Le Sénat américain a rejeté mardi une résolution qui visait à arrêter l'assistance militaire à la coalition menée par l'Arabie saoudite contre les rebelles Houthis au Yémen, alors que le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane a rencontré Donald Trump à Washington.

L'initiative, réclamée par trois sénateurs de la majorité et de l'opposition unis pour l'occasion, aurait déclaré le soutien militaire américain à la coalition illégal, et conduit à son interruption en cas d'adoption par la Chambre des représentants.

Mais les sénateurs l'ont rejetée, par 55 voix contre 44, certains estimant la tentative bâclée tandis que d'autres jugeaient indispensable de continuer à soutenir l'Arabie saoudite face à la montée de l'Iran, accusé de soutenir les Houthis.

Les États-Unis fournissent depuis 2015, sous la présidence de Barack Obama, des renseignements, de l'aide au ciblage, du ravitaillement en vol et du soutien logistique à la coalition, mais des sénateurs estiment que cet engagement militaire aurait dû être autorisé par le Congrès.

D'après la Constitution américaine, le Congrès déclare la guerre. Mais en pratique, les présidents américains ordonnent régulièrement des opérations militaires sans autorisation parlementaire.

«Si le Congrès veut faire la guerre au Yémen ou ailleurs, qu'on vote pour déclarer la guerre», avait plaidé Bernie Sanders, l'un des coauteurs de la résolution. «Arrêtons d'abdiquer cette responsabilité en faveur du président, qu'il soit républicain ou démocrate».

Mais le chef de la majorité républicaine, Mitch McConnell, était vigoureusement opposé, tout comme le président républicain de la commission des Affaires étrangères, Bob Corker, et plusieurs démocrates.

«Pas de précédent» 

Le sénateur Corker dit avoir interpellé avec d'autres élus, le matin-même, le prince héritier, qui est passé au Capitole, sur la conduite de la guerre au Yémen.

Mais il a promis, à la place de l'interruption proposée de l'aide militaire, une loi en bonne et due forme sur le Yémen, l'Arabie saoudite et l'Iran.

Le leader républicain, Mitch McConnell, contestait l'idée même que les États-Unis soient engagés dans des «hostilités», puisque les Américains ne sont pas sur le champ de bataille, leur apport principal étant le ravitaillement en vol d'avions de la coalition et le renseignement pour le ciblage des bombardements.

«Nous ne devons pas créer ce précédent», a ajouté Bob Corker, en citant tous les théâtres où les États-Unis fournissent soutien logistique ou renseignements, comme ce fut le cas au Mali avec l'armée française.

«Dites cela aux Yéménites, dont les maisons et les vies ont été détruites par des bombes Made in USA lâchées par des avions ravitaillés en vol par l'armée de l'air américaine sur des cibles choisies avec l'assistance des États-Unis», a tonné Bernie Sanders, égrenant les terribles statistiques des morts de la guerre, près de 10 000 à ce jour.

De l'autre côté de l'échiquier politique, le conservateur Mike Lee a défendu la résolution au nom d'une interprétation stricte de la Constitution.

«L'administration actuelle a poursuivi la guerre d'Obama», a-t-il dit. «Nous donnons au Congrès une chance de corriger cette erreur».

Entre-temps, Donald Trump a reçu le prince héritier saoudien à la Maison-Blanche, vantant les ventes d'armes américaines au royaume.

De nombreux élus contestent par ailleurs la base juridique des interventions militaires en Syrie et dans d'autres parties du monde, estimant que les deux autorisations de recours à la force adoptées après les attentats du 11-Septembre contre Al-Qaïda et l'Irak en 2001 et 2002 étaient obsolètes.

Bob Corker a annoncé pour avril une révision de ces autorisations de recours à la force.