La Belgique semblait lundi sur le point de se doter d'un nouveau gouvernement mais d'une durée incertaine en raison de la persistance du conflit entre Flamands et francophones et de la proximité d'élections régionales très sensibles.

Le chrétien-démocrate flamand (CDV) Herman Van Rompuy, chargé dimanche par le roi Albert II de former un gouvernement, dix jours après la démission d'Yves Leterme, a entamé lundi des consultations avec les partis de la coalition gouvernementale (chrétiens-démocrates et libéraux côté flamand, chrétiens-démocrates, libéraux et socialistes côté francophone).En principe, les négociations devraient être rapides, les cinq formations s'étant mis d'accord la semaine dernière pour reconduire le gouvernement à l'identique. A l'exception du Premier ministre et du ministre de la Justice Jo Vandeurzen qui ont démissionné le 19 décembre, accusés d'avoir fait pression sur la justice pour qu'elle valide le plan de sauvetage de la banque Fortis.

La presse espérait d'ailleurs lundi un nouveau gouvernement d'ici au 31 décembre.

Mais «il reste encore quelques aspects à négocier», a souligné le politologue Jean Faniel.

M. Van Rompuy, qui n'est pas encore assuré à 100% d'être Premier ministre, devra notamment se trouver un remplaçant à la présidence de la Chambre des députés, a-t-il noté.

Une tâche plus difficile qu'il n'y paraît dans un pays où la moindre modification de la répartition des postes au niveau fédéral peut entraîner le bouleversement d'un fragile équilibre.

S'il parvient à former ce gouvernement, M. Van Rompuy, qui a accepté sa mission à contre-coeur, devra ensuite relever de nombreux défis: adoption d'un budget 2009 toujours en attente, mise en place d'un plan de relance pour sortir de la crise économique, solution durable pour Fortis et tensions exacerbées entre communautés à l'approche des régionales de juin.

«Sera-t-il à la hauteur?», s'interrogeait lundi le quotidien francophone La Libre Belgique.

Si les partis de la majorité assurent que oui, les différentes formations nationalistes flamandes ont, elles, vertement dénoncé cette nomination.

Placer Herman Van Rompuy à la tête du gouvernement revient à «couler du plomb sur du fer rouillé», a ainsi estimé Jean-Marie Dedecker, président du mouvement populiste et radical du même nom, en forte progression dans les sondages.

«La seule chose qui soude ce gouvernement de centre-gauche, c'est l'angoisse de se retrouver face à l'électeur», a-t-il ajouté, dénonçant un pays devenu «ingérable sans réforme de l'Etat».

Partis néerlandophones de Flandre et francophones de Bruxelles et de Wallonie s'opposent depuis un an et demi à propos des demandes d'autonomie accrue des premiers. Le conflit a relancé les craintes d'éclatement du royaume.

«La campagne électorale devrait être axée sur les questions d'avenir du pays. Si les enchères montent à nouveau pendant cette campagne, cela ne va pas favoriser le dialogue au niveau fédéral», a noté Jean Faniel.

Et M. Van Rompuy ne serait alors «pas mieux armé» qu'Yves Leterme, confronté depuis les législatives de juin 2007 à une crise quasi-ininterrompue en raison des querelles entre communautés.

Les cinq partis de la majorité se sont pourtant mis d'accord pour écarter le scénario un temps envisagé d'un gouvernement provisoire jusqu'à des législatives anticipées couplées au scrutin régional de juin.

Mais rien ne garantit pour autant qu'un gouvernement Van Rompuy durera jusqu'à la prochaine échéance prévue de 2011.

«Ce n'est qu'un engagement. Mais qu'est-ce qui se passera d'ici là?» s'interroge Jean Faniel, alors que depuis juin 2007, le royaume n'a connu que neuf mois de gouvernement stable.