De retour lundi soir à la Maison-Blanche à l'issue d'un long week-end familial en Californie, Barack Obama était attendu sur un dossier sur lequel il pensait avoir, pour une part, tourné la page: l'Irak.

Frappes aériennes grâce à des avions de combat ou des drones, renforcement de l'aide au gouvernement irakien (formation, renseignement), coopération avec l'Iran: face à l'avancée des jihadistes sunnites en Irak, le président des États-Unis procède à «un examen minutieux de chaque option à sa disposition», a expliqué le secrétaire d'État John Kerry.

Selon Josh Earnest, porte-parole de la Maison-Blanche, M. Obama a été en contact étroit tout au long du week-end depuis Palm Springs avec Susan Rice, sa conseillère à la sécurité nationale. Il devait rencontrer lundi soir à la Maison-Blanche les membres du NSC pour faire le point sur les différentes options qui s'offrent à lui.

En fin de semaine dernière, M. Obama s'était donné quelques jours pour «rassembler les renseignements nécessaires».

Depuis, les combattants de l'État islamique en Irak et au Levant (EIIL) ont enregistré de nouvelles avancées sur le terrain et annoncé sur Twitter avoir massacré 1700 chiites membres des forces de l'armée de l'air, une affirmation non vérifiée de manière indépendante mais qui a provoqué une vive condamnation des États-Unis.

Fin mai, dans un discours à West Point, prestigieuse école de l'armée de Terre, M. Obama exposait les grands principes de sa politique étrangère, martelant que l'intervention militaire ne pouvait être «la seule composante du leadership américain en toute circonstance».

Moins de trois semaines plus tard, face à la fulgurante progression des combattants de l'EIIL, il est appelé à trancher sur ce thème.

Interrogée sur l'éventuel envoi d'Américains sur place, la porte-parole du NSC, Caitlin Hayden, a rappelé que la Maison-Blanche avait exclu d'envoyer des troupes de combat sur le terrain mais souligné qu'au cours de l'année écoulée, les États-Unis avaient «régulièrement augmenté» leur aide au gouvernement irakien en termes de sécurité, citant la formation, l'équipement et le renseignement.

Lundi soir, M. Obama a annoncé le déploiement en cours de 275 militaires américains en Irak pour protéger l'ambassade des États-Unis à Bagdad et les citoyens américains qui y travaillent. Cette force est «équipée pour le combat», a-t-il précisé.

«Parler aux Iraniens» 

Celui qui affiche inlassablement sa volonté de passer à une nouvelle étape après une décennie de guerre (Afghanistan, Irak) se retrouve une nouvelle fois happé par le conflit irakien, mais aussi syrien, tant les deux sont étroitement liés.

«Ce qui s'est passé à Mossoul (deuxième plus grande ville d'Irak, tombée aux mains des jihadistes) est le rappel, pour l'administration, que la crise en Syrie ne sera tout simplement jamais confinée à la Syrie», estime Suzanne Maloney, de la Brookings Institution à Washington.

Pour cette spécialiste du Moyen-Orient, l'administration Obama «a la responsabilité de s'investir dans la recherche de solutions plutôt que simplement dans la gestion de crises». «Cela signifie concrètement parler à toutes les parties en présence dans la région, en particulier les Iraniens», explique-t-elle.

Si Washington et Téhéran ont des intérêts communs évidents sur le dossier irakien, M. Obama devra peser au trébuchet la nature de l'éventuelle coopération avec l'Iran, tant la question est politiquement sensible aux États-Unis.

De «brèves discussions» sur la crise en Irak ont eu lieu lundi à Vienne entre les deux pays en marge de leurs négociations sur le programme nucléaire de Téhéran, a indiqué le département d'État américain lundi soir. «L'avenir dira si nous voulons continuer à parler avec l'Iran de l'Irak», a ajouté la porte-parole de la diplomatie américaine, Marie Harf.

Le Pentagone comme la Maison-Blanche ont souligné qu'aucune coordination des actions militaires entre les États-Unis et l'Iran n'était à l'ordre du jour.

Le sénateur républicain John McCain a jugé de son côté que considérer Téhéran comme un partenaire dans la gestion de la crise irakienne serait «la pire bêtise qui soit».

«Plus nous attendons, plus nos partenaires irakiens deviendront dépendants du régime iranien. Ce n'est ni dans notre intérêt, ni cohérent avec nos valeurs», a-t-il dit.