Les femmes sans-abri de Belgique peuvent désormais tenter de s'extirper de la misère en participant à un singulier et controversé concours, «Miss SDF», qui garantit à la gagnante une année gratuite de logement. «Les candidates doivent avoir le souhait explicite d'abandonner la vie de la rue et de s'engager, avec un encadrement, à développer une vie sociale», explique dans un français approximatif, le site www.misssdfbelge.be, qui a été lancé par Mathilde Pelsers. Cette ressortissante belge, qui chapeaute plusieurs refuges pour personnes sans domicile fixe (SDF) de la région bruxelloise, affirme avoir eu l'idée après avoir incité sa propre fille, Aline, à participer à un concours de beauté. «À l'époque, Aline était sur un, comment dire... un mauvais chemin. À son insu, je l'ai inscrite à Miss Belgique et elle a fini première dauphine de Miss Flandre... Elle s'en est vraiment sortie grâce à ça, alors je me suis dit que j'allais organiser un concours pour les filles de la rue», a-t-elle expliqué au quotidien belge Le Soir. Le but officiel de l'initiative, selon l'organisatrice, n'est pas de récompenser la beauté, mais plutôt de saluer la candidate «la plus méritante, la plus courageuse, animée de la volonté de s'en sortir «. Une première présélection a été faite en février, parmi une série de candidates sollicitées dans la rue afin de désigner une dizaine de «finalistes» qui sont prises en charge jusqu'à la sélection définitive prévue l'automne prochain.

 

Indignation

Ces femmes ont défilé et témoigné lors d'un événement d'art contemporain le week-end dernier qui a suscité des cris indignés. Selon le quotidien français Libération, qui était présent, une femme a déploré de voir les articipantes au concours «transformées en guignols parodiant leur propre vie», jugeant que la scène était d'un «pathétique absolu «. Bien que les organisatrices de Miss SDF ne jurent que par leur bonne foi et se disent convaincues qu'il s'agit d'une manière originale de sensibiliser élus et citoyens à la réalité des sans-abri, le message passe mal. Le gouvernement belge, par l'entremise de la secrétaire d'État à la lutte contre la pauvreté, a décrié l'initiative comme une «Star Ac de la misère «, en référence à la populaire émission de téléréalité. Il y a quelques jours, un citoyen belge soulignait dans une lettre ouverte qu'il était «submergé « de honte à l'idée que des femmes soient ainsi amenées à «exhiber leur misère devant de misérables voyeurs». Même levée de boucliers du côté français, où les critiques ne tarissent pas. L'Humanité souligne ainsi que le concours constitue «une belle façon de se donner bonne conscience sur le dos de la misère du monde sans régler le problème des sans-abri». « À quand le concours de Mister Clochard le plus avenant? Et pourquoi pas un concours du plus affamé qui aurait droit à un an de sacs de riz?» demande le quotidien de gauche. Ironiquement, le son de cloche le plus positif semble émaner des finalistes elles-mêmes, qui se disent touchées par l'attention et les soins qui leur sont prodigués. «Le concours, c'est pour sensibiliser les gens, c'est pas un concours de beauté... C'est surtout pour montrer que les femmes de la rue peuvent s'en sortir, qu'on a notre dignité», a déclaré l'une d'elles à la télévision. La grande gagnante sera couronnée l'automne prochain.