(Los Angeles) Donald Trump a été propriétaire de casinos, marié trois fois et condamné au civil pour agression sexuelle, mais reste depuis des années un modèle improbable pour les chrétiens évangéliques, un électorat clé aux États-Unis.

Ces fervents croyants sont nombreux à voir chez l’ancien président, qui leur a offert une victoire de taille dans leur combat contre l’avortement, la meilleure option pour l’élection de novembre.

Certains sont même convaincus qu’il a été désigné par Dieu pour empêcher les États-Unis de sombrer dans la damnation.

En s’adressant jeudi à un groupe de radios religieuses, le républicain s’est employé à courtiser cette communauté, qui représente plus d’un quart de l’électorat américain.  

« Je me présente devant vous en tant qu’ami, allié et coreligionnaire pour vous demander votre aide, votre soutien et vos prières pour ce pays », a-t-il déclaré lors d’une réunion du groupe National Religious Broadcasters.  

« Au cours de mon premier mandat, je me suis battu pour les chrétiens plus que n’importe quel président ne l’a jamais fait auparavant », et « je me battrai encore plus fort pour les chrétiens » en cas de retour à la Maison-Blanche, a-t-il promis.  

« La gauche essaie de faire honte aux chrétiens, elle essaie de nous faire honte. Nous », a-t-il ajouté, en marquant une pause. « Je suis très fier d’être chrétien ».  

« Barbares »

Lorsque Donald Trump s’est lancé la première fois en 2015 dans la course à la Maison-Blanche, le républicain, au goût revendiqué de la transgression et de la provocation, ne semblait pourtant pas avoir grand-chose à offrir à la droite religieuse du pays.

Mais l’ancienne vedette de téléréalité s’est assuré leur soutien, via notamment la nomination de juges antiavortement à la Cour suprême. Et en choisissant comme vice-président Mike Pence, un ancien animateur de radio, ultra conservateur et fervent chrétien.

Lorsque les Américains se sont rendus aux urnes en novembre 2016, 77 % des évangéliques blancs ont voté pour Donald Trump face à Hillary Clinton, selon l’institut Pew Research. Un soutien qui est passé à 84 % lors de l’élection de 2020.

Mais avec la fin de la garantie constitutionnelle du droit à l’avortement décidée en 2022 par une Cour suprême où Donald Trump a nommé trois juges conservateurs, qu’espère encore cet électorat d’un homme pas connu pour passer ses dimanches matin à l’église ?

Selon le journaliste Tim Alberta, la droite évangélique craint d’être en situation de péril mortel au sein d’un pays qui est aujourd’hui beaucoup moins à son image.

« Si vous considérez le fait que les guerres culturelles ont basculé si brutalement en leur défaveur et que le pays est en train de changer de manière si spectaculaire en si peu de temps, vous commencez à comprendre pourquoi il y a cette peur, cette anxiété », a-t-il mis en avant lors de la promotion de son livre The Kingdom, the Power, and the Glory (Le Royaume, la Puissance et la Gloire), qui traite du soutien de la droite évangélique à Donald Trump.

« Si vous croyez que les barbares sont à nos portes, alors vous vous dites : “ Peut-être avons-nous besoin d’un barbare pour nous protéger ” », résume-t-il.

Nationalisme chrétien

Pour cette communauté — 14,5 % de la population mais 28 % des électeurs — le fait que le magnat de l’immobilier ne soit pas religieux n’a pas d’importance. Ils ont le sentiment qu’il est de leur côté.

« Les gens ont l’impression qu’il les comprend. Même si certains aspects de sa vie ne correspondent pas à leur mode de vie ou à leur moralité », a déclaré à USA Today Troy Miller, patron de la National Religious Broadcasters.  

Pour un observateur extérieur, il peut paraître étonnant que le non-religieux Donald Trump soit de loin préféré à des chrétiens pratiquants — Joe Biden est ainsi un fervent catholique mais, selon Pew Research, il n’attire que 14 % de soutien parmi les évangéliques blancs.

Même ceux qui appartiennent à la mouvance évangélique du côté républicain sont perdants dans les face-à-face avec le milliardaire : le gouverneur de Floride, Ron DeSantis, et le sénateur de Caroline du Sud Tim Scott ont tous deux échoué dans le processus des primaires du parti et se rangent désormais derrière l’ex-président.

Pour Tim Alberta, ce soutien trouve ses racines dans un nationalisme chrétien qui a mélangé les notions bibliques de paradis avec l’idée même des États-Unis.

« Il y a des millions de personnes dans ce pays qui croient vraiment, au plus profond de leur chair, que les États-Unis […] entretiennent une relation spéciale avec Dieu », a-t-il déclaré. « Par conséquent, se battre pour les États-Unis, c’est se battre pour Dieu ».

« Et ce type, Donald Trump, qui ne partage aucune de vos valeurs… est prêt à partir en guerre pour vous », résume le journaliste.