Des voix brisées, des larmes, de la colère aussi: face aux témoignages des rescapés de la fusillade de Floride, Donald Trump a promis mercredi des mesures «fortes», évoquant notamment la possibilité d'autoriser le port d'armes pour certains enseignants.

Cette idée extrêmement controversée a été vivement critiquée mercredi soir lors d'un débat organisé près de Miami par la chaîne CNN, dans une salle rassemblant des milliers de personnes.

«Vais-je devoir être formée comme une policière en plus d'éduquer ces enfants ?» a demandé Ashley Kurth, une enseignante du lycée de Parkland où 17 personnes ont perdu la vie. «Vais-je devoir porter un gilet en kevlar ?».

«Je ne pense pas que les enseignants doivent être armés. Je pense qu'ils doivent enseigner», a de son côté réagi le shérif Scott Israel, qui est intervenu sur le lieu du carnage perpétré il y a une semaine par un jeune homme de 19 ans qui avait acheté légalement son fusil semi-automatique.

Quelques heures auparavant, le président américain s'était posé en homme à l'écoute de toutes les suggestions. Mais celui qui a promis aux membres de la National Rifle Association (NRA), le puissant lobby des armes, qu'ils avaient «un vrai ami à la Maison-Blanche», joue une partition délicate.

Tour à tour, des étudiants de différentes écoles endeuillées par les armes et des parents de victimes, assis en cercle autour de lui dans un vaste salon de la Maison-Blanche, ont raconté leur détresse.

À cette occasion, M. Trump a été photographié tenant une feuille de papier avec des notes suggérant des questions ou d'autres déclarations à faire à ses interlocuteurs: «Que voudriez-vous que je sache sur votre expérience?», «Je vous comprends»... Les réseaux sociaux se sont rapidement enflammés pour critiquer l'apparent besoin du président d'être aidé pour exprimer de la compassion à des gens qui souffrent.

Le président a avancé des propositions, très variées. La plus polémique d'entre toutes? Armer une partie du corps enseignant.

Les professeurs concernés porteraient leur arme de façon dissimulée et suivraient une formation spéciale préalable, a-t-il précisé le président.

«Évidemment, cela s'appliquerait uniquement aux enseignants sachant manier une arme», a-t-il concédé, en suggérant d'armer 20% des effectifs des équipes pédagogiques.

«Il faut du bon sens»

Le locataire de la Maison-Blanche a critiqué le concept de lieux sanctuaires où aucune arme n'est tolérée, en estimant que de tels sites jouaient un rôle d'aimant pour les «fous», qu'il a assimilés à des «lâches» qui privilégieraient les cibles faciles.

M. Trump a par ailleurs promis de prendre des mesures «fortes» sur les vérifications des antécédents judiciaires et psychiatriques des acheteurs d'armes.

Il a aussi promis, sans autres précisions, la «fermeté» sur l'âge légal pour acheter une arme à feu.

De nombreuses personnes ont relevé que Nikolas Cruz, le tueur de Floride, avait pu acquérir à 18 ans un fusil semi-automatique, alors qu'il faut avoir au moins 21 ans pour acheter de l'alcool.

La NRA a immédiatement fait savoir son opposition à tout relèvement de l'âge légal pour acheter une arme, en estimant que cela reviendrait à «faire payer à des citoyens respectueux de la loi les actes malfaisants de criminels».

«S'il vous plaît M. Trump, il faut du bon sens», avait plaidé peu avant le père d'une victime, appelant à imposer sans tarder cette limite des 21 ans.

Quelques heures plus tôt, des jeunes de Parkland avaient investi la petite capitale de la Floride, Tallahassee, pour tenter d'arracher un durcissement de la législation sur les armes aux élus de Floride au son de «Plus jamais ça», mot d'ordre répercuté sur les réseaux sociaux.

AFP

Le témoignage d'Andrew Pollack a plongé la salle dans un silence total.

Rassemblement le 24 mars

Lors du débat organisé par CNN, le sénateur républicain Marco Rubio a soulevé un vent de fronde dans le public en refusant d'envisager une interdiction des fusils d'assaut. Mais, signe d'une inflexion, il a dit revoir sa position sur les chargeurs à grande capacité de munitions.

Dana Loesch, la porte-parole très médiatique de la NRA, a elle été copieusement sifflée, esquivant les questions pour se concentrer sur la santé mentale de M. Cruz. «Je ne crois pas que ce monstre dément aurait jamais dû se procurer une arme à feu», a-t-elle martelé.

Les lycéens de Stoneman Douglas prévoient un grand rassemblement le 24 mars à Washington.

L'ex-Première dame des États-Unis, Michelle Obama, s'est pour sa part dite «pleine d'admiration pour les élèves extraordinaires de Floride». «La lutte contre les armes individuelles exige un courage et une endurance inexorables», a-t-elle averti.

REUTERS

Des manifestants ont demandé un resserrement des lois sur les armes à feu devant le Capitole de l'État de la Floride, mercredi, à Tallahassee.