Des combattants du nouveau régime libyen sont partis à l'attaque de Bani Walid, ville fidèle au leader libyen en fuite Mouammar Kadhafi, a affirmé samedi soir un porte-parole local du Conseil national de transition (CNT), issu de la rébellion libyenne.

«On entre dans Bani Walid, et nous allons combattre» a déclaré Mahmoud Abdelaziz, porte-parole du CNT au poste de Chichan, où les combattants se sont regroupés à environ 70 km au nord de Bani Walid.

Une journaliste de l'AFP a vu au moins deux camions équipés de mitrailleuses lourdes prendre la direction de Bani Walid, tandis que quatre ambulances se tenaient prêtes à intervenir pou évacuer les éventuelles victimes des combats attendus.

Quelques heures plus tôt, M. Abdelaziz avait assuré que la ville allait tomber «dans quelques heures».

«Aujourd'hui, dans la nuit, ou demain matin, dans quelques heures, nous allons récupérer Bani Walid (...). Des gens là-bas ont demandé plus de temps, mais nous n'avons plus de patience», a-t-il dit

L'après-midi, Abdelrazzak Naduri, numéro 2 du conseil militaire de Tarhouna, à environ 80 km au nord de Bani Walid avait donné jusqu'à dimanche matin 10h (4h, heure de Montréal) aux habitants de la ville pour se rendre.

À Benghazi, le président du CNT, Moustapha Abdeljalil, avait pourtant répété samedi après-midi que l'ultimatum lancé aux pro-Kadhafi pour qu'ils déposent les armes était prolongé jusqu'au 10 septembre pour donner une chance aux négociations, «à Syrte, Bani Walid, Jeffra et Sebha».

Selon M. Naduri, plusieurs proches de Mouammar Kadhafi, dont son fils Saadi, se trouvent actuellement à Bani Walid, fief d'une tribu fidèle à l'ancien «Guide» en fuite, les Warfalla, l'une des plus puissantes du pays qui compte environ un million de personnes.

Le colonel Kadhafi lui-même n'est pas à Bani Walid, a cependant assuré M. Naduri, alors que le vice-président du CNT Abdel Hafiz Ghoga avait déclaré jeudi que cela pourrait être le cas.

Les nouveaux dirigeants en Libye, cherchant à asseoir leur pouvoir, ont annoncé leur installation prochaine à Tripoli et la formation d'une armée nationale.

Samedi, un émissaire spécial du secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, Ian Martin, est arrivé à Tripoli pour s'enquérir des besoins du Conseil national de transition (CNT), issu de la rébellion, afin de l'aider à rétablir la stabilité et la sécurité en Libye.

L'ONU accueillera d'ailleurs le 20 septembre à New York la prochaine conférence des «amis de la Libye», a annoncé samedi le ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé.

Reconnu comme représentant légitime du peuple libyen par plus d'une soixantaine de pays, le CNT vient aussi d'être invité à Moscou par le gouvernement russe, qui a finalement lâché Mouammar Kadhafi, son allié de longue date.

Ils doivent parler d'énergie alors que la Libye, principale réserve de pétrole d'Afrique et quatrième producteur du continent, cherche à relancer sa production, qui était d'environ 1,7 million de barils par jour avant le conflit déclenché le 15 février par une révolte contre le pouvoir de Kadhafi.

Plusieurs sites épargnés par les combats pourraient reprendre leurs activités dans les prochains jours. Selon le «ministre» des Finances et du Pétrole, Ali Tarhouni, les champs de Misra et Sarir devraient ainsi redémarrer à la mi-septembre.

Cherchant parallèlement à rétablir l'ordre et à reconstruire le pays ravagé par la guerre civile, le CNT a annoncé qu'il s'installerait «la semaine prochaine» à Tripoli, après avoir siégé des mois à Benghazi, à un millier de kilomètres à l'est.

Les nouvelles autorités ont aussi créé une commission chargée de la sécurité dans la capitale, sous la direction d'Ali Tarhouni. Ses 17 membres se sont accordés pour dire que la sécurité de la capitale dépendait du ministère de l'Intérieur.

Mais dans l'immédiat, des unités de combattants pro-CNT vont cependant aider la police pour assurer la sécurité dans les rues de la capitale. Elles quitteront la capitale dès que la police de la ville, qui assure compter 7000 hommes, sera en mesure de prendre le relais, a expliqué M. Tarhouni.

Des policiers ont recommencé samedi à patrouiller dans la capitale. Autre signe de normalisation, la circulation a repris, avec de nombreux embouteillages, et certains barrages ont été démantelés. Des banques et certains commerces ont rouvert, et les queues s'allongeaient devant les boulangeries.

Sur le plan politique, le représentant du CNT au Royaume-Uni, Guma al-Gamaty, a évoqué vendredi un calendrier prévoyant des élections générales dans 20 mois. Le CNT va diriger la Libye pendant huit mois, jusqu'à ce qu'une assemblée élue ne prenne les commandes pour rédiger une Constitution, et «au bout d'un an, des élections seront organisées», a-t-il dit à la BBC.

Parallèlement, le responsable des affaires militaires au sein du CNT, Omar al-Hariri, a annoncé que la reconstitution de l'armée nationale libyenne était en cours.

La communauté internationale et le nouveau régime, qui contrôle la majeure partie de Libye, estiment que le conflit sera vraiment terminé avec la capture de l'ex-homme fort du pays, qui reste introuvable et veut toujours se battre.

Aucun mouvement n'a été relevé en direction de Syrte, que ce soit par l'ouest ou par l'est, où les deux fronts sont restés calmes samedi.

Face à un début de retour à la normale, les investisseurs étrangers ont été invités à revenir en Libye. «Leurs investissements sont encore là et nous respectons les contrats passés», a affirmé le «ministre» de l'Économie du CNT, Abdallah Shamiyya.

Le ministre italien des Affaires étrangères, Franco Frattini, a affirmé que son pays maintiendrait «sa première place» dans la production d'hydrocarbures en Libye et qu'il ne craignait pas de perdre son rang face à d'autres pays en pointe aux côtés des anti-Kadhafi, comme la France.