants protestants et catholiques à Belfast.

Quatre des cinq hommes -McKevitt, Campbell, Murphy et Daly- ont été jugés responsables de l'attentat d'Omagh lundi, selon le verdict de la Haute cour.

Le juge Declan Morgan a accordé des indemnités de 1,6 million de livres (2,75 million $) à 12 proches de victimes à l'origine de la plainte.

Il a reconnu au passage que McKevitt avait joué un rôle-clé pour procurer des explosifs au groupuscule.

L'un des porte-parole des familles et proches des victimes, Michael Gallagher, dont le fils Aidan a été tué dans cet attentat à la voiture-piégée, a salué le couronnement de plus de huit années de procédures complexes entamées fin 2000 pour obtenir réparation.

«Ce résultat va au-delà de ce qu'on aurait pu imaginer», s'est-il félicité. «Nous avons envoyé un message important aux terroristes et à leurs victimes dans le monde entier: vous avez désormais un moyen de poursuivre ceux qui ont assassiné vos êtres chers».

«C'est une immense victoire morale pour les familles», a-t-il ajouté.

Les quatre hommes jugés civilement responsables habitant tous en Irlande, les familles vont devoir se tourner vers la Haute cour de Dublin pour faire appliquer le jugement de Belfast, en vertu d'accords entre les deux pays.

À ce jour, aucune condamnation pénale n'a été prononcée pour cet attentat, le plus meurtrier en 30 ans de «Troubles» entre catholiques et protestants.

En décembre 2007, Sean Hoey, 38 ans, un électricien accusé du «meurtre» des 29 victimes de l'attentat d'Omagh avait été acquitté, au désespoir des familles.

Le juge avait estimé que les éléments à charge apportés par l'accusation, notamment des prélèvements d'ADN faisant appel à une technologie récente, n'étaient pas suffisamment probants. Il avait également sévèrement critiqué le travail de la police au cours de l'enquête.