Un tribunal thaïlandais a interdit mercredi au gouvernement d'avoir recours à la force contre les manifestants qui tentent de chasser la première ministre, au lendemain d'affrontements entre protestataires et policiers qui ont fait au moins cinq morts et des dizaines de blessés.

Cette décision prive la première ministre Yingluck Shinawatra de plusieurs options quand vient le temps de répondre aux manifestants qui occupent impunément plusieurs grandes intersections de la capitale depuis des semaines.

Elle pourrait aussi devoir affronter un vote de destitution après que la Commission anticorruption nationale ait statué que son gouvernement a incorrectement géré un dispendieux programme de subventions agricoles.

Des milliers de manifestants s'étaient de nouveau rassemblés mercredi devant ses bureaux temporaires pour réclamer sa démission. Mme Yingluck et ses ministres n'étaient toutefois pas sur place.

Les manifestants ont demandé au ministère de la Défense de lui interdire d'utiliser ses locaux comme bureau de rechange. Mme Yingluck est incapable d'avoir accès à ses bureaux habituels au centre de Bangkok, puisque l'endroit est encerclé par des protestataires et que quelques barrières ont été cimentées.

La Cour civile a statué que certains ordres émis en vertu d'un décret d'urgence par la première ministre et un centre de commandement spécial des forces de sécurité sont illégaux puisqu'ils contreviennent aux droits constitutionnels des manifestants.

Les ordres touchés concernent un interdit sur les rassemblements de cinq personnes ou plus, sur l'accès à certains édifices et sur l'utilisation de certaines routes par les manifestants.

Le tribunal a aussi interdit au gouvernement d'avoir recours à la force.

Le tribunal, en revanche, a refusé d'accéder à la requête des manifestants qui réclamaient l'annulation de l'état d'urgence, affirmant que les autorités exécutives du pays ont le pouvoir d'imposer une telle loi.

Le cabinet thaïlandais a proclamé l'état d'urgence dans la région de Bangkok le 21 janvier, après que les manifestants aient menacé de paralyser la capitale en bloquant certaines intersections et en occupant des édifices gouvernementaux.

Dans sa décision, le tribunal souligne que les ordres du gouvernement «violent et affectent les droits des manifestants en vertu de la Constitution».

Il rappelle que la Cour constitutionnelle thaïlandaise avait précédemment tranché que les manifestants étaient pacifiques. Conséquemment, a dit le tribunal, la première ministre «ne peut avoir recours à la force» contre eux.

«Quand les faits démontrent que des ordres ont été donnés pour que de nombreux policiers viennent à Bangkok réprimer les manifestants, le tribunal, conséquemment, décide de protéger les droits des manifestants à se rassembler pacifiquement et sans armes», a déclaré le tribunal.

On ne sait pas comment ce jugement pourrait influencer les mandats d'arrestation émis contre plusieurs leaders de l'opposition qui n'ont pas respecté l'état d'urgence.

Photo Wason Wanichakorn, AP