Un groupe emmené par des moines bouddhistes extrémistes s'en est pris mardi à un abri des Nations unies qui hébergeait des réfugiés rohingyas au Sri Lanka, a indiqué une source policière.

Dans l'après-midi, des religieux en robes safran et bordeaux ont mené un groupe de plusieurs dizaines de personnes vers une maison en périphérie sud de la capitale Colombo.

31 Rohingyas ayant fui la Birmanie, secourus sur un bateau à la dérive au mois de mai par la marine sri-lankaise, y étaient logés par le Haut-Commissariat aux réfugiés. Ils attendent d'être envoyés dans un pays tiers.

Sur des vidéos diffusées en direct sur Facebook, on voit une poignée de moines guider une bande. Puis leurs partisans enfoncent les portes et brisent les vitres à coups de pierres.

«Nous avons repoussé l'émeute et les réfugiés seront relogés dans un endroit plus sûr», a déclaré à l'AFP un responsable de la police sous couvert d'anonymat. La police n'a pas fait état de blessés dans l'incident.

Les agitateurs sont membres du groupe radical Sinhale Jathika Balamuluwa (Force nationale cinghalaise). L'île de l'océan Indien connaît une montée de l'extrémisme bouddhiste. Le bouddhisme est la religion majoritaire au Sri Lanka.

«Voilà les terroristes rohingyas qui tuent des moines bouddhistes en Birmanie», lance un moine sur l'une des vidéos, en montrant des mères rohingyas tenant leurs petits enfants dans les bras.

Le radicalisme de moines cinghalais au Sri Lanka est étroitement lié à un mouvement extrémiste similaire en Birmanie, qui compte parmi ses figures de proue le moine Wirathu. Les hauts responsables de ces organisations se sont rencontrés à plusieurs reprises.

Cette attaque fait écho à la crise humanitaire qui se déroule de l'autre côté du golfe du Bengale.

480 000 Rohingyas passés au Bangladesh en un mois

480 000 réfugiés rohingyas sont passés au Bangladesh depuis le 25 août pour fuir les violences dans l'ouest de la Birmanie, selon un nouveau décompte de l'ONU mardi.

Cette estimation marque un bond notable par rapport à la dernière estimation disponible, qui était 436 000 réfugiés. Elle est principalement imputable au recensement de réfugiés de la minorité musulmane qui avaient échappé aux décomptes précédents, a précisé l'ONU dans un rapport de suivi de la situation.

Les Nations unies ont cependant fait état de plusieurs centaines de nouvelles arrivées en provenance de l'État birman du Rakhine (ouest) au cours des deux derniers jours.

L'exode des Rohingyas a provoqué une crise humanitaire dans le sud du Bangladesh, où la marée humaine a submergé les camps de réfugiés préexistants et surpeuplés.

Autorités et ONG s'inquiètent d'une potentielle bombe sanitaire, alors que les conditions sont réunies pour l'apparition d'épidémies de choléra, dysenterie ou diarrhées.

Sans toilettes, les réfugiés sont obligés de déféquer en plein air, contaminant parfois des points d'eau auxquels d'autres personnes sont susceptibles de s'abreuver.

En l'absence de solution politique en vue pour un éventuel retour des Rohingyas en Birmanie, les équipes humanitaires planifient d'ores et déjà pour le long terme. Des travaux ont commencé pour la construction d'un nouveau camp de réfugiés de 400 000 personnes.

Marginalisés en Birmanie, qui les considère comme des étrangers, les Rohingyas fuient une campagne de répression de l'armée birmane consécutive à des attaques de la jeune rébellion rohingya le 25 août.

L'ONU considère que les exactions de l'armée birmane et des milices bouddhistes au Rakhine relèvent de l'épuration ethnique.