Des foules immenses de manifestants intraitables sur leurs exigences de libertés politiques se sont rassemblées à Hong Kong mercredi pour une démonstration de force le jour de la fête nationale chinoise.

Les leaders étudiants des manifestations ont, quant à eux, menacé d'intensifier leur mouvement et d'envahir les bureaux du gouvernement si le chef de l'exécutif, Leung Chun-ying, ne démissionnait pas.

«Si notre chef de l'exécutif et le gouvernement central (à Pékin) ne respectent ni n'écoutent l'opinion publique, nous étudierons différentes actions à mener dans les jours prochains, y compris l'occupation d'autres lieux comme les principaux bâtiments gouvernementaux», a déclaré Agnes Chow du mouvement étudiant Scholarism.

Leung Chun-ying devra démissionner «aujourd'hui ou demain», a-t-elle ajouté.

Un des responsables de la principale coalition des manifestants, Occupy Central, a aussitôt pris ses distances avec cette annonce. Toute escalade sera «une initiative des étudiants», a-t-il dit, en fermant néanmoins la porte à toute négociation avec l'actuel numéro un hongkongais.

«Nous pouvons parler avec n'importe quel membre du gouvernement, sauf lui», a martelé Chan-Kin-man.

Les meneurs des manifestations cherchent à éviter une répétition des violences de dimanche lorsque la police antiémeutes avait tenté de déloger les manifestants en faisant usage de gaz lacrymogène et de gaz au poivre.

Mais ce sont les étudiants et les adolescents qui battent inlassablement le pavé et occupent les quartiers vitaux de la ville et ils répondent en premier lieu aux mots d'ordre de leurs leaders.

Alors que les hauts responsables chinois et hongkongais marquaient le 65e anniversaire de la République populaire de Chine, les manifestants ont de nouveau occupé le coeur de Hong Kong, plus nombreux que jamais même si aucune estimation fiable n'était immédiatement disponible.

De nombreux Hongkongais ne sont pas au travail en raison de la fête nationale chinoise et jeudi est également férié. Les organisateurs espèrent pour cette raison que les manifestations seront encore plus massives que ces derniers jours.

Dimanche, la campagne de désobéissance civile qui couvait depuis plusieurs semaines dans l'ancienne colonie britannique s'est brutalement intensifiée, provoquant la plus grave crise politique depuis la rétrocession de Hong Kong à la Chine en 1997.

Et les protestataires, qui réclament par dizaines de milliers l'instauration du suffrage universel plein et entier, commencent à recevoir le soutien de l'étranger.

Une page Facebook «United for Democracy: Global Solidarity with Hong Kong» a annoncé des dizaines de rassemblements ce mercredi sur tous les continents. Quelque 300 personnes se sont ainsi réunies à Auckland, en Nouvelle-Zélande, et des réunions étaient prévues notamment à Montréal (Université McGill à 14h) Paris (au Champ de Mars à partir de 18 h 30 heure française (12 h 30 à Montréal), Los Angeles, New York et Londres.

Le chef de l'exécutif local, Leung Chun-ying, n'a pas fait explicitement allusion au mouvement prodémocratie dans le discours qu'il a prononcé à l'occasion de la fête nationalise chinoise. Il a appelé au contraire à la coopération avec la Chine.

Que «le rêve chinois devienne réalité»

«Le développement de Hong Kong et celui du continent (la Chine, NDLR) sont étroitement liés. Nous devons travailler main dans la main pour que le rêve chinois devienne réalité», a lancé M. Leung, dont les manifestants réclament la tête, car ils lui reprochent sa proximité avec Pékin.

«Il est compréhensible que des personnes différentes aient des perceptions différentes des réformes souhaitables, mais il est clairement préférable d'avoir un suffrage universel que de ne pas l'avoir», a-t-il dit, avant de lever son verre en l'honneur de Zhang Xiaoming, le représentant de Pékin à Hong Kong.

Les manifestants sont vent debout contre la décision de la Chine, annoncée en août, d'accorder le suffrage universel pour l'élection du chef de l'exécutif en 2017 tout en gardant le contrôle des candidatures, en violation, selon eux, des engagements de Pékin lors de la rétrocession de 1997 après 150 ans de présence britannique.

«Bien sûr que le peuple de Hong Kong doit travailler avec Pékin, mais ils ne peuvent pas contraindre Hong Kong à une démocratie fallacieuse. On n'est pas au Tibet ni au Xinjiang», régions chinoises en proie à des troubles, a jugé Edward Chun, un des responsables d'Occupy Central, la principale coalition prodémocratie.

PHOTO ALEX OGLE, AGENCE FRANCE-PRESSE

Dimanche, la campagne de désobéissance civile qui couvait depuis plusieurs semaines dans l'ancienne colonie britannique s'est brutalement intensifiée, provoquant la plus grave crise politique depuis la rétrocession de Hong Kong à la Chine en 1997.

«Tumeurs sur le corps sain» du PC

Les manifestants paralysent depuis plusieurs jours une grande partie de Hong Kong, réputée être un havre du capitalisme financier international. Leung Chun-ying avait appelé mardi Occupy Central à mettre fin sans délai au mouvement et permettre à la ville de retrouver un fonctionnement normal.

Sans surprise, la Chine, dont nul observateur ne pense qu'elle infléchira sa position, a apporté un soutien univoque à Leung Chun-ying.

Sans mentionner Hong Kong, le président chinois Xi Jinping a juré mardi d'éradiquer «toutes les tumeurs qui se développeraient sur le corps sain» du Parti communiste chinois (PCC). Celui-ci a durci sa censure contre les réseaux sociaux pour empêcher les Chinois de s'informer sur la fronde qui agite Hong Kong.

Selon des associations de défense des droits de l'homme, les autorités chinoises ont également arrêté une dizaine de dissidents et interrogé une soixantaine qui avaient exprimé leur soutien aux manifestants.

«La répression de militants en Chine éclaire les raisons pour lesquelles tant d'habitants de Hong Kong craignent le contrôle grandissant de Pékin sur les affaires de la ville», a écrit Amnistie internationale.

Des Chinois se rendraient spontanément à Hong Kong pour participer aux manifestations. Parmi eux, David Zhang, un consultant de 24 ans venu en train de Dongguang.

«C'est un message fort que la démocratie n'est pas imposée par les Occidentaux, mais par les étudiants locaux», a-t-il expliqué à l'AFP.

Washington a fait savoir que la situation ferait partie des discussions prévues mercredi au département d'État entre le secrétaire d'État américain, John Kerry, et son homologue chinois, Wang Yi.

PHOTO BOBBY YIP, REUTERS

Paul Zimmerman, un conseiller municipal, brandit un parapluie (symbole par excellence des manifestants prodémocratie) alors que le chef de l'exécutif Leung Chun-ying et d'autres officiels portent un toast, lors d'une réception pour la fête nationale chinoise, à Hong Kong, le 1er octobre.