Après près d'un demi-siècle de domination sans partage sur la pittoresque et prospère Bavière, les conservateurs de la CSU devraient perdre dimanche la majorité absolue dans cet Etat du sud de l'Allemagne, et gêner la réélection de la chancelière Angela Merkel à l'automne 2009.

Cas unique dans une démocratie occidentale, les chrétiens-sociaux (CSU), alliés bavarois des chrétiens-démocrates (CDU) de Mme Merkel, dominent les élections bavaroises depuis 1962, avec une pointe à 60,7% lors du dernier scrutin, en 2003.Les seize Etats allemands jouissent d'une belle autonomie, mais l'«Etat libre de Bavière» revendique une histoire singulière remontant au VIe siècle. De la taille de l'Irlande mais avec un PIB double, un taux de chômage de 4% contre 7,6% pour l'ensemble de l'Allemagne, il héberge un tiers des entreprises du Dax, le principal index boursier allemand.

Environ un million de ses 12,5 millions d'habitants sont étrangers.

Mais le «land» des brasseries et des culottes de peau, du Bayern Münich et de BMW change: des sondages concordants placent la CSU sous la barre symbolique des 50%, ce qui ne manqueraient pas de créer des problèmes à la chancelière à un an des élections législatives.

«Pour réussir, la Bavière a besoin d'une CSU forte», a lancé Mme Merkel dans un entretien au quotidien de la capitale bavaroise Münchner Merkur. «Et la CDU a besoin d'une CSU forte».

«Il est important, pour la vie politique de toute l'Allemagne, que la Bavière maintienne un profil singulier», a assuré quant à lui le ministre-président sortant, Günter Beckstein. «C'est la raison pour laquelle ce scrutin a une grande importance au niveau fédéral».

De fait, «une chute de la CSU changerait les rapports de force au niveau fédéral», avant les élections présidentielle et législative de 2009, analysait pour l'AFP Manuela Glaab, politologue à l'Université de Münich.

«Pour défendre les intérêts de la Bavière à Berlin, une CSU affaiblie risque de vouloir compenser et de se montrer plus agressive», selon elle. On peut prédire «des remous au sein de la coalition».

Selon les sondages, une baisse de la CSU ne profiterait qu'à peine à l'opposition sociale-démocrate (SPD), qui a ferraillé avec les conservateurs pour savoir qui incarnait le mieux «l'âme bavaroise».

En revanche, les Verts, les Libéraux du FDP et les «sans étiquette», généralement des transfuges de la CSU écoeurés par les bagarres à la tête du parti, devraient progresser sensiblement, selon des sondages concordants.

Le scrutin de dimanche devrait avoir des conséquences sur la vie politique nationale, mais la plupart des analystes doutent qu'il révèle les intentions de l'électorat en 2009.

«C'est une élection déterminante pour l'avenir», a assuré M. Beckstein lors d'une interview télévisée. «Il s'agit de la première élection depuis que (Frank-Walter) Steinmeier est candidat à la chancellerie», a-t-il ajouté.

Le ministre des Affaires étrangères a annoncé début septembre qu'il serait le candidat du SPD pour affronter Angela Merkel l'an prochain.

La plupart des analystes rendent néanmoins la CSU, et pas l'opposition, responsable de ses déboires annoncés.

La Bavière s'est dotée de la loi anti-fumeurs la plus restrictive du pays, un projet de train à sustentation magnétique a tourné au fiasco, et les questions environnementales ont été ignorées alors qu'elles préoccupent l'électorat.

M. Beckstein, comme le président de la CSU Erwin Huber, «ne sont pas les visages charismatiques dont on a besoin en ces temps de démocratie cathodique», admettait Heinrich Oberreuter, un politologue proche de la CSU.