Les États-Unis ont désespérément besoin de résultats concrets sur le désarmement nucléaire de la Corée du Nord : c'est tout l'objectif du chef de la diplomatie américaine, qui retourne dimanche à Pyongyang dans l'espoir d'esquisser un accord historique malgré la fermeté affichée par le régime totalitaire.

Lors de cette quatrième visite en Corée du Nord, Mike Pompeo, qui rencontrera Kim Jong-un, est également chargé de préparer un nouveau tête-à-tête entre Donald Trump et le dirigeant nord-coréen après celui de juin à Singapour.

« J'ai bon espoir que nous puissions revenir avec une meilleure entente, des progrès plus importants, et un plan pour avancer non seulement vers le sommet entre nos deux dirigeants, mais aussi pour poursuivre les efforts visant à bâtir un chemin vers la dénucléarisation », a déclaré M. Pompeo cette semaine avant de s'envoler pour la région, avec des étapes également prévues à Tokyo samedi, à Séoul dimanche et à Pékin lundi.

Les formulations diplomatiques du secrétaire d'État sont aussi prudentes que celles de son président, « tombé amoureux » de l'homme fort de Pyongyang après avoir annoncé un peu vite la fin de la menace atomique nord-coréenne, sont excessives.

Mais pour Mike Pompeo, l'enjeu est de taille : début juillet, son précédent voyage avait été un échec, et un autre déplacement avait dû être annulé, fin août, face à l'impasse dans les négociations.

Depuis, Kim Jong-un a promis le démantèlement d'un site balistique en présence d'inspecteurs étrangers, et, surtout, la fermeture de son complexe nucléaire de Yongbyon, à condition toutefois que Washington prenne des « mesures correspondantes ».  

Ces premiers gestes concrets - ainsi que des lettres jugées « magnifiques » et « extraordinaires » par le milliardaire républicain - ont permis de renouer le dialogue.

Donnant-donnant

Suffisamment pour transformer les engagements vagues du dirigeant nord-coréen en un accord détaillé sur la « dénucléarisation définitive et entièrement vérifiée » que Washington appelle de ses voeux ?

Mike Pompeo, négociateur en chef des États-Unis, refuse de commenter les différentes options sur la table et assure que les discussions avancent en coulisses.

Mais les grands traits d'un échange donnant-donnant commencent à se dessiner.

La Corée du Sud, en première ligne depuis le début du réchauffement spectaculaire qui a permis de tourner la page d'une année 2017 rythmée par les échanges d'invectives et les menaces atomiques, a publiquement présenté sa proposition.

Pour la ministre sud-coréenne des Affaires étrangères Kang Kyung-wha, les Américains doivent accéder à une revendication clé des Nord-Coréens en contrepartie du démantèlement de Yongbyon : une déclaration mettant formellement fin à la guerre de Corée, qui ne s'est achevée en 1953 que par un simple armistice.

« Je pense à ce stade que c'est ce qui va se passer, c'est tout à fait un accord que Trump peut annoncer » lors du prochain sommet, dit à l'AFP l'ancien haut responsable américain Douglas Paal, aujourd'hui expert du Carnegie Endowment for International Peace.

Selon lui, le président américain semble pour l'instant se satisfaire de mesures qui « donnent l'impression que la menace a baissé », « ce qui peut suffire à court terme ou, dans l'esprit de la Maison-Blanche, jusqu'aux élections législatives de mi-mandat » en novembre.

Dans cette approche pragmatique, la priorité est donnée aux mesures concrètes.

Pas question, dit la cheffe de la diplomatie sud-coréenne, de perdre du temps à tenter d'obtenir, puis de vérifier, un inventaire exhaustif des installations et matériaux nucléaires de Pyongyang, pourtant considéré comme la première étape incontournable par de nombreux observateurs.

« La dernière fois », en 2008, « les choses ont déraillé justement au moment où nous travaillions sur un protocole détaillé sur la vérification après avoir obtenu une liste », a-t-elle expliqué au Washington Post.

Mais même avec un tel scénario sur la table, les tractations s'annoncent ardues, d'autant que le régime de M. Kim a déjà fait monter les enchères.

« La fin de la guerre » ne « pourra jamais être un élément de marchandage pour obtenir la dénucléarisation », ont prévenu les autorités nord-coréennes via leur agence de presse officielle. Elles semblent au contraire mettre la pression pour obtenir un relâchement des sanctions internationales qui étranglent leur économie, alors même que l'administration Trump jure qu'elles resteront en place jusqu'à la fin du désarmement.