L'Irlande du Nord était secouée par l'attentat qui a coûté la vie à deux soldats britanniques samedi, une première depuis plus de 10 ans.
True IRA (« l'IRA-véritable »), faction dissidente de l'Armée républicaine irlandaise (IRA), a revendiqué l'attaque, qui ravive la crainte que le processus de paix, encore fragile, ne soit déstabilisé. Unanime, la classe politique a condamné l'assaut.
Le premier ministre britannique, Gordon Brown, a dénoncé un acte qu'il a qualifié de «lâche» et promis qu'«aucun meurtrier ne pourra faire dérailler» un processus de paix qui a le soutien des gens en Irlande du Nord. «Je peux vous assurer que nous traduirons ces personnes en justice», a-t-il affirmé.
Hier, un homme a appelé l'hebdomadaire irlandais The Sunday Tribune pour revendiquer l'attentat au nom de la brigade South Antrim de l'IRA-véritable en usant du mot de code destiné à authentifier ce type de message.
L'IRA-véritable est née en octobre 1997 d'une scission avec l'IRA, principale milice catholique d'Irlande du Nord, qui a renoncé à la violence et démantelé son arsenal en 2005.
Elle est le plus important des groupes républicains dissidents qui, depuis avant-hier, étaient montrés du doigt. Opposée aux accords du Vendredi saint, qui ont enclenché le processus de paix dans la province le 10 avril 1998, elle s'est fait connaître le 15 août 1998 en commettant l'attentat d'Omagh, le plus sanglant en 30 ans de conflit, avec 29 morts.
Samedi, vers 21 h 40, des hommes lourdement armés ont attaqué le quartier général d'un régiment du génie à Massereene, dans le comté d'Antrim, à environ 25 km au nord-ouest de Belfast.
Les assaillants, au nombre de trois - deux tireurs et un complice au volant d'une voiture, selon la police - , ont apparemment suivi deux livreurs de pizzas et ouvert le feu à l'arme automatique sur des soldats et des employés civils de l'armée britannique venus au portail récupérer les pizzas. Selon la police, ils ont continué à tirer sur leurs victimes après qu'elles furent tombées.
Le ministère britannique de la Défense a confirmé la mort de deux soldats.
La police nord-irlandaise (PSNI) a précisé que quatre autres personnes - deux militaires et deux livreurs - avaient été blessées. L'une d'entre elles était dans un état critique.
Les deux soldats tués étaient âgés d'une vingtaine d'années et devaient être envoyés hier en Afghanistan.
Craintes
Alors qu'une recrudescence des violences dues aux républicains dissidents a été observée au cours derniers mois dans la province, cette attaque suscite des craintes pour la stabilité du gouvernement régional, au sein duquel cohabitent protestants et catholiques depuis le 8 mai 2007.
Le premier ministre nord-irlandais Peter Robinson, chef du Parti unioniste démocrate (DUP, protestant), a condamné un «acte vain» commis par des gens «qui n'ont aucun soutien public et aucune perspective de réussir dans leur campagne». «Cela ne réussira pas», a-t-il estimé.
Gerry Adams, leader du parti catholique Sinn Féin - aile politique de l'IRA -, qui cohabite avec le DUP dans le gouvernement régional, a dénoncé une «attaque contre le processus de paix», «injustifiée et contre-productive». «Leur intention est de faire revenir les soldats britanniques dans les rues», a-t-il soutenu.
Il y a encore plus de 4000 soldats britanniques en Irlande du Nord, déployés dans 10 bases. Depuis juin 2007, ils n'interviennent cependant plus dans la sécurité de la province et sont rarement vus en uniforme en public.
Depuis les accords du Vendredi saint qui ont mis un terme à 30 années de violences ayant causé depuis 1969 la mort d'environ 3500 personnes -, la province a connu des soubresauts sporadiques.
La veille de l'attaque, le chef de la PSNI, Hugh Orde, a confirmé l'arrivée dans la province d'une nouvelle unité de l'armée spécialisée dans la surveillance électronique pour aider à la surveillance des dissidents de l'IRA. La police soutient que les menaces étaient croissantes. Les dirigeants catholiques avaient dénoncé ce déploiement, contraire selon eux au désengagement de l'armée en Irlande du Nord.