L'opposition moldave a dénoncé jeudi les interpellations en série de jeunes manifestants, après les émeutes de mardi, alors que les jeunes s'apprêtent de nouveau à descendre dans la rue vendredi pour protester contre le pouvoir communiste.

La police, qui avait fait état mercredi de quelque 200 interpellations, a poursuivi les interrogatoires de jeunes suspectés d'avoir participé à la manifestation qui a dégénéré mardi en sac du Parlement.

Deux jeunes de 17 ans qui avaient parlé à une journaliste de l'AFP ont ainsi été conduits au commissariat et interrogés sur la teneur de cette interview. L'un a été relâché rapidement, tandis que la famille de l'autre était toujours sans nouvelles dans la soirée.

«Vassilie avait les yeux bandés pour qu'il ne sache pas où on l'amène. On ne l'a pas laissé appeler. Ils cherchent à leur faire peur avant la manif de demain», a expliqué le père de l'un d'eux, Vitalie Nagacevski, avocat pour les droits de l'Homme et membre du Parti libéral-démocratique (opposition).

«Ce sont des violations des droits de l'Homme élémentaires (...) J'ai vu au commissariat une dizaine de mères et pères qui cherchaient à savoir où étaient leurs enfants», a-t-il ajouté, estimant que le nombre d'interpellations était supérieur à 200.

Le Mouvement pour l'action populaire a dénoncé de son côté le placement en détention de son chef, Sergiu Mocanu, un ancien conseiller présidentiel passé à l'opposition pour «tentative d'usurpation du pouvoir» et «organisation de désordres de masse».

«Le pouvoir avait besoin d'un coupable et un ex-conseiller du président passé à l'opposition est parfait pour ce rôle», a affirmé l'avocat de l'opposant, Ion Dron.

A Chisinau, la situation était calme jeudi, après trois jours de manifestations. Mais les mouvements de jeunes anticommunistes ont appelé par SMS et via internet à un nouveau rassemblement vendredi.

Les autorités moldaves ont aussi réclamé à Kiev l'extradition de l'oligarque Gabriel Stati, l'homme d'affaires le plus riche de Moldavie, accusé d'avoir financé les actions de protestation et interpellé à l'aéroport d'Odessa (sud de l'Ukraine).

A Bucarest, le chef de la diplomatie roumaine Cristian Diaconescu a dénoncé les «mesures abusives et discriminatoires» visant les ressortissants roumains en Moldavie et fustigé l'«opération systématique d'identification des personnes ayant participé aux manifestations».

La Moldavie, qui accuse la Roumanie d'être derrière les manifestations, a ordonné mercredi le départ de l'ambassadeur roumain et introduit un régime de visa avec ce pays, dont elle a longtemps fait partie avant de rejoindre l'URSS puis de proclamer son indépendance en 1991.

Face à l'escalade diplomatique, l'Union européenne a appelé Chisinau à «rétablir des relations normales» avec la Roumanie, tandis que Moscou prenait la défense de l'ex-république soviétique.

Le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a ainsi demandé à l'UE et Bucarest «d'agir» pour que «des slogans roumains ne soient pas utilisés comme couverture pour saper la souveraineté de la Moldavie».

L'opposition moldave a, elle, accusé les communistes d'avoir fomenté les troubles pour mieux stigmatiser leurs détracteurs et appelé l'UE à enquêter sur ces évènements.

«Nous appelons l'Union européenne, le Conseil de l'Europe et l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe à créer une commission d'évaluation et d'enquête», a déclaré Vlad Filat, qui dirige le Parti libéral-démocrate.

Par ailleurs, l'opposition a entrepris de vérifier les listes électorales, accusant le pouvoir de falsifications lors des législatives de dimanche qui ont conduit à une victoire écrasante des communistes avec 50% des voix.