Dans la tourmente des scandales de pédophilie, l'Eglise catholique a riposté avec vigueur vendredi à travers de multiples messages de soutien au pape, sous le feu d'attaques que le prédicateur du Vatican a comparé, de façon indirecte, à l'antisémitisme.

Toute la soirée du Vendredi Saint, des milliers de personnes ont assisté au pied du Colisée, dans le centre historique de Rome, au chemin de croix, qui commémore le martyre et la mort du Christ.

Comme l'an dernier, Benoît XVI, qui aura bientôt 83 ans, a présidé la célébration depuis la terrasse du Mont Palatin, face au Colisée, sans participer au parcours, et n'a pris la croix en bois qu'à la toute fin.

Pendant cette cérémonie retransmise en mondiovision dans une soixantaine de pays, le pape a appelé à l'espérance qui vient de la «lumière fulgurante de la résurrection». Celle-ci «transforme tout» et fait que «de la trahison peut naître l'amitié, du désaveu, le pardon et de la haine, l'amour», a-t-il dit.

«Nos échecs, nos déceptions, nos amertumes, qui semblent marquer l'écroulement de tout, sont illuminés par l'espérance», a-t-il ajouté.

Les attaques contre l'Église comparées à l'antisémitisme

Auparavant, au cours de la liturgie de la Passion du Christ à la basilique Saint-Pierre, présidée par Benoît XVI, le père Raniero Cantalamessa a donné lecture d'une lettre de «solidarité» au pape et à l'Eglise, qu'il a dit avoir reçu récemment d'un «ami juif».

«Je suis avec dégoût l'attaque violente et concentrique contre l'Eglise (et) le pape», écrit l'auteur de la lettre cité par le prédicateur de la maison pontificale.

«L'utilisation du stéréotype, le passage de la responsabilité et de la faute personnelles à la faute collective me rappellent les aspects les plus honteux de l'antisémitisme», poursuit-il.

Aux Etats-Unis, une association de victimes de prêtres pédophiles a jugé que ces déclarations constituaient «une insulte aussi bien pour les victimes d'agressions sexuelles que pour les juifs» tandis que le rabbin Gary Greenebaum, chargé des relations interreligieuses au sein de l'American Jewish Comittee, les a qualifiées de «malvenues».

Le porte-parole du Vatican, le père Federico Lombardi, a déclaré à l'AFP qu'il s'agissait «d'une lettre lue par le prédicateur, et non pas de la position officielle du Vatican».

Au cours de son sermon consacré à la violence, le père Cantalamessa avait affirmé auparavant qu'il ne parlerait pas de «celles infligées aux enfants dont se sont entâchés de façon infâme un nombre conséquent d'éléments du clergé», car «on en parle déjà suffisamment en dehors d'ici».

Nombreux messages de solidarité

Au moment de célébrer Pâques, sa principale fête, l'Eglise catholique traverse l'une des périodes les plus délicates de son histoire, secouée par des scandales d'abus sexuels sur des mineurs commis par des prêtres et des religieux, souvent couverts par leur hiérarchie, en Europe et aux Etats-Unis.

Mais Benoît XVI a reçu vendredi de nombreux messages de solidarité.

L'Osservatore Romano, journal du Vatican, publie des lettres comme celle du Conseil épiscopal latino-américain (Celam) qui dénonce une campagne médiatique «fausse et calomnieuse» contre Benoît XVI.

Les évêques canadiens ont exprimé au pape «admiration et gratidude» et déploré que «l'attention des médias soit simplement concentrée sur l'Eglise malgré le fait que ses représentants ont agi de manière sage et responsable».

En France, quelque 70 intellectuels ont appelé les médias à une «éthique de responsabilité» et rendu «hommage au pape de sa volonté de faire la lumière sur ces cas», dans une lettre publiée sur internet (www.appelaverite.fr) et reprise par l'Osservatore Romano.

Le cardinal américain William Levada, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, a mis en avant «la dette de gratitude» envers Benoît XVI «pour avoir introduit les procédures qui ont aidé l'Eglise à agir face au scandale des abus sexuels».

L'ancien chef de l'épiscopat italien, le très respecté cardinal Camillo Ruini, qui a rédigé les «méditations» lues à chaque station du chemin de croix, a reconnu que l'Eglise catholique «traversait une période de souffrance».

«Une souffrance pour les fautes commises par les enfants de l'Eglise, en particulier les prêtres, et pour la volonté de s'en prendre à l'Eglise», a estimé le prélat sur Radio Vatican.

A New York, une dizaine de victimes de prêtres pédophiles ont manifesté devant la cathédrale Saint Patrick, pendant la célébration de la liturgie du Vendredi Saint.